Intervention de Maxime Minot

Séance en hémicycle du jeudi 25 juin 2020 à 15h00
Éthique de l'urgence — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMaxime Minot :

Des situations d'une dureté sans pareille ont indéniablement participé à nous faire prendre conscience de la dangerosité de l'épidémie, mais elles ont aussi été le révélateur de notre société, de ses faiblesses et de ses forces. Lors de l'épidémie de covid-19, les questions éthiques ont malheureusement été reléguées au second plan de nos préoccupations. Elles renvoient pourtant à ce que nous avons de plus précieux et à ce qu'il nous faut coûte que coûte préserver, même dans les situations les plus difficiles et extrêmes : la dignité de la personne humaine.

Des lignes rouges ont été franchies pour répondre à l'urgence et à la gravité de la crise sanitaire. Ainsi, de nombreuses interrogations demeurent sur la gestion de l'épidémie dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, les EHPAD, en particulier concernant les rites funéraires en suspens ou l'isolement des résidents. Il ne s'agit pas de distribuer des mauvais points ou d'adresser quelque reproche ou leçon de morale que ce soit – ce serait indigne et bien mal à propos. Il ne s'agit pas non plus d'accuser ceux qui ont été dos au mur et qui ont fait face, avec les moyens qui étaient les leurs et cette abnégation qui force notre admiration car elle révèle le meilleur de l'Homme – j'insiste sur la majuscule. Il nous faut toutefois accepter ce constat sans faux-semblants et avec responsabilité pour en tirer toutes les leçons, dont la première est qu'un indispensable travail d'accompagnement des familles, des soignants et des résidents des EHPAD devra être mené.

Je tiens à remercier Xavier Breton pour ce texte qui nous permet d'avancer en la matière dans un esprit d'apaisement et de consensus, indispensable à ce sujet essentiel. En effet, la proposition de loi n'a pour objet ni d'escamoter le débat sur la bioéthique ni de modifier les lois Leonetti sur la fin de vie ou d'autres textes de même nature ; elle vise à éviter, qu'à l'avenir, de telles décisions politiques soient prises sans tenir compte de la dimension éthique, en laissant toute la responsabilité reposer sur les épaules de ceux qui sont en première ligne.

C'est pourquoi il est prévu de faire du CCNE la vigie éthique de l'état d'urgence sanitaire. Il rendra un avis préalable, des possibilités de saisines seront ouvertes aux parlementaires, et il remettra un rapport donnant lieu à un débat en fin d'état d'urgence sanitaire.

En commission, le texte a été réécrit avec l'accord du rapporteur afin de rendre le dispositif plus souple.

Le rapport du CCNE n'est plus un préalable aux mesures prises dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire – cette disposition aurait pu alourdir profondément le dispositif sachant que ni la nature ni les moyens techniques du CCNE ne lui permettent de travailler dans une telle urgence. En revanche, il est bien prévu que le Comité rende un rapport sur les mesures prises et qu'il puisse être saisi par les parlementaires en cas de déclaration ou de prorogation de l'état d'urgence sanitaire.

La commission a adopté ces modifications à l'unanimité, tout comme la proposition de loi, ce qui, je crois, est assez rare pour être souligné et salué – décidément nous aurons eu un bel après-midi avec les propositions de loi inscrites à l'ordre du jour par le groupe Les Républicains. J'ajoute que la commission a eu à examiner un nombre réduit d'amendements et qu'ils ont presque tous été adoptés.

Un nouvel article a aussi été introduit en commission, qui me paraît assez pertinent : il vise à donner de la matière à notre exigence partagée de clarté et de transparence en prévoyant que le Gouvernement remettra au Parlement, avant le 1er janvier 2021, un rapport sur la fin de vie des personnes décédées pendant l'état d'urgence sanitaire. Ce rapport s'intéressera notamment aux modalités d'accompagnement de ces personnes ainsi qu'aux mesures dérogatoires au droit commun de la législation funéraire prises dans le cadre de l'épidémie de covid-19.

Cette proposition de loi constitue donc la preuve que, sur des questions aussi fondamentales que la dignité humaine, nous pouvons travailler de concert. C'est heureux et rassurant pour nos débats, nos institutions et notre avenir. Ça l'est pour nos débats, et il faudra s'en souvenir, dans quelques jours, lors de l'examen du projet de loi relatif à la bioéthique. Ça l'est pour nos institutions, car le Parlement est le lieu de l'expression du peuple français souverain et qu'il ne doit y avoir en son sein aucun sujet tabou. Ça l'est pour notre avenir car, même si je ne la souhaite évidemment pas, une seconde vague est possible et nous devrons être prêts pour combattre de nouveau le virus.

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