Intervention de Gisèle Biémouret

Séance en hémicycle du mardi 14 novembre 2017 à 15h00
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 - projet de loi de finances pour 2018 — Culture

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGisèle Biémouret :

Madame la ministre, nous constatons que le budget de votre ministère est globalement maintenu par rapport à l'année dernière, ce qui est somme toute satisfaisant au regard du sort moins favorable réservé à d'autres missions. Cependant, comme vous le savez, nous y voyons plusieurs sources d'inquiétude importantes.

Nous ne retrouvons dans ce budget aucun effort particulier en faveur des territoires ruraux et de la France périphérique. Quant aux quelques mesures qui pourraient les concerner, elles seront difficiles à appliquer – je pense notamment à l'écueil de la mobilité pour le Pass culture – ou seront affectées par d'autres mesures prises par votre gouvernement.

Nous le constatons dans le programme « Patrimoines », dont nous craignons grandement que les nouveaux projets, centralisés pour la plupart dans la région parisienne, ne viennent siphonner la grande majorité des crédits qui pourraient être attribués aux territoires.

De même, votre volonté de cibler 200 bibliothèques pour en faire des maisons de service public culturel est une annonce séduisante. Notre pays est toutefois loin d'avoir atteint un niveau de maillage satisfaisant en termes d'équipement. Presque 55 % des communes ne disposent d'aucune bibliothèque propre ou proche. En outre, on ne retrouve ni dans ce budget ni dans celui des collectivités territoriales les ressources pour renforcer le maillage territorial et diminuer les inégalités territoriales, qui sont criantes.

Un autre exemple est la hausse des crédits pour la lecture publique, qui ne fait que compenser en partie la fin de la réserve parlementaire, puisque 600 000 euros étaient versés à ce titre par les députés en faveur du livre et de la lecture.

Enfin, la priorité que vous souhaitez donner à l'éducation artistique et culturelle pour, selon vous, permettre à tous les enfants d'accéder à la culture, ressemble étrangement, selon nous, à un autre dispositif remis en cause par votre majorité : la réforme des rythmes scolaires.

Notre inquiétude principale porte cependant sur le budget de l'audiovisuel public, qui est en baisse de 36 millions d'euros par rapport à 2017. Le maillon fort de l'audiovisuel public est en effet finalement et injustement le maillon faible de votre budget pour l'année 2018. Si vous avez l'habileté d'épargner un certain nombre de chaînes, nous sommes néanmoins nombreux sur ces bancs à nous inquiéter de la baisse des moyens de France Télévisions, dont le budget est amputé, contrairement à ce qui était inscrit dans le contrat d'objectifs et de moyens signé avec l'État en décembre 2016.

Cette coupe sévère des moyens va fragiliser les offres du groupe, qui sont pourtant très appréciées du public, lequel est très attaché à un service de l'audiovisuel public de qualité, comme l'a montré un sondage récent. France Télévisions a pourtant déjà fait de nombreux efforts en renonçant au remplacement de nombreux personnels, en poursuivant la réforme de ses structures et en procédant à des investissements conséquents en matière de numérique.

Et le document de travail sur la contribution du ministère de la culture au Comité action publique 2022 que Le Monde s'est procuré hier n'est pas pour nous rassurer sur les futures orientations que vous souhaitez donner à l'audiovisuel public. Il est en effet question de supprimer France Ô et de regrouper France Télévisions, Radio France et les autres sociétés du secteur au sein d'une holding. Il est d'ailleurs inquiétant et surprenant que vous ayez décidé de déposer une plainte à la suite de ces révélations, madame la ministre.

De telles orientations ne seront probablement pas sans conséquence sur les effectifs et entraîneront davantage de suppressions d'emplois alors qu'il est déjà prévu à nouveau de supprimer 660 postes en 2018. Sur un marché aussi concurrentiel, face aux GAFA – Google, Apple, Facebook et Amazon – , le service public doit avoir la capacité de rester un repère essentiel pour nos concitoyens en matière d'information et de contenu culturel. Vous ne pourrez pas faire l'économie d'un débat public sur le devenir du service audiovisuel public.

Pour le groupe Nouvelle Gauche, le signal que vous envoyez au travers de ce budget est un facteur d'affaiblissement. C'est pourquoi nous nous abstiendrons.

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