Intervention de Adrien Taquet

Séance en hémicycle du jeudi 30 juillet 2020 à 15h00
Bioéthique — Article 3

Adrien Taquet, secrétaire d'état chargé de l'enfance et des familles :

Le sujet est riche et complexe. J'entends tous les arguments, notamment les vôtres, Mme la rapporteure, et ceux de Mme Bannier. Il s'agit en effet de mettre en balance de grands principes et, derrière ces grands principes, des histoires et des personnes. Nous les avons rencontrées ; une partie de l'article 3 a d'ailleurs été inspirée par les entretiens avec les enfants, nés sous l'ancien régime, qui n'ont pas accès à leurs origines. Néanmoins, je m'inquiète à la fois pour le passé et pour l'avenir.

Pour le passé, car l'on recense 9 000 donneurs de spermatozoïdes depuis 1975, ce qui représente potentiellement 9 000 personnes à contacter ; or, comme l'a dit le député Mesnier, si l'identité de ces personnes a été enregistrée, notamment pour des raisons thérapeutiques, leurs coordonnées n'ont pas toujours été conservées. Nous risquons concrètement de créer de la déception chez les enfants nés de ces dons, voire une inégalité, si certains donneurs peuvent être contactés, mais pas d'autres. Ce détail peut sembler purement opérationnel, mais il a une incidence sur la vie des gens.

Pour l'avenir, ce sont les principes qui m'inquiètent. Vous avez rappelé le respect de la vie privée, madame la rapporteure, mais il y a aussi le respect de la parole donnée : les donneurs ont donné dans un cadre défini, sur lequel l'on propose actuellement de revenir, et cela m'inquiète pour les futurs donneurs. Pourront-ils croire notre parole quand nous leur dirons que certaines garanties sont attachées à leur don dans le nouveau régime, par exemple celle qu'aucune filiation biologique ne sera jamais établie entre eux et la personne née du don, alors que vous remettez en cause, en ce moment même, une parole donnée sous l'ancien régime ? J'ai peur que cela ne limite la confiance des nouveaux donneurs que nous allons solliciter à travers des campagnes d'incitation au don.

J'appelle donc au respect de la parole donnée dans le passé afin de créer les conditions de la confiance pour les dons à venir. Soyez assurés que nous mènerons des campagnes de sensibilisation appelant les anciens donneurs à se manifester afin de rendre possible, s'ils le souhaitent, l'accès aux origines. Voilà le point de vue du Gouvernement sur les données de ce débat complexe : veillons à ne pas trop promettre, car il sera concrètement impossible de retrouver certains donneurs, et faisons attention à ne pas miner la confiance que nous voulons instaurer dans le cadre du nouveau régime de don et d'accès aux origines.

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