Intervention de Véronique Louwagie

Séance en hémicycle du mardi 14 novembre 2017 à 21h45
Projet de loi de finances rectificative pour 2017 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaVéronique Louwagie :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, nous nous retrouvons ce mardi soir pour la lecture définitive d'un projet de loi de finances rectificative que nous avons examiné hier en nouvelle lecture et il y a seulement huit jours en première lecture.

Je ne reviendrai pas sur les raisons de ce que M. le ministre de l'économie et des finances, Bruno Le Maire, a appelé « un scandale à 10 milliards d'euros ». Certes, nous pensions pouvoir trouver des réponses dans le rapport de Mme Marie-Christine Lepetit, inspectrice générale des finances, notamment sur la nature des responsabilités dans ce que M. Bruno Le Maire a qualifié d'« amateurisme fiscal ». Finalement, ce rapport ne fait que présenter de manière très factuelle les failles et la chronologie des événements.

Je veux néanmoins réagir à un point de ce rapport. Il est souligné à la quatrième page de la synthèse des conclusions de la mission d'enquête : « La construction trop rapide, dans l'entre-soi, instable de cette norme a conduit à un gâchis pour les entreprises et une impasse budgétaire massive [… ]. » Mais, mes chers collègues, ne sommes-nous pas ici en train de reproduire la même histoire ? En quelques jours, dans une grande précipitation, un projet de loi de finances rectificative met à contribution les grandes entreprises pour dégager 10 milliards d'euros de recettes et pour trouver dans l'urgence 5 milliards d'euros. S'agit-il donc d'urgence ou de vitesse éclair ?

Je dirai tout simplement « top chrono en dix jours » : en dix jours, trois séances ont eu lieu à l'Assemblée nationale pour traiter en un temps record un dispositif d'un montant de 10 milliards d'euros. Top chrono : deux jours francs pour amender le texte en première lecture. Top chrono : trente minutes pour amender le texte issu du Sénat, en nouvelle lecture. Top chrono : cinq minutes pour la commission mixte paritaire. Et le tout, mes chers collègues, pour « un scandale d'État » à 10 milliards d'euros.

En fait, ce projet de loi de finances rectificative pour 2017 pourrait porter le titre« 10 milliards top chrono ». Bien que la taxe de 3 % sur les dividendes soit montrée du doigt pour avoir été conçue trop rapidement, nous poursuivons à un rythme aussi rapide sinon plus pour légiférer sur ses conséquences.

J'évoquerai ensuite la procédure retenue, notamment le vecteur législatif du projet de loi de finances rectificative. Celui-ci, comme son nom l'indique, a vocation à rectifier la loi de finances en vigueur. Mais de rectification, dans ce projet de loi, on n'en trouve qu'une seule !

Rectifier suppose de prendre en compte tous les paramètres disponibles, notamment la révision des prévisions macro-économiques. Après avoir déclaré, le 2 novembre dernier, que les derniers chiffres de la croissance sont bons, M. Bruno Le Maire a ajouté par ailleurs que le taux de croissance cumulée atteint d'ores et déjà 1,7 %. Aussi une hypothèse de croissance à 1,8 % est-elle probable.

Pour autant, aucune actualisation n'a été effectuée. Elle aurait pourtant permis de comptabiliser 1,4 milliard d'euros supplémentaires, soit une part des 10 milliards à trouver. M. Le Maire a indiqué hier que le Gouvernement s'abstient de réviser les hypothèses de croissance, par prudence.

Mais qu'en est-il de la prudence ? Pourquoi ce sujet majeur n'a-t-il pas été traité à la hauteur des enjeux qu'il comporte lors de la discussion du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 ? Comment expliquer que le Gouvernement ait intégré ce risque à la mi-octobre et uniquement à hauteur de 5,7 milliards d'euros, dont 800 millions en 2018 ?

Prudent, le Gouvernement ne l'a pas été en élaborant le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, dès lors qu'il modifie l'appréciation de cette charge pour la faire passer de 5,7 milliards à 10 milliards d'euros à peine un mois après son examen ! En fin de compte, il ne s'agit en rien d'un PLFR mais d'un simple ajustement. Quant à la prudence, celle dont fait preuve le Gouvernement est à géométrie variable !

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