Intervention de Béatrice Descamps

Séance en hémicycle du vendredi 6 novembre 2020 à 9h00
Projet de loi de finances pour 2021 — Culture

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBéatrice Descamps :

André Malraux avait raison d'affirmer que la culture était ce qui avait fait de l'homme « autre chose qu'un accident de l'univers ». Cette idée résonne encore aujourd'hui dans la politique culturelle française, qui voit notre pays investir généralement davantage dans ce domaine que nos voisins européens.

La mission « Culture » traduit encore cette année son importance, avec des crédits en nette augmentation. Nous nous réjouissons que ce budget concerne tous les champs du secteur et qu'il soit ajusté à la situation actuelle. On ne saurait sous-estimer le rôle qu'occupe la culture dans notre société, partout sur le territoire, et je voudrais ici saluer et assurer de tout notre soutien tous les artistes et acteurs culturels de l'événementiel qui nous permettent de nous enrichir, de nous épanouir, et qui souffrent tellement en ces temps de crise sanitaire.

Je souhaite m'arrêter un instant sur la cohésion sociale et territoriale encouragée par le pass culture, politique principale du programme présidentiel en matière culturelle. S'il se taille la part du lion dans les crédits de la culture – 59 millions d'euros lui sont dédiés – , la toute prochaine finalisation du pass verrait son enveloppe diminuer. Malheureusement, les perspectives sanitaires devraient laisser peu de place au spectacle vivant et aux concerts au sein de ce financement.

Madame la ministre, comment rendre vertueux l'écosystème du pass culture, afin qu'il ne profite pas uniquement aux industries culturelles numériques ou à l'achat de livres scolaires en cette période de crise sanitaire, et qu'il permette un échange entre les artistes et les jeunes d'un même territoire ?

Avant même le pass culture, c'est le contact entre les écoles et le milieu culturel qui m'inquiète. Selon les estimations, la fréquentation des lieux de culture par les écoles devrait continuer à diminuer en 2021, après avoir logiquement connu une forte baisse en 2020. Nous comprenons, en ce moment plus que jamais, que les questions sanitaires peuvent poser problème. Cependant, l'école est parfois le seul lieu d'accès à la culture pour certains élèves, et nous ne souhaitons pas qu'ils se retrouvent pénalisés par la crise. Le groupe UDI et indépendants proposera ainsi que des fonds soient débloqués pour aider nos élèves à ne pas perdre contact avec les lieux et les acteurs de la culture.

Je crois fermement que la culture est plus qu'un secteur d'activité. Elle est une « nécessité vitale », pour reprendre les termes très justes employés par Éric de Chassey. Dès que l'on ferme un lieu culturel, écrit-il, « le préjudice n'est pas seulement économique [… ], il est aussi intellectuel, émotionnel et spirituel » pour l'ensemble des Français.

La situation exceptionnelle que nous connaissons cette année est probablement amenée à se poursuivre en 2021, ce qui nous amène, madame la ministre, à nous interroger sur les concertations que nous devons mener avec les artistes et le public. Qu'adviendra-t-il de nos festivals de théâtre, de musique, de cinéma ? Dans tous les territoires, de nombreux acteurs de notre tissu culturel s'inquiètent des pertes de leur billetterie, lesquelles vont parfois jusqu'à menacer leur survie et, par effet boule de neige, celle de nombreux artistes et associations.

L'exception culturelle et la richesse de l'Hexagone se traduisent aussi par plus de 45 000 édifices, qui réjouissent habituellement 12 millions de visiteurs lors des Journées du patrimoine, par exemple. Monuments classés ou inscrits, ces lieux de mémoire ont dû fermer à nouveau leurs portes depuis le reconfinement et n'ont que peu de perspectives pour le début d'année 2021. De nombreux monuments historiques seront ainsi privés de leur revenu, uniquement généré par l'accueil du public.

En vertu d'un arrêté de Bercy, certains de ces monuments, en difficulté du fait de la pandémie, pourront bénéficier d'un prêt garanti par l'État. La somme de 42,8 millions d'euros supplémentaires débloquée pour le patrimoine va également dans le bon sens. Toutefois, je m'inquiète de la manière dont les travaux d'entretien, de protection et de rénovation pourront être financés. Seront-ils encore réalisables à la sortie de la crise, au vu des sommes conséquentes dépensées pour soutenir l'économie française ?

Vous le savez, madame la ministre, j'accorde aussi une attention particulière aux arts plastiques, notamment aux écoles consacrées à cette pratique dans nos territoires. Je présenterai de nouveau des amendements vous proposant de soutenir l'enseignement supérieur et la recherche dans ce domaine, afin de pérenniser leurs fonds, leurs savoir-faire et leurs diplômes.

Enfin, je voudrais évoquer le sort de nos 670 000 intermittents. Votre gouvernement a annoncé une année blanche pour eux ; ils peuvent compter sur les indemnités proposées jusqu'en août 2021. Mais, encore une fois, des inquiétudes se font sentir pour l'après, du fait de l'absence de visibilité et la perspective d'agendas vides.

J'ai peu évoqué le plan de relance, mais son rôle sera bien entendu primordial, essentiel. Notre culture est en crise et souffre des doutes créés par la situation sanitaire. Tout en défendant quelques principes importants à nos yeux, le groupe UDI et indépendants votera en faveur de cet important budget de soutien.

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