Intervention de Jean François Mbaye

Séance en hémicycle du lundi 9 novembre 2020 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2021 — Écologie développement et mobilité durables

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean François Mbaye, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères :

Préserver les écosystèmes implique nécessairement des coopérations régionales et internationales. Défendre les sujets environnementaux sur la scène internationale réclame que la France conduise impérativement au plan national une politique ambitieuse et exemplaire en faveur de l'écologie. J'estime que le présent projet de loi de finances – PLF – lui en donne les moyens.

Je salue ici l'évolution à la hausse des crédits de la mission qui permettra à la France de soutenir une croissance verte et de renforcer ses actions en faveur de la protection de la nature et du vivant, mais je m'interroge encore sur la baisse, une fois de plus, des effectifs.

L'examen du projet de loi de finances constitue pour la commission des affaires étrangères l'occasion d'examiner chaque année les instruments, les objectifs et les modalités de la diplomatie environnementale, et singulièrement cette année les défis de l'eau à l'échelle mondiale.

La préservation d'une eau de qualité constitue un enjeu sanitaire, socio-économique et environnemental considérable. À l'échelle de la planète, une personne sur trois ne bénéficie pas d'une eau potable gérée en toute sécurité, et deux personnes sur cinq ne disposent pas d'une installation de base. Or la pandémie de covid-19 a démontré l'importance cruciale de l'assainissement, de l'hygiène et d'un accès adéquat à l'eau afin de prévenir et de contrôler les maladies. Pourtant, des milliards de personnes n'ont toujours pas accès à un système d'assainissement et d'eau potable et les financements apparaissent encore insuffisants.

Comme le rappelle le groupe de travail sur les objectifs de développement durable – ODD – du partenariat français pour l'eau, même si la quasi-totalité de nos concitoyens a accès à des services d'eau potable, plus de 2 millions de personnes ne disposent pas en permanence d'eau potable de qualité conforme à la réglementation. Certains n'y ont également pas un accès facile, comme c'est le cas pour les personnes sans domicile fixe.

Dans le département de Mayotte, 15 % des habitants n'ont pas d'eau à domicile. En Guyane française, 42 % de la population n'a pas accès à un service d'assainissement adéquat et 10 % n'a même pas accès à des toilettes basiques.

L'eau, sous l'effet conjugué de la croissance démographique, du développement économique, de l'évolution des modes de consommation et du dérèglement climatique se révèle être une ressource de plus en plus surexploitée et polluée. Son utilisation augmente annuellement d'environ 1 % depuis les années quatre-vingt au profit de l'agriculture – 69 % des prélèvements – , des usages industriels – 19 % – et de la consommation domestique – 12 %.

Il est cependant important de relever que ces chiffres globaux de répartition masquent de grandes diversités régionales. Un habitant d'Amérique du Nord consomme en moyenne 250 litres d'eau par jour, contre 150 litres pour une personne résidant en France et moins de 10 litres pour un habitant d'Afrique subsaharienne.

L'eau est présente en abondance sur terre, mais elle est inégalement répartie. À l'échelle mondiale, quelques États disposent d'une ressource très abondante comme le Brésil, le Canada et la Russie. À l'opposé, quelques pays ont des ressources en eau quasi inexistantes, à l'image du Koweït et de certaines îles comme Malte ou les Maldives.

La quantité d'eau disponible sur un territoire donné constitue un élément important. Cependant, la capacité de mobilisation de cette ressource se révèle encore plus fondamentale. Elle correspond à la manière dont les États parviennent à s'adapter aux contraintes du milieu en construisant des ouvrages hydrauliques permettant, notamment, d'extraire une eau de qualité, de l'acheminer et de la stocker.

Cette capacité d'adaptation repose sur trois facteurs : l'expertise technique, la capacité financière et la volonté politique. L'indice de pauvreté en eau, qui prend en compte pour chaque État cette capacité de mobilisation, permet de mieux saisir les enjeux mondiaux de la crise de l'eau. Selon cet indice, des pays comme le Niger ou Haïti, cumulant des ressources en eau faibles et des difficultés techniques et financières importantes, se trouvent dans une situation hydrique particulièrement critique, ce qui n'est pas le cas pour Israël, malgré une faible ressource en eau, alors que la République démocratique du Congo – RDC – , qui dispose pourtant d'une ressource abondante, se trouve confrontée à une pauvreté en eau inquiétante.

Qu'il s'agisse de l'amélioration de l'accès au service de l'eau, de l'assainissement ou de la gestion durable, la France fait preuve d'un engagement actif sur la scène internationale. Notre pays a très largement contribué à la création de l'ODD 6 visant à garantir à tous l'accès à l'eau et l'assainissement et à assurer une gestion durable des ressources. Ainsi, nous nous sommes donné comme objectif d'assurer d'ici à 2030 un accès universel et équitable à l'eau potable à un coût abordable. Nous avons également comme cible l'amélioration de la qualité de l'eau en réduisant la pollution et en augmentant considérablement le recyclage et la réutilisation sans danger de cette ressource.

Madame la ministre de la transition écologique, pouvez-vous nous indiquer concrètement comment le Gouvernement compte s'engager plus fortement encore aux échelles nationale, européenne et internationale en faveur de cet ODD crucial ?

La France, grâce à son réseau diplomatique et au levier de l'aide publique au développement – APD – doit continuer d'oeuvrer pour mieux valoriser cette thématique politiquement et médiatiquement peu exposée et renforcer son soutien à des actions de terrain. Elle doit aussi impérativement se montrer exemplaire sur les questions hydriques sur son propre territoire, en métropole comme dans les outre-mer. Pour porter efficacement ce message, comme sur d'autres sujets environnementaux, la France doit mener à l'échelle nationale une action écologique ambitieuse et crédible, afin de favoriser, à l'instar de ce qu'elle a su faire pour le climat, un élan collectif au service de la préservation de la nature et du vivant à l'échelle de la planète.

À ce stade, j'invite notre assemblée à voter les crédits de la mission.

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