Intervention de Éric Coquerel

Séance en hémicycle du mercredi 15 novembre 2017 à 21h30
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 - projet de loi de finances pour 2018 — Engagements financiers de l'État

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Coquerel :

Il est en effet inadmissible que la France, comme l'Allemagne, ait tiré profit de la fuite des prêteurs vers les pays les plus riches de la zone euro, au moment de la crise grecque, diminuant ainsi les taux d'intérêt. Il est inadmissible que la Banque centrale européenne et les banques centrales des États de la zone euro, dont la Banque de France, aient accumulé 7,8 milliards de profits sur le dos de la Grèce, dans le cadre du programme SMP – programme pour les marchés de titres – , entre 2010 et 2012, comme l'a récemment reconnu, dans une lettre, Mario Draghi. Comme l'a dit précédemment notre collègue Valérie Rabault, depuis 2015, c'est-à-dire depuis le plan d'interruption de l'aide à la Grèce, la France a accumulé quelque 1,164 milliard d'euros sur le dos de la politique d'austérité en Grèce.

Monsieur le ministre, vous parlez de succès de la politique menée en Grèce. C'est une plaisanterie : la Grèce, aujourd'hui, est exsangue économiquement. Le seul succès que l'on ait obtenu concerne les remboursements aux créanciers. On a réussi à faire passer le taux d'endettement du pays de 113 % à 180 % du PIB en quelques années, alors que ce problème était censé être résolu. Parmi les 240 milliards d'euros qui lui ont été prêtés, sachez que seuls 10 % ont été investis dans l'économie réelle de la Grèce.

Nous considérons que le montant de la dette française n'est pas un problème. Il faut arrêter de comparer des stocks et des flux, comme vous le faites en permanence. Nous devons rapporter le montant de la dette à la durée de remboursement sur les marchés, qui dépasse légèrement sept ans actuellement ; cela ramène le taux d'endettement à 12 % du PIB, taux éloigné de ceux annoncés en permanence.

Arrêtez le déclinisme ! Vous nous dites de penser aux générations futures, mais le patrimoine global de la France – sa richesse nationale – n'a pas cessé de croître ces dernières années. Aujourd'hui, il atteint 13 585 milliards d'euros. C'est ça la richesse de la France ! Arrêtez de considérer et de laisser croire que ce pays est ruiné.

Quand il y a des partenariats entre le public et le privé, comme la ligne à grande vitesse entre Lyon et Turin – qui, j'espère, rendra définitivement l'âme – , les financiers et les assureurs demandent toujours la garantie des États, en l'occurrence les États français et italien, bien plus que celle d'institutions financières privées, parce que les États sont stables et sont beaucoup plus riches qu'on ne le dit.

Oui, la vraie question qui compte est : à quoi sert la dette ? Elle doit servir à investir et non à renflouer les banques, comme nous l'avons fait en 2010, en creusant la dette française de 474 milliards d'euros. Elle ne doit pas servir à rembourser les 5 milliards d'euros liés à l'annulation de la contribution de 3 % sur les dividendes, que vous avez cru bon d'imputer sur la dette, l'augmentant ainsi de 0,2 %. Elle doit permettre d'investir, ce qui nous amène à demander un audit.

Il faut arrêter la politique consistant à baisser les dépenses publiques au nom de la dette, alors que ces dépenses ont été le moteur de l'économie française entre 2012 et 2016 quand le marché privé était atone. Cette politique est stupide, car elle nous prive de l'un des moteurs de l'économie. Cette politique de l'offre étrangle la France et les pays européens depuis trop longtemps.

Enfin, vous proposez, là encore au nom de la dette, que l'État vende cette année ses participations dans des entreprises pour un montant de 1,1 milliard d'euros. Je ne reviendrai pas sur le problème que pose la vente de ces participations dans des secteurs d'intérêt stratégique. En revanche, je vous pose une question : comment justifier que la France vende des participations et en place le produit dans un fonds d'innovation où elle ne touchera que les intérêts, soit environ 200 à 300 millions d'euros, alors que la détention d'actions dans ces sociétés rapporte davantage ? C'est une très mauvaise politique, qui appauvrit l'État et affaiblit son influence dans les industries stratégiques, pourtant nécessaire.

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