Intervention de Jeanine Dubié

Séance en hémicycle du mardi 20 octobre 2020 à 21h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJeanine Dubié :

Nous devons enfin créer les conditions qui garantissent une réponse à la hauteur des besoins en matière de recrutement, de rémunération et de conditions de travail. Or il y a fort à craindre que ce PLFSS n'y parvienne pas. Certes les revalorisations de salaires issues du Ségur de la santé sont à saluer, mais les établissements de santé nous alertent sur leurs difficultés de trésorerie et leur manque de visibilité pour les réaliser.

Le complément de traitement indiciaire de 183 euros par mois, qui, en définitive, se traduira par une NBI – nouvelle bonification indiciaire – , est une bonne chose, mais ce n'est pas ce qu'attendent l'ensemble des personnels. Ils attendent une véritable revalorisation des grilles indiciaires de la fonction publique hospitalière et territoriale ; pour l'instant, nous n'y sommes pas. Les mesures annoncées ne sont qu'une première étape de rattrapage. Nous restons loin de la moyenne des pays de l'OCDE – l'Organisation de coopération et de développement économiques. Surtout, beaucoup de personnels ont été oubliés, en particulier dans les secteurs du médico-social et du handicap. Il convient d'y remédier rapidement car cela crée des distorsions, entraînant des demandes de mutation de service dans un contexte déjà très tendu.

Enfin, nous craignons que l'objectif de recrutement de 15 000 personnels ne soit pas atteint. Les établissements demeurent dans l'attente de directives claires en la matière et connaissent déjà des difficultés de recrutement car ces métiers sont en forte tension.

Au-delà de l'hôpital, la crise sanitaire a renforcé les dysfonctionnements de notre système d'accompagnement des personnes âgées en situation de handicap, que sont le manque d'effectifs en EHPAD, la non-reconnaissance des aides à domicile, le besoin de repli des aidants familiaux ou encore la coordination difficile entre les champs sanitaire et médico-social.

Il est évident que l'insuffisance des moyens alloués au secteur médico-social a eu une incidence sur le drame qui s'est déroulé dans nos EHPAD. Alors que le projet de loi relatif au grand âge et à l'autonomie est sans cesse repoussé depuis le début du quinquennat, la crise sanitaire nous prouve qu'il y a urgence à légiférer sur ce sujet. Une fois encore, la priorité doit être donnée aux métiers. Les établissements médico-sociaux et les EHPAD ne parviennent plus à recruter et déplorent le départ de leurs personnels.

Des financements nouveaux à destination du secteur médico-social sont certes prévus dans le texte, en particulier pour les compléments de revalorisation salariale et les investissements. Il s'agit d'un premier effort, mais il nous faut l'amplifier et le poursuivre. La création d'une cinquième branche relative au soutien et à l'autonomie sera vaine si elle ne s'accompagne pas d'une politique globale et ambitieuse. Il ne s'agit pas seulement d'apporter de l'aide physique à des personnes en situation de dépendance qui ne peuvent réaliser seules les actes de la vie quotidienne. La réflexion doit être plus large car il s'agit en réalité de créer les conditions garantissant à chacun de pouvoir décider pour lui-même, quel que soit son âge, son lieu de résidence ou son état de santé ; voilà ce qu'est l'autonomie.

Or, en l'état actuel du texte, nous ne créons pas de droit universel à l'autonomie. Nous reprenons telles quelles les missions actuellement dévolues à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, avec un léger changement de périmètre du fait de l'intégration de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé. Je le répète, il manque une réelle réflexion sur ce que l'autonomie signifie et implique.

La création d'une branche consacrée à l'autonomie doit notamment nous amener à sortir du fonctionnement prévalant depuis les années 1990, qui a abouti à deux types d'allocation : la prestation de compensation du handicap d'une part, destinée aux personnes en situation en handicap, et l'allocation personnalisée d'autonomie d'autre part, destinée aux personnes âgées. Cette barrière d'âge, nous devons la faire sauter !

Enfin, il faut doter cette branche de financements nouveaux, ce que le texte ne fait pas. L'affectation, décidée en août dernier, d'une fraction de la CSG à hauteur de 0,15 point à partir de 2024 ne suffira pas, alors que les personnes âgées en situation de dépendance vont, à elles seules, voir leur nombre augmenter de 20 000 personnes par an, avec une accélération à partir de 2030.

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