Intervention de Arnaud Viala

Séance en hémicycle du mardi 27 octobre 2020 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2021 — Administration générale et territoriale de l'État ; sécurités ; contrôle de la circulation et du stationnement routiers

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaArnaud Viala, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

Le budget de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises, d'un montant de 520 millions d'euros, est stable cette année. Vous avez précisé, monsieur le ministre, lors de votre audition par la commission des lois, que cette direction bénéficiera également de près de 40 millions d'euros dans le cadre de la mission « Plan de relance ».

Je souhaite par ailleurs souligner que le programme 161 « Sécurité civile » ne représente qu'une faible part des 6,5 milliards d'euros consacrés chaque année à la sécurité civile en France. L'État contribue au tiers de ce montant, notamment en transférant aux départements une fraction de la TSCA – taxe spéciale sur les conventions d'assurance – , pour le financement des SDIS.

L'an dernier, pour l'élaboration du rapport pour avis sur cette mission, je m'étais penché sur les évolutions structurelles souhaitables, notamment en matière de gestion de l'urgence et de l'intervention des services de sécurité civile. Cette année, compte tenu de la situation, j'ai choisi de consacrer le rapport aux conséquences de la covid-19 sur la gestion de ces services, et surtout la réalisation de leurs missions.

Les sapeurs-pompiers et les associations agréées ont joué un rôle indispensable dans la gestion de la crise de la covid-19. Les pompiers sont des acteurs incontournables de notre système de santé ; 84 % de leur activité est consacrée aux secours d'urgence aux personnes. Ils ont effectué plus de 122 000 interventions liées à l'épidémie entre mars et mai 2020. Les associations agréées de sécurité civile, comme la Fédération nationale de la protection civile ou la Croix-Rouge française ont effectué près de 3 millions d'heures de bénévolat, et 18 000 interventions en véhicule de secours, liés à la covid-19 sur la même période.

Toutefois, dans de nombreux départements, pompiers et associations agréées ont été peu sollicités au début de la crise, car sa gestion était assurée par un seul ministère, celui de la santé. Leur sentiment de frustration et de sous-emploi a été d'autant plus fort qu'ils avaient les moyens d'agir.

À l'inverse, dans les départements les plus touchés par la crise, on s'est souvenu de leur utilité quand les services de santé étaient saturés. Ce défaut d'organisation trouve sa source dans la gestion bicéphale de la crise au niveau national par les ministères de la santé et de l'intérieur, qui a eu des conséquences préoccupantes sur la communication entre les ARS et les préfets, au niveau local. Les pompiers et les associations agréées ont été obligés de contourner une collaboration interministérielle défaillante aux niveaux local et national, pour mener à bien des interventions indispensables à la population.

Face à cette gestion de crise, les sapeurs-pompiers et les associations agréées demandent tout d'abord une meilleure reconnaissance. Il conviendrait de mieux reconnaître les compétences des pompiers en matière d'aide médicale d'urgence, en renforçant le rôle de leurs services de santé et de secours médical, en élargissant le champ des gestes techniques qu'ils peuvent pratiquer, et en révisant le référentiel commun d'organisation du secours d'urgence aux personnes et de l'aide médicale urgente – SUAP-AMU – de 2008, qui est obsolète.

Il paraît également nécessaire de mieux définir les modalités d'engagement opérationnel et de financement des associations agréées. À court terme, celles-ci ont surtout besoin d'une subvention d'urgence de l'État – je rejoins l'inquiétude de notre collègue à ce sujet – , car elles sont souvent gravement menacées par la crise. Soutiendrez-vous, monsieur le ministre, l'amendement de crédit que j'ai déposé dans cette optique ?

En second lieu, les sapeurs-pompiers et les associations agréées demandent une meilleure coordination. Les pompiers souhaitent que le pilotage opérationnel des crises survenant sur le territoire national revienne au ministère de l'intérieur et au préfet, au niveau local, mais aussi que la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises exerce une fonction de coordination opérationnelle des SDIS, qui fait défaut depuis le début de la crise.

En outre, les associations agréées demandent l'établissement d'un lien plus solide et permanent avec les ministères de l'intérieur et de la santé et leurs réseaux territoriaux.

J'évoquerai trois autres défauts de coordination entre les ministères de l'intérieur et de la santé, qui sont devenus critiques dans le cadre de la crise de la covid-19. Il conviendrait tout d'abord qu'un arbitrage interministériel tranche la question du numéro unique d'appel d'urgence et des plateformes communes de réception des appels d'urgence. Le problème de saturation du 15, constaté au début de la crise, et pourrait malheureusement réapparaître, ne se serait pas produit si des plateformes départementales réunissant le 15, le 17, le 18 et le 112 avaient été créées.

De plus, les projets d'instauration d'un service d'accès aux soins au ministère de la santé sèment le trouble. Un numéro unique d'appel d'urgence sera-t-il créé, comme le Président de la République s'y est engagé ? Ou bien ce numéro unique ne concernera-t-il que les questions de santé ?

Il paraît également nécessaire que le Gouvernement procède à des arbitrages concernant les carences ambulancières, qui sont nombreuses. La définition des cas de carence diffère entre les SDIS et les SAMU depuis des années et le montant de leur indemnisation fait l'objet d'un désaccord entre les ministères de l'intérieur et de la santé, et l'Assemblée des départements de France – ADF.

Enfin, il conviendrait de créer un organisme interministériel chargé de coordonner l'utilisation des hélicoptères de service public car la collaboration insuffisante entre les hélicoptères du SAMU et ceux de la sécurité civile a constitué une source de difficultés pour l'évacuation et le transport interhospitalier des patients pendant la crise.

Nonobstant ces questions qui, je l'espère, trouveront une réponse ce soir, je vous indique, monsieur le ministre, que le groupe Les Républicains votera les crédits de la mission « Sécurités ».

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