Intervention de Roselyne Bachelot

Séance en hémicycle du vendredi 6 novembre 2020 à 9h00
Projet de loi de finances pour 2021 — Culture

Roselyne Bachelot, ministre de la culture :

L'examen du budget pour 2021 se déroule, vous l'avez tous souligné, dans un contexte particulier pour le monde de la culture, très durement frappé par les mesures liées à la crise sanitaire – Mme Dominique David l'a parfaitement rappelé. L'augmentation exceptionnelle de 4,8 % du budget du ministère de la culture en 2021 manifeste la volonté du Gouvernement de conforter son rôle essentiel dans la vie démocratique, sociale et économique de notre pays. Cet effort budgétaire remarquable s'inscrit dans le prolongement de la mobilisation totale dont l'État a fait preuve dès le début de la crise sanitaire pour soutenir les acteurs culturels – je remercie Gilles Carrez de l'avoir souligné.

Ainsi, comme Benoît Potterie l'a rappelé, le monde de la culture dans son ensemble a déjà bénéficié de plus de 5 milliards d'euros de mesures d'urgence, et tout spécialement de 940 millions d'euros pour l'année blanche de l'intermittence. Certains d'entre vous – je songe à Michèle Victory ou à Béatrice Descamps – ont évoqué la nécessité de poursuivre cet effort. Je vous confirme qu'il sera bien entendu maintenu si la nécessité s'en fait sentir.

Pour permettre au secteur de se projeter dans l'avenir, j'ai obtenu que le volet culturel du plan France relance mobilise une enveloppe exceptionnelle de 2 milliards d'euros. Depuis la rentrée, 220 millions d'euros ont été mobilisés pour soutenir les salles de cinéma et de spectacle, qui furent confrontées à une baisse importante de leur activité en raison des mesures de distanciation physique puis de couvre-feu. Alors que débute une nouvelle période de confinement, je travaille à l'adaptation des dispositifs à la réalité des besoins des acteurs culturels.

C'est dans ce contexte inédit qu'a été élaboré le budget de la mission « Culture » soumis à votre examen. En 2021, il connaîtra une hausse exceptionnelle de 4,6 % – 141 millions d'euros supplémentaires – , pour atteindre un montant total de plus de 3,2 milliards d'euros. Le budget de cette mission sera complété par 733 millions d'euros issus du plan France relance, qui seront déployés à périmètre équivalant pour cette première année d'exécution. Au total, ce sont donc près de 4 milliards d'euros qui seront consacrés l'an prochain au patrimoine, à la création, à la transmission et à la démocratisation culturelle. Ces moyens d'une ampleur historique – vous l'avez souligné presque unanimement – nous permettront d'engager une action ambitieuse de refondation de notre modèle culturel.

Au-delà de la situation d'urgence à laquelle nous faisons face, il est primordial que nos politiques culturelles apportent une réponse aux défis majeurs qui s'imposent désormais à nous. Comme l'a montré l'enquête sur les pratiques culturelles des Français, dont je me suis emparée dès mon arrivée rue de Valois, il est indispensable d'engager une action résolue afin de réconcilier la culture patrimoniale et la culture numérique, qui sont trop souvent cloisonnées dans les usages de nos concitoyens. Les moyens inscrits dans chacun des programmes de cette mission budgétaire nous permettront d'oeuvrer en ce sens.

Le patrimoine bénéficiera effectivement, monsieur Gérard, d'un budget exceptionnel de 1,015 milliard d'euros – en hausse de 4,4 %, soit 43 millions d'euros, par rapport à 2020 – , auxquels s'ajouteront, en 2021, 345 millions d'euros issus du plan de relance. Ces investissements contribueront au développement de l'économie et renforceront l'attractivité et la cohésion des territoires. Vous avez raison de souligner que la protection du patrimoine, sa rénovation et sa mise en sauvegarde dépendent non seulement de l'État, mais aussi des collectivités territoriales – vous avez salué l'action de la Charente-Maritime, mais nous travaillons évidemment avec de nombreux départements. Ces crédits financeront notamment un plan de rénovation des musées territoriaux, doté de 52 millions d'euros sur deux ans – dont 6 millions d'euros venant du plan de relance – et des mesures de soutien aux archives et à l'archéologie, destinées aux équipements patrimoniaux dans les territoires.

Nous déploierons également, dès l'an prochain, un vaste plan dédié aux cathédrales – il était temps ! La hausse des crédits budgétaires pérennes alloués à ces édifices, à laquelle Gilles Carrez faisait référence, permettra de porter le financement structurel annuel à 50 millions d'euros par an, auxquels s'ajouteront 40 millions d'euros annuels issus du plan de relance – soit un total de 180 millions d'euros sur deux ans. Ces moyens permettront de réaliser les travaux nécessaires de mise en sécurité et en sûreté des édifices, mais aussi d'accélérer les projets de restauration. Si le sujet de la cathédrale Notre-Dame de Paris ne s'inscrit pas dans cette discussion budgétaire, j'aurai l'occasion, monsieur Carrez, de donner toutes les explications utiles le concernant.

