Intervention de Gilles Lurton

Séance en hémicycle du jeudi 25 juin 2020 à 9h00
Versement de la prime de naissance avant la naissance de l'enfant — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilles Lurton, rapporteur de la commission des affaires sociales :

L'objet de cette proposition de loi est un marqueur de mes mandats successifs. Les semaines précédant l'arrivée d'un enfant dans une famille sont particulières. Ce sont des moments de joie, parfois d'angoisse ; ils sont en tout cas exceptionnels dans la vie d'un foyer car ils sont consacrés aux derniers préparatifs avant la naissance. Pendant les dernières semaines de la grossesse, les futurs parents, soucieux d'accueillir leur enfant dans les meilleures conditions, doivent acheter tout ce qui est indispensable au nouveau-né dès ses premiers jours. C'est bien dès la sortie de la maternité que le nouveau-né a besoin d'un siège-auto pour rejoindre son premier foyer, d'un couffin pour sa première sieste, d'une poussette pour ses premières sorties, ainsi que d'une baignoire, d'une table à langer, de quelques vêtements et de nombreux articles de puériculture.

Vous le voyez : si la naissance d'un enfant reste une richesse inestimable, elle a un coût ! La prime à la naissance, d'un montant de 947 euros, tend à permettre aux familles dont les revenus n'excèdent pas un certain seuil de faire face aux premières dépenses liées à l'arrivée de cet enfant. Les plafonds de ressources y ouvrant droit sont élevés, si bien qu'elle bénéficie également aux familles de la classe moyenne – le plafond est de 49 000 euros par an pour un couple biactif avec deux enfants. Chaque mois, près de 45 000 allocataires bénéficient de cette prime, qui est un élément essentiel de notre politique familiale – mais encore faut-il qu'elle puisse jouer pleinement son rôle en étant versée au moment où les parents en ont le plus besoin.

Jusqu'en 2015, la prime à la naissance était, fort logiquement, versée avant la naissance de l'enfant, lors du septième mois de grossesse. Or la précédente majorité a décidé, par décret, d'en décaler le versement après la naissance. Cette décision, que je n'ai cessé de contester, pénalise les familles qui ont besoin de cette aide pour préparer matériellement l'arrivée d'un nouvel enfant, dans des conditions sereines. Pire, elle a été prise en dépit du bon sens, car c'est bien avant la naissance, et non après celle-ci, que les familles s'équipent. Ne négligeons pas non plus la dimension affective de ces préparatifs.

Ce décalage est de surcroît contraire à l'esprit de la loi, qui dispose que la prime est attribuée pour chaque enfant à naître avant sa naissance – la loi n'a pas été modifiée en l'espèce. En rétablissant le versement de la prime avant la naissance, nous redonnerions sa cohérence juridique au code de la sécurité sociale, qui n'a pas été modifié lorsque le Gouvernement a pris le décret en décembre 2014.

Qui plus est, ce report dans le temps ne saurait être justifié par la nécessité de réaliser des économies au niveau de la branche famille. En effet, il ne permet de dégager aucune réelle économie, puisque ni les critères d'attribution ni le montant de la prime n'ont été modifiés. Il a seulement permis de constituer un gain de trésorerie pour les organismes de sécurité sociale, évalué par la CNAF, la caisse nationale des allocations familiales, à 239 millions d'euros en 2015. Ce décalage, qui n'a eu aucune conséquence financière les années suivantes, a continué de pénaliser, chaque mois, des dizaines de milliers de familles.

Il est souvent avancé que les familles peuvent bénéficier d'un prêt ou d'une avance de la part de leur caisse d'allocations familiales, qu'elles devront rembourser lorsqu'elles percevront la prime. Cependant, ce prêt, loin d'équivaloir au versement anticipé de la prime, suppose que les familles soient informées de ce droit et qu'elles se plient à une démarche volontariste pour le faire valoir, contrairement au versement de la prime à la naissance, qui est automatique. Cette procédure fragilise encore davantage les ménages qui ne peuvent avancer l'ensemble des frais précédant la naissance de l'enfant.

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