Intervention de Michel Larive

Séance en hémicycle du vendredi 6 novembre 2020 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2021 — Médias livre et industries culturelles ; avances à l'audiovisuel public

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Larive :

Tandis que les obscurantismes semblent gagner du terrain et permettre aux idéologies les plus nauséabondes d'innerver peu à peu la société française, nous avons le devoir de tout faire pour aiguiser l'esprit de nos concitoyennes et de nos concitoyens, et réaffirmer les valeurs universelles qui fondent notre République.

Nous ne pourrons atteindre cet objectif sans une politique culturelle ambitieuse qui favorise la diversité artistique en soutenant les créateurs, et qui permette la plus large diffusion possible des oeuvres. Cette politique culturelle inclut nécessairement le champ de la presse et des médias, qui doivent avoir les moyens suffisants pour accomplir leur oeuvre d'information en toute liberté, sans subir de pressions politiques ou économiques.

L'augmentation des aides à la presse, prévue dans le programme 180, est salutaire dans le contexte actuel, mais elle ne saurait compenser les baisses successives observées depuis le projet de loi de finances pour 2018. Ces aides sont insuffisantes pour permettre un véritable pluralisme. Elles n'empêcheront pas l'érosion du nombre de quotidiens payants et gratuits, ni celle des magazines hebdomadaires d'information politique et générale.

Au-delà de la question des montants alloués, c'est notre système d'aides à la presse qui montre ses limites, car ces fonds subventionnent sans contrepartie quelques grands groupes et banques qui possèdent désormais la plupart des titres de presse. Il faut repenser les aides à la presse pour permettre le maintien et la création de titres indépendants et garantir la liberté des rédactions vis-à-vis des financeurs. Ces aides devront s'accompagner de mesures en faveur du pluralisme et contre la concentration des médias.

Quant aux crédits alloués au Centre national du livre – CNL – , ils restent constants Or nous savons le rôle primordial que le CNL remplit en faveur de la création littéraire et de la diffusion des oeuvres auprès du public. Il permet aux artistes-auteurs de s'affranchir du modèle économique de la rentabilité et de proposer des contenus originaux. Cette action en faveur de la création littéraire doit être mieux soutenue.

Enfin, si nous sommes pour l'élargissement des horaires d'ouverture des bibliothèques car elles favorisent l'accès aux livres, nous n'acceptons pas qu'il soit réalisé au détriment des bibliothécaires qui sont de plus en plus fréquemment sollicités pour travailler le soir et le week-end.

En ce qui concerne le secteur audiovisuel public, vous nous proposez de poursuivre la cure d'austérité que vous avez lancée il y a deux ans : compte tenu de l'inflation, la baisse des crédits est de 2,63 % cette année, après 3,36 % l'année dernière et 2,56 % l'année précédente. Pour France Télévisions, les conséquences sont particulièrement préoccupantes, car à cette baisse de crédits s'ajoutent une perte de chiffre d'affaires publicitaire évaluée à 55,1 millions d'euros par rapport aux prévisions initiales et d'importants surcoûts liés à la crise sanitaire. De nombreux emplois sont menacés. La CGT France Télévisions rapporte déjà une baisse d'un peu plus de 600 postes équivalents temps plein – ETP – par rapport au 30 juin 2019, soit une diminution de 6,81 % des effectifs en une seule année. Et il faut s'attendre à ce que ces plans sociaux se poursuivent.

Enfin, les choix budgétaires proposés par le Gouvernement paraissent en totale contradiction avec les orientations stratégiques présentées dans le projet annuel de performances – PAP.

Comment faire de France Télévisions une référence en matière de fiabilité, de pédagogie et de mise en perspective des événements sans lui fournir, par exemple, les moyens nécessaires pour financer un journalisme d'investigation trop souvent sacrifié sur l'autel de l'immédiateté et du sensationnalisme ?

Alors que l'objectif affiché est de renforcer l'ancrage de France Télévisions auprès des jeunes publics, en leur proposant des programmes à la fois ambitieux, accessibles et adaptés à chaque tranche d'âge, pourquoi programmer l'arrêt de France 4, une chaîne qui réalise d'excellentes audiences auprès des jeunes ? Cela n'a pas de sens. Autre incohérence : vous dites vouloir tripler le volume horaire consacré aux programmes régionaux à horizon 2022, afin de favoriser la représentation des territoires, la proximité, la parité et l'inclusion, mais vous mettez fin à la diffusion des programmes de France Ô début septembre.

Nous, députés de La France insoumise, considérons que le budget proposé ne répond absolument pas aux défis à relever et manque clairement d'ambition. Nous voterons donc contre.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.