Malgré des signes encourageants cet été, la situation sanitaire s'est à nouveau dégradée, au point d'être alarmante dans certaines villes. Cette situation vous amène à prendre de nouvelles mesures, notamment la prorogation la loi du 9 juillet dernier jusqu'au 1er avril 2021, c'est-à-dire pendant six mois supplémentaires.
Pourtant, cette loi, censée organiser la sortie de l'état d'urgence sanitaire, avait déjà fait grincer des dents car, en réalité, elle n'avait de « sortie » que le nom. Tout était fait pour qu'à tout moment le Gouvernement puisse reprendre le contrôle sans avoir à passer devant nous, en oubliant à cette occasion le principe selon lequel il est responsable devant le Parlement.
Il s'agit, une nouvelle fois, de vous laisser les mains libres pour contrôler certaines de nos libertés les plus fondamentales : aller et venir, manifester, se rassembler, avoir une vie sociale et familiale épanouie, et j'en passe. Tout cela sans revenir devant nous.
Certes, le virus circule toujours. Personne ici ne le nie, ne peut le nier. Mais la situation, vous l'admettrez, est très différente de celle du printemps dernier. Pourtant, même alors, le Parlement avait montré sa capacité à se mobiliser. Pour mémoire, le confinement, la fermeture des restaurants, des écoles et des commerces avaient été décidées en mars dernier alors même que l'état d'urgence sanitaire n'avait pas été voté.
Aujourd'hui, la situation n'est pas à prendre à la légère mais je vous avoue mon inquiétude lorsque je vois la Défenseure des droits, Mme Claire Hédon, écrire au président de l'Assemblée nationale pour l'alerter sur les risques que comporte ce projet de loi. Selon elle, plusieurs de ses dispositions sont « susceptibles de porter, directement ou indirectement, une atteinte disproportionnée aux droits et libertés, notamment à la vie privée et au principe d'égalité. »
La Défenseure des droits prend soin de préciser que les restrictions de liberté doivent répondre à trois exigences fondamentales de l'État de droit : prévisibilité, nécessité et proportionnalité. Et d'ajouter immédiatement que les mesures prises jusqu'à présent l'ont été sans que les spécificités locales le justifient toujours.
Avec ce nouveau projet de loi, il existe un risque évident de pérennisation dans le droit commun de certaines mesures d'exception. C'est tellement vrai, monsieur le secrétaire d'État, que vous avez indiqué souhaiter présenter, en janvier prochain, un dispositif pérenne de gestion de l'urgence sanitaire, le but étant, selon vous, de ne plus avoir à nous retrouver ici, pour ces rendez-vous devenus récurrents de prorogation de mesures transitoires.
Mais sachez, monsieur le secrétaire d'État, que nous retrouver ici ne nous dérange nullement, et que nous le ferons autant que nécessaire. D'ailleurs, aujourd'hui, nous siégeons comme nous le faisons au quotidien. Nous sommes là, et serions tout à fait capables de légiférer en urgence si la situation venait à se détériorer un peu plus.