Intervention de Frédérique Dumas

Séance en hémicycle du mardi 6 octobre 2020 à 15h00
Encadrement de l'image des enfants sur les plateformes en ligne — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrédérique Dumas :

Dans ces conditions, il est impératif de protéger les libertés individuelles et la sécurité des mineurs, c'est pourquoi nous partageons les objectifs de cette proposition de loi visant à encadrer l'exploitation commerciale de l'image d'enfants de moins de seize ans sur les plateformes en ligne. C'est pour mettre un terme à l'absence de cadre juridique dans ce domaine que le groupe Libertés et territoires avait soutenu cette initiative parlementaire, tout en émettant certaines réserves et certains doutes sur son efficacité. Notre groupe salue l'inscription de ce texte en deuxième lecture à l'ordre du jour, dans la mesure où son adoption par voie d'amendement au projet de loi relatif à la communication audiovisuelle était compromise.

La proposition crée deux régimes juridiques distincts pour les enfants youtubeurs, l'un aligné sur le régime applicable aux enfants du spectacle et valant pour une pratique professionnelle, l'autre concernant une pratique semi-professionnelle. Cette distinction est particulièrement pertinente pour les vidéos qui, engendrant des revenus, portent sur une activité s'apparentant à du travail déguisé. En outre, depuis le texte initial, une plus grande attention a été portée à l'information – notamment à l'égard des parents – en matière d'obligations financières et de risques psychologiques.

Cette exigence impliquant de responsabiliser davantage les plateformes numériques, notre commission avait déjà réécrit l'article 4 en prévoyant l'adoption de chartes de bonnes pratiques. Si l'ambition de l'article s'en trouve amoindrie, sa nouvelle rédaction est bien plus opérationnelle. Les précisions apportées en première lecture à l'Assemblée et au Sénat sont utiles, notamment en ce qu'elles désignent le CSA comme l'autorité compétente pour promouvoir ces chartes de bonnes pratiques. Il convient surtout d'insister sur la nécessité de mieux informer et responsabiliser les enfants, qui sont les premiers concernés : de ce point de vue, les amendements adoptés au Sénat vont dans le bon sens.

Par ailleurs, le Gouvernement a remplacé la procédure de retrait des contenus sur injonction administrative, initialement prévue par l'article 2, par une procédure de saisine du juge des référés. Cette procédure, à laquelle notre groupe est attaché, permettra au juge de déterminer les mesures les plus adaptées à chaque situation, ce qui nous paraît un dispositif plus à même d'assurer la conciliation entre la préservation de la liberté d'expression et la protection des mineurs.

D'une manière générale, nous encourageons à aller vers toujours plus de protection des mineurs en ligne, qu'ils soient spectateurs ou créateurs de contenus. Les outils numériques évoluent très vite, et le nombre de menaces à l'encontre des enfants tout autant. À l'heure actuelle, de nombreux contenus mettant en scène des enfants ne font pas l'objet d'une autorisation des parents – c'est le cas des vidéos sur TikTok – et dans ce cas, il n'est pas possible de parler d'une exploitation des enfants. Cependant, ce phénomène méritera une attention particulière de notre part, afin de prendre en considération de façon globale la question de l'image des enfants sur internet.

Cette proposition de loi ne sera très certainement pas suffisante, mais elle constitue la première pierre d'un édifice qui nécessitera quelques ajustements. La nouvelle rédaction ménage un meilleur équilibre entre la protection des utilisateurs et la garantie de la liberté d'expression. Nous devons rester vigilants sur ces sujets délicats, et la décision du Conseil constitutionnel sur la proposition de loi Avia visant à lutter contre les contenus haineux sur internet, à laquelle notre groupe s'était opposé, en est une nouvelle preuve. Le travail qui a été réalisé, monsieur le rapporteur, est pertinent et utile, et le groupe Libertés et territoires votera en faveur de cette proposition de loi.

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