Intervention de Frédéric Petit

Séance en hémicycle du jeudi 29 octobre 2020 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2021 — Action extérieure de l'État

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrédéric Petit, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères :

Pour la troisième année consécutive, les crédits de la diplomatie culturelle et d'influence progressent. Cette augmentation est d'autant plus remarquable que l'on peut s'apercevoir, en l'analysant en détail, qu'elle porte beaucoup plus sur les crédits d'intervention et sur les opérateurs de terrain que sur l'administration centrale.

Même si cela ne concerne pas le PLF pour 2021, je salue une nouvelle fois, monsieur le ministre, le plan de soutien à ces réseaux élaboré dans le cadre de la crise du covid-19 ainsi que le travail que nous avons mené avec vos services en commission. Nous en surveillons à présent l'application jusqu'au dernier kilomètre.

Comme l'ont rappelé les précédents orateurs, ce PLF marque enfin la fin du cycle du rabot et la reconnaissance que ce petit budget de l'État ne peut plus être diminué dans la même proportion que les autres sans que son essence même soit atteinte.

Monsieur le ministre, nous avons le sentiment, au sein de la commission des affaires étrangères, de vous avoir toujours soutenu sur ce sujet et nous saluons – sur tous les bancs, me semble-t-il – votre engagement personnel dans cette embellie, aussi visible dans la diplomatie culturelle et d'influence que dans les autres programmes de l'action extérieure de l'État.

Nous avons donc avancé depuis trois ans, et ce malgré les crises, les incompréhensions et la fureur du monde. Oui, monsieur le ministre, la nécessité du pilotage de ces outils, dont je déplorais l'absence il y a trois ans, est manifestement prise en considération à présent par vos services. Oui, j'ai vu, à Jérusalem il y a deux ans, en Irak et au Kurdistan l'an passé et en Égypte cette année, une diplomatie culturelle cohérente, pilotée par les agents en poste et par les COCAC, les conseillers de coopération et d'action culturelle, dans l'esprit du discours du Président de la République aux ambassadeurs en août 2019. Vous devez être des généralistes, des chefs d'orchestre. Servez-vous de tous nos spécialistes en fonction de stratégies adaptées aux différents pays.

Les plans dédiés à l'école ou à la francophonie fleurissent. Ils sont discutés dans chaque pays avec les différentes parties intéressées, les élus des Français de l'étranger et les non-Français. Il faudra encore du temps avant que cela devienne la règle partout, je le sais, mais cela va dans le sens d'une vraie diplomatie globale du XXIe siècle. D'ailleurs, pourquoi continuer à faire la différence entre diplomatie d'influence et diplomatie traditionnelle, alors qu'elles interagissent en permanence ?

Mais ces avancées doivent également atteindre aujourd'hui nos opérateurs. Certains ont réussi leur mue, à l'image d'Expertise France, que je cite souvent, et qui, en six ans, a regroupé toutes les compétences auparavant disséminées non seulement aux quatre coins du budget de l'État mais aussi dans les collectivités territoriales et les associations, jusqu'à devenir un vrai outil de présence de la France dans le monde grâce à son expertise.

D'autres doivent faire cette mue : le réseau culturel – nous en avons souvent parlé – ainsi que le réseau d'enseignement français à l'étranger, sur lequel je voudrais m'attarder quelques instants. Le premier travail de l'AEFE, lancée en 1990, consistait bien à harmoniser des situations totalement hétéroclites. En vingt ans, elle a relevé ce défi que représente la création d'un réseau, grâce à la subvention pour charge de service public, en harmonisant les différents statuts, en regroupant les établissements homologués au sein d'un ensemble où le partenariat et les échanges fonctionnent.

Elle connaît cependant aujourd'hui un déséquilibre structurel entre le petit nombre d'établissements qu'elle gère directement et l'immense majorité des établissements indépendants. De surcroît, c'est elle qui est chargée aujourd'hui de mettre en oeuvre l'objectif du Président de la République de doubler les élèves accueillis dans le réseau en 2030. De facto, elle exerce donc aujourd'hui trois métiers très distincts, très clairs, mais qui ne structurent plus son action.

Le premier consiste à développer les effectifs, le deuxième à garantir l'excellence de l'enseignement dispensé dans les 522 établissements – j'ai bien dit 522 – en particulier en mettant à leur disposition des cadres et des enseignants titulaires de l'éducation nationale. Ces derniers sont extrêmement minoritaires dans le réseau puisqu'on en compte entre 5 000 et 6 000 pour un total d'environ 35 000, mais ils en sont le levain et ce sont eux qui représentent l'outil central de transmission des valeurs de notre modèle non seulement aux élèves mais aussi à toutes les communautés éducatives et aux parents d'élèves du réseau. Son troisième métier consiste, pour des raisons historiques ou diplomatiques, à gérer directement un petit nombre de ces établissements. C'est autour de ces trois métiers que l'AEFE doit aujourd'hui se réorganiser.

J'ai placé en annexe de mon rapport un document exposant mon point de vue sur l'avenir de l'Agence et sur sa réorganisation, qui a été engagée avant même la crise actuelle, grâce au rapport de ma collègue Samantha Cazebonne. Il faut absolument poursuivre cette réforme, la crise sanitaire représentant plutôt une raison supplémentaire de la mener à bien qu'une fausse excuse pour l'abandonner. L'AEFE doit poursuivre sa mue et confier ses trois métiers à trois piliers de son organigramme.

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