Intervention de François Ruffin

Séance en hémicycle du lundi 26 octobre 2020 à 21h00
Projet de loi de finances pour 2021 — Mission plan de relance (état b)

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Ruffin :

Vendredi dernier, à Albert, dans la Somme, une chaîne de production a été démontée, sans que les salariés en soient informés, dans l'usine Simra, sous-traitant d'Aerolia, filiale d'Airbus. Une question se pose : que deviendront les monteurs, chaudronniers, dessinateurs-projeteurs, électroniciens, ingénieurs structure ou mécaniciens qui travaillent pour les sous-traitants d'Aerolia ? Un bilan de compétences sera-t-il réalisé ? À quoi pourraient servir ces machines, ces usines et ces savoir-faire ? L'État devrait s'investir pour en mesurer la valeur et s'interroger sur leur utilisation future.

Dans les années soixante-dix, l'Angleterre avait connu un cas similaire avec la firme aéronautique Lucas, qui connaissait des difficultés. Contre les licenciements prévus, les syndicats avaient effectué un relevé de toutes les compétences présentes sur le site puis avaient contacté l'université voisine, dont les étudiants et les enseignants s'étaient mobilisés, pour accoucher d'un énorme rapport, d'après lequel les savoir-faire des salariés leur permettraient de se reconvertir dans la production d'éoliennes, de pompes à chaleur ou de matériel rail-route.

Désormais, il reviendrait à l'État, et non aux syndicats, d'effectuer un tel relevé de compétences et de proposer des reconversions industrielles. Ainsi, si la Somme est le département français qui compte le plus d'éoliennes, combien y sont produites ? Aucune ! J'ai interrogé sur ce point, en craignant que cela soit quelque peu illusoire, maître Ducrocq, l'avocat de la CFDT pour le sous-traitant aéronautique 3A. Il m'a expliqué qu'une démarche de ce type serait tout à fait cohérente et envisageable : cet outil s'appelle un CV de site – il est d'ailleurs utilisé chez Bridgestone.

Au lieu de cela, on laisse ces compétences s'évaporer dans la nature. Les techniciens et les professionnels iront ainsi galérer dans des sociétés d'intérim, livrer des pizzas ou ouvrir des bistrots. Souhaitons-leur bonne chance, mais ayons bien conscience du fait que leurs savoir-faire précieux seront perdus pour la cause industrielle, et surtout pour la cause écologique.

C'est pourquoi nous demandons que des relevés de compétences et des CV de site soient systématiquement réalisés.

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