Intervention de Fannette Charvier

Séance en hémicycle du mardi 17 novembre 2020 à 15h00
Programmation de la recherche — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFannette Charvier :

Deux mois après son adoption en première lecture, le projet de loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 est de retour en vue de son adoption définitive – un texte que nos collègues du Sénat ont enrichi, mais dont les grands axes ont très largement été conservés, rendant possible une commission mixte paritaire conclusive. Je tiens d'ailleurs à saluer le travail des rapporteurs, qui a permis cette convergence.

Par définition, un compromis n'est jamais totalement satisfaisant et j'entends qu'il peut rester certains points de désaccord, mais ils ne doivent pas faire oublier l'essence même du projet de loi : redonner des moyens, du temps et de la visibilité à la recherche publique française.

Nos laboratoires ont besoin d'avoir l'assurance que le financement de leurs travaux sera garanti plus d'un an ; ils ont besoin d'anticipation et de lisibilité. Nous réinjectons 25 milliards d'euros sur dix ans dans la recherche publique française, faisant ainsi passer son budget annuel de 15 à 20 milliards d'euros par an d'ici à 2030, et cela, sans prendre en compte l'intégralité des financements annoncés dans le cadre du plan de relance, qui permettront d'apporter une véritable impulsion à cette programmation budgétaire, avec pas moins de 6,5 milliards supplémentaires répartis sur les deux prochaines années.

Je mesure les inquiétudes qui se sont exprimées quant à la répartition de ces fonds entre appels à projets et financements dits « de base ». Une opposition entre ces deux modes de financement n'a pas de sens, parce que la recherche ne souffre pas d'un excès de financements par appels à projets, mais d'un défaut de financement global. Les deux doivent donc être complémentaires et faire l'objet d'un certain équilibre.

Ce texte va faciliter l'accès aux financements de l'ANR en relevant le taux de succès à 30 %, ce qui répond à une demande des chercheurs, qui en ont marre de consacrer des jours et des semaines à monter des dossiers avec d'aussi faibles chances de les voir accepter. Il faut bien avoir à l'esprit que ces financements par appels à projets ne représenteront in fine et qu'environ 8 % du total des moyens consacrés à la recherche, alors que les financements de base des laboratoires seront augmentés de 10 % dès l'an prochain et de 25 % à l'horizon 2023. Par ailleurs, avec le mécanisme du préciput, ce sont près de 450 millions de crédits de base qui irrigueront désormais toutes les disciplines, tous les territoires et tous les établissements, au-delà des seules équipes lauréates. Arrêtons d'opposer appels à projets et financements de base, recherche appliquée et recherche fondamentale. Nous avons une seule et même stratégie : la réussite et l'excellence de la recherche française.

Redonner des moyens passe aussi par des moyens humains, avec l'objectif de recruter plus et, surtout, mieux. Au-delà de la création de 5 200 emplois scientifiques sous plafond État sur dix ans, ce sont près de 15 000 postes contractuels qui seront également créés dans les établissements publics de recherche. Recruter mieux, avec un mouvement sans précédent de revalorisation salariale au bénéfice de l'ensemble des personnels : chaque année, 92 millions supplémentaires y seront consacrés, soit 2,6 milliards d'ici à 2027 et la promesse que, dès l'année prochaine, plus aucun chargé de recherche ou maître de conférences ne sera rémunéré en dessous de deux SMIC. Le projet de loi crée aussi de nouveaux outils de recrutement à disposition des établissements et des organismes, en plus des recrutements classiques : la chaire de professeur junior et le CDI de mission scientifique, qui permettront respectivement d'accroître l'attractivité et de sécuriser des emplois d'ingénieurs et de techniciens.

Nous saluons également toutes les dispositions nouvelles concernant l'intégrité scientifique et l'évaluation de l'enseignement supérieur et de la recherche par le biais d'un renforcement de l'indépendance, d'un changement de statut et d'un renforcement des prérogatives du Haut conseil de l'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur. Entre ces dispositions et la nomination de son nouveau président voilà quinze jours, le HCERES a désormais toutes les cartes en main pour mener à bien ses missions.

Comme je l'ai longuement évoqué en première lecture, nous nous réjouissons également, tout particulièrement dans la période actuelle, des mesures visant à favoriser le lien entre les chercheurs et l'ensemble de la société. Le projet de loi doit contribuer à infuser la culture scientifique dont nous manquons cruellement quand les postures prennent le pas sur l'objectivité et quand le fait scientifique s'efface derrière la post-vérité.

Pour finir, je tiens enfin à vous remercier, madame la ministre, ainsi que les membres de votre cabinet et les services du ministère, pour le travail effectué en amont et pendant l'examen du texte dans les deux assemblées.

Chers collègues, réjouissons-nous ! Avec ce projet de loi, nous nous donnons enfin la possibilité et les moyens de faire en dix ans ce que tous nos prédécesseurs n'ont pas réussi à faire en vingt.

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