Intervention de Bertrand Pancher

Séance en hémicycle du mercredi 16 septembre 2020 à 15h00
Conseil économique social et environnemental — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBertrand Pancher :

Je commencerai par rendre hommage aux membres du Conseil économique, social et environnemental, en d'autres termes à la société civile organisée, une société civile souvent décriée, mais vers laquelle on se tourne systématiquement quand survient une crise. Je forme le voeu que l'on renforce considérablement l'écoute de cette société civile organisée, et ce texte nous fournit une excellente occasion d'en débattre.

On peut aujourd'hui faire un constat, celui d'une démocratie gravement malade, pour ne pas dire à l'agonie. Si nous ne la guérissons pas au moyen d'une véritable révolution démocratique, nous verrons demain les populistes – qui ont déjà gagné la bataille un peu partout dans le monde, y compris au sein de grandes démocraties alliées de longue date à la France, et qui sont en train de frapper à la porte de toutes les instances de pouvoir dans notre pays – finir par réussir à s'imposer.

Oui, monsieur le ministre délégué, monsieur le garde des sceaux, notre démocratie est malade, et j'étais de ceux qui pensaient que votre majorité et le Président de la République l'avaient compris et allaient faire en sorte de prendre les dispositions – d'indispensables réformes, mais aussi parfois de simples mesures de bon sens – permettant de combler la distance entre citoyens et élus, de réduire l'abstentionnisme, la désertion des formations politiques et des organisations syndicales de la part de citoyens toujours mieux formés et informés, mais aussi toujours plus méfiants à l'égard des décisions prises par l'autorité publique. J'avais cru que ce jeune président de la République, sans expérience politique, allait être plus à l'écoute. C'est donc avec stupeur que je l'ai vu prendre au début de son mandat des mesures à l'emporte-pièce, sans considération pour la société civile, qui vous l'a ensuite beaucoup reproché.

J'avais rêvé d'un Gouvernement composé de solides élus locaux et de responsables politiques ayant des comptes à rendre à leurs formations. Et nous avons eu de brillants techniciens.

J'avais rêvé d'un Parlement comparable à ceux des démocraties modernes qui nous entourent, disposant de plus de moyens, de pouvoirs de saisine des organismes d'expertise, travaillant sur des projets de loi accompagnés de véritables études d'impact et d'états des lieux de la concertation. Nous en sommes toujours au face-à-face stérile entre une majorité aux ordres et des oppositions qui s'opposent.

J'avais rêvé d'une véritable décentralisation comme celle que pratiquent nos voisins. Je me disais que vous aviez compris qu'il fallait partager le pouvoir. Nous en sommes loin.

J'avais rêvé d'un pouvoir davantage à l'écoute de nos concitoyens. Vous aviez bien commencé en multipliant états généraux et conférences. Mais s'il y avait du monde aux états généraux de l'alimentation, auxquels j'ai moi-même participé, c'était déjà moins le cas à la conférence nationale des territoires, et pratiquement plus personne ne venait aux consultations relatives à la réforme des retraites.

J'avais espéré que le CESE s'organise à la manière des grands organismes d'expertise indépendants des pays d'Europe du Nord et du Parlement européen, qu'il soit en mesure de dire son désaccord et de demander au Gouvernement de revoir sa copie.

Certes, le projet de loi comporte quelques avancées mais croyez-vous vraiment, monsieur le ministre, que si l'un de nos citoyens vous interpelle dans un café en vous disant : « L'abaissement à 80 kilomètres à l'heure, c'est une connerie », vous pourrez lui répondre « Ne vous inquiétez pas, nous allons saisir le Conseil économique, social et environnemental » ? Il vous rira au nez !

Nous appelons de nos voeux une réforme du CESE beaucoup plus ambitieuse. Le droit de pétition doit servir à quelque chose et aboutir à des propositions de loi. Il faut prendre en compte la voix de nos concitoyens et aller bien plus loin en articulant ces modifications à une réforme globale de notre système politique. Nous avons besoin d'une révolution démocratique, qui commence par une révolution girondine.

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