Nous poursuivrons par ailleurs notre programme d'investissement en faveur des grandes institutions nationales, dans le domaine du patrimoine comme de la création, tandis que le plan de relance apportera aux opérateurs nationaux un soutien à la fois conséquent et indispensable. Les crédits prévus dans le PLF pour 2021 permettront de poursuivre les grands projets déjà engagés. Valérie Bazin-Malgras a appelé mon attention sur le cas du Grand Palais, dont j'ai effectivement choisi de réorienter le programme de restauration afin de mieux garantir la maîtrise des coûts comme des délais, mais les projets en cours concernent également le relogement à Pantin du Centre national des arts plastiques, auquel Sophie Mette est attachée, ou l'équipement des deux scènes de l'Opéra de Paris. En contrepartie de ce soutien, j'attends effectivement de ces institutions, madame Le Grip, qu'elles incarnent encore davantage la responsabilité nationale qui est la leur, en se rapprochant de nos concitoyens et en se développant dans tous les territoires.

Le programme « Création » connaîtra lui aussi une forte augmentation en 2021 : celle-ci atteindra 4,5 %, soit 37 millions d'euros de mesures budgétaires nouvelles, auxquels s'ajouteront 320 millions d'euros issus du plan de relance. L'une des priorités consiste à mieux accompagner les établissements de création en région : 15 millions d'euros seront ainsi consacrés à la restauration et à la consolidation des marges artistiques des labels et au soutien aux compagnies artistiques, tandis que 3 millions d'euros iront aux arts visuels.

Les moyens du Centre national de la musique vont être renforcés : 7,5 millions d'euros supplémentaires permettront d'assurer le respect de la trajectoire triennale fixée l'an dernier pour accompagner la montée en puissance du CNM, sans oublier qu'il pilotera une dotation exceptionnelle de 200 millions d'euros au service de l'ensemble de la filière musicale, allouée dans le cadre du plan de relance.

Les salles de spectacle bénéficieront également de dispositifs fiscaux inscrit dans le PLF, à savoir la prorogation du crédit d'impôt pour les spectacles vivants, dont les critères sont assouplis, mais également la création d'un crédit d'impôt théâtre qui permettra de renforcer le dispositif que votre assemblée avait adopté dans le cadre du PLFR 3.

En complémentarité avec le plan de relance, le PLF pour 2021 accentue notre soutien à l'emploi culturel à travers le renforcement du FONPEPS – plus 1 million d'euros – et une mobilisation de 2 millions d'euros afin de mettre en oeuvre les premières mesures à destination des artistes-auteurs – j'ai bien entendu les propositions de Michel Larive pour ce secteur divisé, hélas, par des conflits importants.

La mission « Culture » contient également le nouveau programme 361 « Transmission des savoirs et démocratisation de la culture », qui représente 46 millions d'euros de crédits supplémentaires, soit une forte hausse de 8,5 %. Dominique David, vous avez salué la délégation générale que j'ai souhaité créer, sur ce thème, au sein du ministère. Elle assurera en effet un pilotage transversale de l'action du ministère pour l'accès à la culture dans les territoires en matière d'éducation ou de formation culturelle et artistique, en lien avec les autres ministères concernés, en particulier celui chargé de la cohésion des territoires et les ministères de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur.

En complément de l'action que mène le ministère de la culture pour atteindre l'objectif du 100 % EAC – éducation artistique et culturelle – , les crédits du pass culture progresseront de 20 millions d'euros. Je souhaite faire évoluer cet outil car il doit mieux s'articuler avec la fin du parcours d'éducation artistique et culturelle, et contribuer véritablement à la diversification des pratiques culturelles des jeunes ; j'aurai l'occasion de m'en expliquer en réponse à vos questions et à vos amendements, mesdames, messieurs les députés. Notre politique d'accès à la culture dans tous les territoires bénéficiera également d'autres moyens : ainsi, l'an prochain, nous désignerons la première « capitale française de la culture », nouveau label qui distinguera tous les deux ans l'innovation culturelle et artistique ainsi que l'attractivité d'une ville ou d'un groupement de collectivités en ce domaine.

Quant à l'enseignement supérieur culturel, il bénéficiera d'un accroissement budgétaire notable, à hauteur de 3,3 %. Nous améliorons ainsi les conditions d'études et de vie des 37 000 étudiants de nos écoles culturelles et artistiques, et renforçons les mesures d'accompagnement à la vie étudiante et à l'insertion professionnelle.

Mesdames, messieurs les députés, telles sont, dans les grandes lignes, les priorités de la mission « Culture » pour 2021 dont les crédits sont soumis à votre vote. Les nouveaux moyens budgétaires mobilisés par cette mission témoignent, en ces temps difficiles, vous l'avez souligné, de notre confiance en l'avenir, de notre détermination à accompagner et à soutenir, dans notre pays, la vitalité de la vie culturelle, qui est en effet l'un des fondements de notre République.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.