Intervention de Claudia Rouaux

Séance en hémicycle du jeudi 23 juillet 2020 à 15h00
Règlement du budget et approbation des comptes de l'année 2019 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaClaudia Rouaux :

Nous examinons aujourd'hui, en lecture définitive, un deuxième projet de loi de règlement d'un exercice budgétaire placé sous votre entière responsabilité. Sans surprise, comme en première lecture, vous vous félicitez de l'exécution budgétaire pour 2019. Je rappellerai pourtant que, pour la deuxième année consécutive, le déficit de l'État est en hausse, alors qu'il avait constamment diminué entre 2010 et 2017.

Le budget 2019, c'est celui qui a poursuivi la baisse drastique des emplois aidés : on n'en recense plus que 83 000 en 2019, contre près de 450 000 en 2016. Ces dispositifs soutiennent pourtant efficacement l'emploi à court terme, notamment dans le secteur non marchand, et renforcent la cohésion sociale. Je note toutefois que le regard de la majorité sur cet outil a manifestement changé : les annonces du Président de la République, le 14 juillet, puis du Premier ministre dans son plan pour l'emploi des jeunes dévoilé aujourd'hui, marquent une inflexion.

Le budget 2019, c'est celui qui a réduit, pour la première fois depuis 2012, les effectifs du ministère de l'éducation nationale. Cette réduction est même supérieure à celle prévue par le schéma d'emplois, qui envisageait une baisse de 1 800 emplois équivalents temps plein – ETP – , alors que 3 800 ont finalement été supprimés. Étonnante priorité que de supprimer des postes de professeurs en 2019 !

Le budget 2019, c'est celui qui a poursuivi la baisse des effectifs du ministère de l'action et des comptes publics. Avec vous, c'est toujours moins de douaniers, toujours moins de trésoreries sur les territoires.

Le budget 2019, c'est celui qui souligne le fiasco du fonds pour l'innovation et l'industrie – FII – que vous avez créé en 2018. Je m'y attarderai en m'appuyant sur les observations formulées par la Cour des comptes dans son rapport sur l'exécution budgétaire 2019. D'une part, en effet, la Cour critique vos pratiques de débudgétisation, qui affectent la lisibilité des financements dédiés à l'innovation et sont contraires au principe de sincérité budgétaire. D'autre part, elle souligne que le fonds est étrangement « maintenu en 2020 alors qu'il n'a financé des entreprises qu'à hauteur de 20 % de ses objectifs sur la période 2018-2019 ». Le financement de l'innovation de rupture est donc largement insuffisant. En outre, « les principaux projets financés sont ceux déjà financés par le budget général et le PIA – programme d'investissements d'avenir. Le fonds n'a donc pas apporté de plus-value par rapport aux circuits budgétaires classiques. » Vous étiez donc sur le point de privatiser ADP, groupe hautement stratégique, pour abonder un fonds qui ne sert à rien. Sans la demande de référendum d'initiative partagée lancée par les parlementaires socialistes, le rapport de la Cour des comptes serait arrivé trop tard. Il est temps d'arrêter le fiasco du FII et d'annoncer l'abandon définitif de la privatisation d'ADP.

Le budget 2019, c'est celui qui n'a pas renouvelé notre stock de masques et qui a réduit les moyens de Santé publique France. Depuis, les économies se sont poursuivies, au détriment de l'assurance maladie, à qui le financement de Santé publique France a été transféré en 2020. Face à la crise sanitaire, c'est cette dernière qui a dû lui accorder en urgence une dotation exceptionnelle de 4 milliards d'euros le 30 mars dernier.

Le budget 2019, c'est celui qui a sous-revalorisé de nombreuses prestations sociales ; c'est aussi celui qui a revalorisé la prime d'activité, sous la pression du mouvement des gilets jaunes. Cette revalorisation, nous l'avons approuvée. Mais l'État ne pourra pas se substituer éternellement aux entreprises pour revaloriser les petits salaires.

Le budget 2019, c'est enfin celui qui a transformé le CICE en baisse pérenne de cotisations sociales employeurs. Aujourd'hui, le coût annuel pour les finances publiques de l'ensemble des dispositifs d'allégements généraux de cotisations sociales approche de 60 milliards d'euros. Vous avez pourtant fait le choix de ne pas compenser auprès de la sécurité sociale les exonérations de cotisations : ce déficit organisé n'est pas soutenable, alors qu'il dépasse désormais 50 milliards d'euros et que vous vous apprêtez à voter de nouvelles exonérations.

Pour toutes ces raisons, le groupe Socialistes et apparentés votera contre le projet de loi de règlement pour 2019.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.