Intervention de Blandine Brocard

Séance en hémicycle du vendredi 31 juillet 2020 à 21h30
Bioéthique — Article 19 bis

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBlandine Brocard :

Chers collègues, il y a cinq jours, quand je me suis pour la première fois exprimée sur ce texte, c'était pour vous faire part de mes doutes et de mes interrogations ; permettez-moi de continuer sur cette lancée.

Pouvez-vous par exemple m'expliquer pourquoi ceux-là mêmes d'entre vous qui fustigent le tout business et le tout commercial sont parmi les premiers à appeler de leurs voeux l'autorisation et la généralisation de techniques impliquant forcément le développement de nouveaux marchés économiques au détriment de la fragilité et de l'âme même de notre humanité ?

Ou encore – autre question à laquelle j'ai beaucoup de mal à répondre – , à l'heure où l'écologie tient le devant de la scène et pèse dans toutes les décisions que nous sommes amenés à prendre, à l'heure où nous constatons les dramatiques méfaits de l'action de l'homme sur la nature et les limites du tout technologique sur notre environnement et sur notre humanité même, comment pouvons-nous encore décider d'être, envers et contre tout, maîtres et possesseurs de la nature ? Descartes d'ailleurs, en nous incitant à nous comporter ainsi, nous révèle en réalité que l'homme peut en effet chercher à dominer la nature, qu'il peut toujours feindre cette conquête ; sa connaissance en sera toujours imparfaite et il doit être conscient de ses limites.

Ce que nous avons fait à la nature depuis cinquante ans, nous sommes en train de le faire à l'humain. Quelle société voulons-nous ? Une société qui refuse tout signe de faiblesse et de vulnérabilité ? Ou bien une société qui prend soin des plus faibles et des plus vulnérables ? Oui, notre humanité est fragile et c'est ce qui fait sa beauté. La rationaliser à tout prix, à n'importe quel prix, c'est lui faire perdre son âme. Soyons imparfaits, acceptons de ne pas tout maîtriser et contrôler pour, au contraire, préserver notre humanité, dans son environnement naturel. Nous allons vers un monde uniforme où le différent est éradiqué, à l'opposé d'une société inclusive que l'on prétend vouloir construire avec les personnes fragiles. Comment peut-on aller vers une société inclusive si l'on commence par dire que ces personnes ne doivent pas exister ?

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