Intervention de Aude Bono-Vandorme

Séance en hémicycle du vendredi 31 juillet 2020 à 21h30
Bioéthique — Article 19 bis

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAude Bono-Vandorme :

Je m'étonne que, lors de l'examen du projet de loi modifié par le Sénat, la commission spéciale ait cru bon revenir sur des dispositions que nous avions repoussées en première lecture. La question nous est donc posée à nouveau : faut-il permettre un diagnostic préimplantatoire avec recherche d'aneuploïdies visant à trier les embryons ayant des anomalies du nombre de chromosomes ?

Permettez-moi de rappeler les propos tenus sur ce sujet, lors de la première lecture, par Mme Buzyn, alors ministre des solidarités et de la santé : « On aboutit ainsi au mythe de l'enfant "sain". [… ] L'étape suivante, le glissement naturel c'est d'aller chercher d'autres maladies génétiques fréquentes. ». Elle concluait son audition devant la commission en soulignant qu'il ne fallait pas faire croire aux parents qu'on réglerait tous les problèmes avec ces tests. Concrètement, quelles seraient les maladies à rechercher, et qui en déciderait ? Pour elle, il y avait là, éthiquement, « une dérive eugénique claire », l'analyse génétique des embryons devant aboutir à une société qui n'aura pas décidé d'être eugéniste, mais au sein de laquelle tout le monde voudra demander un enfant sain. Les couples qui procréent naturellement pourraient donc s'en trouver désavantagés et être amenés à demander une PMA. Or, qui voudrait implanter un embryon atteint de trisomie 21 ? Nous glisserions vers le tri d'embryons. « C'est horrible, une société eugéniste », ajoutait Mme Buzyn, précisant qu'il s'agissait d'« une dérive [… ] qu'on ne verra même pas venir ». Alors, pourquoi rouvrir ce débat ?

J'ai entendu prononcer à de nombreuses reprises dans cette enceinte le mot « amour » pour défendre ce texte. Autoriser le tri d'embryons est un message d'intolérance et de rejet des personnes différentes. Ce n'est en rien de l'amour. Mes valeurs sont celles d'une société inclusive qui accepte les différences : j'ai la certitude que l'on peut grandir avec elles. L'humanité ne se construit pas dans les laboratoires.

Je vous demande donc de revenir au texte adopté en première lecture et de repousser tous les amendements qui renverraient aux oubliettes le mot « bienveillance ». Je revois, en m'exprimant à cet instant, les images du Président de la République au Café Joyeux.

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