Intervention de Marie-Christine Verdier-Jouclas

Séance en hémicycle du mardi 15 septembre 2020 à 15h00
Inclusion dans l'emploi par l'activité économique — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarie-Christine Verdier-Jouclas, rapporteure de la commission des affaires sociales :

Après trois années de baisse ininterrompue et historique du taux de chômage, l'emploi en France a connu un choc sans précédent lors du confinement, avec 843 000 inscriptions supplémentaires à Pôle emploi en avril dernier, soit une hausse de 22,6 %. La situation s'est améliorée mais, avec plus de 4 millions de demandeurs d'emploi n'ayant exercé aucune activité au mois de juillet, le chômage reste à un niveau trop élevé, en particulier pour les plus jeunes, qui entrent actuellement sur le marché du travail.

Alors que la crise sanitaire n'est pas terminée et que notre économie a besoin d'être soutenue, il est plus nécessaire que jamais de disposer de la plus large palette d'outils au service de l'inclusion des personnes les plus éloignées de l'emploi, dans la lignée des réformes menées depuis le début de la législature – je pense notamment au plan d'investissement dans les compétences et à la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel.

Depuis 2017, la majorité est guidée par l'ambition de donner à chacun la possibilité de reprendre le chemin de l'emploi durable, quel que soit son âge, son niveau d'études, sa formation, son handicap, sa situation sociale ou son parcours professionnel. Je sais que cette ambition est partagée sur tous les bancs de notre hémicycle, par-delà les clivages politiques ; nos échanges en commission des affaires sociales, la semaine dernière, me l'ont encore montré. À ce titre, je tiens à saluer l'investissement de l'ensemble des groupes parlementaires sur la proposition de loi et la qualité de nos échanges : ils ont été approfondis et argumentés, nul ne pourra le contester.

L'épreuve que traverse notre pays nous incite, tous, à améliorer sans cesse les outils existants et à en forger de nouveaux. La proposition de loi dont j'ai l'honneur d'être rapporteure vise précisément à créer, renforcer et aménager différents outils des politiques de formation et d'accompagnement des personnes les plus éloignées de l'emploi.

En termes de méthode, nous avons privilégié la concertation avec l'ensemble des acteurs de l'insertion. Loin de faire table rase des dispositifs existants, préservons leurs qualités tout en cherchant à les optimiser, dans une démarche partenariale avec les différents acteurs de la politique de l'emploi.

Les articles 1er et 2 du titre Ier de la proposition de loi, qui déclinent des mesures phares du pacte d'ambition pour l'insertion par l'activité économique de septembre 2019, illustrent parfaitement le succès de cette méthode fondée sur la concertation : nos échanges apaisés et particulièrement constructifs, en commission, sur ces deux articles, en sont la meilleure démonstration.

L'article 1er, en particulier, répondait à une demande forte des acteurs de l'insertion : fluidifier l'entrée en parcours d'insertion en supprimant l'agrément obligatoire de Pôle emploi. Je crois que nos débats ont permis d'apaiser certaines inquiétudes des associations intermédiaires à ce sujet, et plusieurs amendements déposés par le Gouvernement devraient achever de rassurer ces acteurs incontournables du paysage de l'insertion par l'activité économique.

Pour sa part, l'article 2 concerne spécifiquement les seniors. Pour certains d'entre eux, l'issue attendue d'un parcours traditionnel d'insertion par l'activité économique – trouver un emploi durable – n'est pas toujours adaptée. Pour offrir à ces personnes marquées par les épreuves de la vie un cadre sécurisant jusqu'à l'âge de la retraite, l'article 2 autorise, pour les personnes âgées d'au moins 57 ans rencontrant de telles difficultés, la conclusion de contrats à durée indéterminée – CDI – avec une structure d'insertion. Et pour que personne ne soit laissé sur le bord du chemin, nous conservons l'actuelle dérogation permettant de renouveler un contrat à durée déterminé – CDD – d'insertion pour les salariés âgés de 50 à 57 ans.

Un dernier outil d'accompagnement des publics les plus éloignés de l'emploi est également envisagé dans le cadre de l'article 3 : le CDI renforcé. Comme je m'y étais engagée en commission, les échanges se sont poursuivis à ce sujet afin de garantir le caractère opérationnel du dispositif. Dans mon rapport comme en commission, j'ai retranscrit fidèlement et de manière transparente les différentes interrogations soulevées par l'article 3 lors des auditions que j'ai menées en tant que rapporteure. Tirant les conséquences de ces échanges, je soutiendrai la suppression de cet article, tout en réaffirmant mon attachement à la démarche expérimentale qui le sous-tendait.

Le titre II de la proposition de loi a pour objet d'étendre et d'optimiser l'expérimentation « territoire zéro chômeur de longue durée » instaurée par la loi du 29 février 2016 à l'initiative de Laurent Grandguillaume. Je rends un hommage mérité à son action et son engagement, et je lui adresse, depuis cet hémicycle où il a siégé avant moi, un salut reconnaissant. Je rends également hommage à Dominique Potier, qui était rapporteur pour avis et qui siège aujourd'hui encore sur ces bancs.

L'expérimentation vise à mettre un terme à la privation durable d'emploi dans des territoires volontaires, en s'appuyant sur des entreprises à but d'emploi – EBE – qui offrent au public éligible volontaire un emploi correspondant à ses compétences et savoir-faire, dans le cadre d'activités socialement utiles qui n'entrent pas en concurrence avec le tissu économique local.

Nous en avons toujours eu la conviction : aucun de nos concitoyens ne saurait être considéré comme inemployable. Chaque individu doit pouvoir trouver sa place, pour faire société ensemble. Pour autant, je ne vous étonnerai pas en disant que personne ne peut croire, pas plus ici qu'au-delà de ces bancs, qu'il est possible d'avoir un territoire sans chômeur. Non ! Le dire ne rendrait d'ailleurs pas la parole publique crédible. Mais nous pouvons avoir un territoire de plein-emploi volontaire, et c'est ce que démontre l'expérimentation « territoire zéro chômeur de longue durée ». Elle s'inscrit en complémentarité des autres dispositifs et vise le même objectif, que nous partageons tous : lutter contre le chômage et la privation d'emploi, même si le parcours n'est pas simple, loin de là.

Le texte déposé prévoyait une extension de l'expérimentation à quarante territoires, mais la lenteur de la montée en charge dans les dix premiers territoires rendait difficile un déploiement beaucoup plus large – du reste, je n'y étais pas favorable. Devions-nous pour autant nous interdire de déployer l'expérimentation dans un plus grand nombre de territoires ? Telle était la question. Forte de nos échanges en commission, et alors que ma propre capacité d'initiative était limitée par l'application de l'article 40 de la Constitution, j'ai saisi le Gouvernement de la question. Les amendements qu'il a déposés, comme ceux des groupes La République en marche et MODEM, et les miens, permettront de conjuguer l'ambition au réalisme en portant à soixante le nombre de territoires susceptibles d'être habilités : c'est six fois plus que dans le cadre de la loi de 2016 !

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