Intervention de Bertrand Pancher

Séance en hémicycle du jeudi 29 octobre 2020 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2021 — Aide publique au développement

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBertrand Pancher :

Or le rôle prépondérant de l'OCDE en la matière est remis en question, notamment par le porte-parole d'Oxfam, qui appelle à « décoloniser l'aide ». Il rappelle que les règles relatives à l'aide publique au développement sont discutées, négociées et mises en oeuvre par les pays riches. Il estime que ce processus aurait davantage de légitimité s'il se déroulait dans un système tel que celui des Nations unies, car les pays récipiendaires de l'aide et les sociétés civiles du Sud pourraient alors s'exprimer. Selon nous, cette proposition mérite réflexion, sachant qu'en 2016, les donateurs de l'OCDE ont destiné en moyenne 51 % de leurs fonds à des entreprises originaires de leur propre pays.

Si les crédits de la mission « Aide publique au développement » augmentent de manière globale, nous estimons que l'accompagnement des initiatives de coopération décentralisée ne reçoit pas un soutien financier suffisant. Les crédits correspondants sont stabilisés à hauteur de 11,5 millions d'euros, alors que le pilotage de terrain entre acteurs locaux permet parfois d'obtenir des résultats plus pérennes, grâce à la confiance nouée par des contacts humains rapprochés entre donateurs et récipiendaires.

L'aide publique au développement est devenue encore plus cruciale à un moment où les pays les plus pauvres sont étranglés par la dette et succombent dans la crise. Selon le Fonds monétaire international, l'Afrique subsaharienne, mise à l'épreuve par la pandémie, aura besoin d'ici à 2023 de 750 milliards d'euros de financements extérieurs, soit 55 % du PIB de la région. Tout en saluant l'instauration par le G20, en avril de cette année, d'un moratoire sur la dette et la décision récente de le prolonger jusqu'en juin 2021, le FMI estime que des actions plus audacieuses sont nécessaires, telles que la réduction des intérêts de la dette ou le rééchelonnement de toutes les échéances.

En ce sens, nous regrettons de ne pas avoir pu, lors de l'examen de la première partie du projet de loi de finances, augmenter les recettes de la taxe sur les transactions financières, ni étendre son assiette aux échanges intrajounaliers. Il s'agissait du dernier projet de loi de finances du mandat présidentiel portant sur un exercice complet ; c'était une occasion unique, monsieur le ministre, d'ajuster les priorités de l'aide française, tout en augmentant les recettes qui alimentent le budget général de l'État.

En définitive, nous constatons que l'aide publique au développement poursuit des objectifs nombreux, mal hiérarchisés et parfois contradictoires. Le manque de concentration sur les pays les plus fragiles et l'importance des financements en faveur des pays émergents brouillent le message, qui n'est pas compris de nos concitoyens. En outre, le pilotage politique de l'aide publique au développement est éclaté : la présente mission budgétaire ne rend pas compte de l'ensemble de nos engagements, ce qui en affaiblit la lisibilité.

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