Intervention de Martine Wonner

Séance en hémicycle du samedi 7 novembre 2020 à 15h00
Prorogation de l'état d'urgence sanitaire — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMartine Wonner :

Oui, les députés du groupe Libertés et territoires savent bien que la situation sanitaire est préoccupante et qu'elle nécessite de prendre des décisions fortes. Jamais nous n'avons nié l'épidémie, la détresse des personnes malades et de leurs proches. Mieux, nous n'avons eu de cesse de souligner la nécessité de doter davantage l'hôpital public, que la majorité avait si longtemps oublié pour des raisons budgétaires peu avouables, et d'autant plus que, depuis le mois de mars, le Gouvernement aurait eu le temps de réorganiser et de renforcer les structures de soins.

Mes chers collègues, la défiance du Gouvernement envers nos institutions et les répercussions économiques et sociales dont il est responsable sont très préoccupantes. Chaque jour, nos concitoyens, dans les territoires, nous font part de leur profonde détresse et de leur incompréhension. C'est notamment le cas des petits commerces. Nous ne comprenons pas votre entêtement, monsieur le ministre, à ne pas mettre en place des protocoles sanitaires stricts qui leur permettraient d'ouvrir, à l'instar des grandes surfaces.

Depuis ce fameux mois de mars, notre parlement est dénigré, jusqu'au paroxysme avec des votes bloqués et des secondes délibérations. Non, il n'est acceptable qu'un ministre au banc demande à un voire à des députés de quitter cet hémicycle. Non, il n'est pas acceptable d'être sommé d'acquiescer à des mesures décidées en comité restreint, les fameux conseils de défense, et sans aucune concertation préalable de surcroît. Quelle différence avec ce qui se passe outre-Rhin, mes chers collègues, où la chancelière allemande annonce aux citoyens ses mesures de lutte sanitaire entourée des présidents des lander, après une journée entière d'échanges…

Ne nous leurrons pas : si nous sommes réunis ce jour, c'est parce que le Gouvernement n'a légalement pas le choix. Mais nous ne le reverrons plus de sitôt puisqu'il s'exonère, avec ce texte, de devoir revenir devant nous avant cinq mois. La politique du fait accompli a assez duré. Il n'est plus possible que, depuis huit mois, les citoyens soient soumis à des décisions contradictoires et incompréhensibles, sur la base d'informations sanitaires et politiques floues – quand elles ne répondent pas aux seuls impératifs de la communication.

Quand nous avons légiféré dans l'urgence au mois de mars, c'était avant tout pour parer à l'impréparation du Gouvernement. Les institutions de la République ne sont-elles pas capables d'affronter une crise sanitaire, dont nous ne minimisons pas l'ampleur, sans passer par un attirail de dispositifs qui abîme et étouffe notre démocratie ? Les législations d'exception finissent toujours par entrer dans le droit commun pour ne plus jamais en sortir. Personne, ni vous ni moi, ni le Conseil scientifique, ne sait quelle sera la situation dans plusieurs mois. Aussi le Gouvernement devrait-il revenir à intervalles réguliers devant le Parlement pour débattre et mettre aux votes les mesures prises pour lutter contre la pandémie.

C'est finalement un texte de renoncement que vous nous proposez d'avaliser : renoncement du Parlement à faire la loi et à contrôler l'action du Gouvernement à intervalles réguliers, renoncement à la concertation avec les élus locaux et les corps intermédiaires, renoncement à prendre en compte la situation économique désastreuse des petits commerces. De la même manière vous avez renoncé depuis le début à soigner les Français précocement.

Mes chers collègues, contrairement à ce qu'annonce le Gouvernement, ces mesures provisoires finiront par être codifiées en janvier et deviendront des mesures pérennes d'état d'urgence.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.