Intervention de Dimitri Houbron

Séance en hémicycle du lundi 27 juillet 2020 à 16h00
Mesures de sureté à l'encontre des auteurs d'infractions terroristes — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDimitri Houbron :

Nous arrivons au bout d'un long chemin, car ce texte nous occupe depuis plusieurs mois. Même si le groupe Agir ensemble n'a pas pu, hélas, participer à la CMP, nous nous réjouissons des conclusions de celle-ci, tant elles établissent l'équilibre entre la protection des Français dans la lutte contre le terrorisme et le respect des libertés fondamentales. Le terrorisme, en dépit d'une actualité qui nous laisse à penser que la covid-19 occupe l'esprit des Français, demeure une réalité quotidienne, un risque permanent pour la sécurité de nos concitoyens et pour l'ordre public, d'autant que, on le sait, quarante-trois condamnés présentant une dangerosité avérée seront libérés d'ici à la fin de l'année.

Fallait-il prévoir un nouveau texte, en l'occurrence une proposition de loi, alors que, comme vous l'avez rappelé, monsieur le garde des sceaux, il en existe déjà une multitude, dont nous sommes en partie responsables en tant que législateurs depuis 2017 ? Nous devons toutefois répondre à l'impératif de sécurité, d'autant que le Conseil d'État nous a alertés sur une nécessaire clarification : nous partageons avec vous l'objectif d'évaluation de l'ensemble des dispositifs existants, pour permettre aux acteurs concernés de disposer d'une plus grande lisibilité et d'être ainsi plus efficaces.

Nous devions combler le vide juridique concernant ces condamnés libérés. C'est pourquoi je tiens à vous saluer, madame la rapporteure. Vous avez en effet eu le courage de défendre ce texte, malgré les difficultés qui se présentaient à elle, notamment en raison des différentes sensibilités existant à l'Assemblée nationale et au Sénat ; vous avez réussi à trouver un équilibre, et nous vous en félicitons.

Le vide juridique provient des sorties sèches, qui, rappelons-le, ont pour origine l'interdiction, peut-être par volonté de bien faire, d'appliquer aux auteurs d'infractions terroristes des mesures d'aménagement de fin de peine, si bien que ces personnes particulièrement dangereuses ne peuvent actuellement pas faire l'objet d'un suivi. Cette proposition de loi, qui concernera des personnes condamnées pour terrorisme à des peines égales ou supérieures à cinq ans de prison, vise précisément à remédier à cette carence. À leur sortie, la dangerosité de ces condamnés sera évaluée, non par des magistrats réunis entre eux ou par des membres des services de renseignement, mais par une commission pluridisciplinaire investie de cette mission.

Le débat sur la distinction entre les peines et les mesures de sûreté ne saurait être sans effet sur l'efficacité du texte. Nous le savons, une mesure de sûreté a pour but de prévenir un danger, tandis qu'une peine a pour objet de sanctionner un comportement. Le Conseil constitutionnel est particulièrement vigilant sur ce point. L'avis du Conseil d'État nous donne raison puisqu'il considère que les mesures proposées, allant d'un pointage trois fois par semaine jusqu'au port d'un bracelet électronique, répondent à la qualification de mesures de sûreté et sont donc conformes aux exigences constitutionnelles, ce qui permettra leur application rétroactive à des condamnés pour des faits commis avant la promulgation de la loi.

Certains craignent que le texte ne porte atteinte au pouvoir judiciaire. Or celui-ci garde la compétence et, il est important de le souligner, la proposition de loi respecte le contradictoire – je sais combien vous y êtes attaché, monsieur le garde des sceaux.

En outre, les principes de nécessité et de proportionnalité sont respectés à chaque ligne du texte.

Enfin, celui-ci répond à un besoin des acteurs chargés de lutter contre le terrorisme. Il faut leur faire confiance dans la façon dont ils appliqueront le texte, ce qui n'est en rien contraire à un objectif d'évaluation, en 2021, de l'ensemble des dispositifs existants, dont fera alors partie cette loi.

Par conséquent, le groupe Agir ensemble votera évidemment avec force pour la proposition de loi. Le désaccord que nous avions sur un point particulier a été réglé après la navette du texte entre le Sénat et l'Assemblée.

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