Intervention de Fabien Roussel

Séance en hémicycle du mardi 17 novembre 2020 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2021 — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFabien Roussel :

Lorsqu'elle nous a frappés une première fois, au printemps, la pandémie a remis en cause bien des certitudes, celles d'un vieux système économique et d'un capitalisme à bout de souffle, synonyme de cure d'austérité pour tous les services publics, dont celui de la santé. Dès le 13 avril, le Président de la République nous invitait à « sortir des sentiers battus, des idéologies et [à] nous réinventer » – à commencer par lui-même, avait-il ajouté. Le budget pour 2021 devait donc tracer un nouveau chemin et ouvrir, pour toutes les générations, l'espoir de vivre dignement dans un pays si riche. Tout devait changer, y compris notre engagement en faveur du climat.

Hélas, vous êtes restés enfermés dans les mêmes dogmes : vous accordez des baisses d'impôts massives et sans conditions aux entreprises, y compris aux plus grandes, même quand elles n'en ont pas besoin, et même si elles polluent ; vous limitez au strict minimum les aides sociales pour les plus fragiles ; vous ne prenez aucune mesure pour taxer les plus riches, les dividendes et le capital. Pire, vous continuez de favoriser les multinationales. Ce que relancera votre plan de relance, c'est la distribution des dividendes, pas la réindustrialisation du pays ! Rien, dans votre budget, n'est par exemple prévu pour taxer Amazon, roi du pétrole en pleine pandémie. Votre taxe GAFA ne touche pas Amazon – et vous le savez. Nous vous avons proposé une « taxe coronavirus » exceptionnelle de 15 % sur le chiffre d'affaires d'Amazon et des entreprises d'e-commerce qui dégagent plus de 750 millions d'euros ; elle aurait pu financer 100 % des pertes de nos PME. Mais vous préférez accorder à ces géants d'internet de nouvelles baisses sur les fameux impôts de production ; elles devraient atteindre 10 milliards d'euros par an, et Amazon en profitera. Vous prévoyez 6,6 milliards de baisse d'impôts pour les 9 200 plus grosses entreprises et ETI, mais seulement 3,4 milliards d'euros pour les 560 000 petites et moyennes entreprises. Tout pour les gros, des miettes pour les petits !

Qui plus est, vous coupez les liens avec les agglomérations et les régions qui perçoivent les impôts. Il faut au contraire aider les collectivités, plutôt que de les priver de recettes fiscales, car ce sont elles qui recherchent des solutions pour couvrir les loyers des PME et des commerçants, pour compenser leurs pertes de recettes malgré l'argent public mis sur la table. Un cri est lancé par 110 maires de tous bords : ils vous demandent que 1 % du plan de relance – 1 milliard d'euros – vienne soutenir l'emploi, les associations, les écoles et la création de centres de santé.

Alors que ce projet de loi de finances devait sortir des sentiers battus et ouvrir une nouvelle ère pour l'industrie, les plans de licenciement, les délocalisations et les fermetures de sites se succèdent, parfois pour des raisons indépendantes de la pandémie. Je pense bien sûr aux actionnaires de Bridgestone, qui ont sciemment organisé la délocalisation de l'activité de Béthune vers la Hongrie. Les 863 salariés n'attendent maintenant qu'une chose : qu'un industriel reprenne l'usine, l'activité et les emplois. Bridgestone doit vivre !

Avec mes collègues communistes et insoumis, nous pourrions citer tant d'entreprises qui délocalisent au nom de leurs profits, sans jamais se soucier de la vie de leurs salariés – de nos vies. Nous devons nous doter enfin d'un budget et d'une législation visant à nationaliser, même temporairement, les sites industriels essentiels, et à interdire les licenciements boursiers. Ce projet de loi de finances aurait dû être guidé par un objectif unique – produire en France – , et imposer un moratoire sur les délocalisations. C'est important pour nos emplois, pour notre souveraineté et pour le climat – et c'est parce que vous ne le faites pas que la pauvreté explose.

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