Intervention de Gérald Darmanin

Séance en hémicycle du vendredi 20 novembre 2020 à 15h00
Sécurité globale — Article 24 (appelé par priorité)

Gérald Darmanin, ministre :

Je comprends la question de Mme Dumas, car nous nous la sommes également posée. Combien de fois me m'a-t-on pas dit que je n'avais qu'à faire mon boulot ! Au passage, je comprends aujourd'hui que La France insoumise souhaite que je mène davantage d'actions au ministère de l'intérieur : ce n'est pas tout à fait ce que j'avais retenu de leurs interventions publiques ces derniers mois, mais je suivrai ce conseil… Quoi qu'il en soit, il y a bien, dans la section 2 du code pénal intitulée « Des menaces et actes d'intimidation commis contre les personnes exerçant une fonction publique », un article 433-3 qui dispose que « Est punie de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende la menace de commettre un crime ou un délit contre les personnes ou les biens proférée à l'encontre d'une personne investie d'un mandat électif public, d'un magistrat, d'un juré, d'un avocat, d'un officier public ou ministériel, d'un militaire de la gendarmerie nationale, d'un fonctionnaire de la police nationale » etc.

Madame Dumas, vous demandez pourquoi cet article ne s'appliquerait pas aux faits que je dénonce et pourquoi il faudrait inventer une nouvelle incrimination. Mais c'est tout le problème : lorsque nous souhaitons – y compris moi, en tant que patron de l'administration – aider les policiers menacés par la diffusion des messages que j'ai évoqués, ou montrés du doigt sur le site Copwatch, nous ne pouvons rien faire. Monsieur Larrivé, il me semble vous serviez le ministre de l'intérieur qui disait, en 2011, que le site Copwatch était totalement scandaleux et qu'aucune arme ne permettait de le faire fermer. En effet le projet Copwatch est international, et ancien. Cela fait longtemps que les policiers sont menacés et que personne ne leur apporte de protection juridique, car la « menace de commettre un crime ou un délit » ne s'applique pas dans le cas de Copwatch ni pour les posts Facebook : il ne s'agit pas de menaces, mais de la diffusion d'éléments personnels, ce qui ne suffit pas pour ouvrir une enquête et faire condamner ces personnes.

La question qui peut alors se poser, pour répondre à Mme Forteza, au cas où ma réponse à Mme Vichnievsky n'aurait pas suffi, est légitime : faut-il légiférer et prendre le risque de créer une nouvelle incrimination dans le code pénal ? Ce n'est pas un mauvais débat. Faire cela, c'est augmenter la présence de l'État, de la justice et du droit dans la vie des citoyens. D'où finalement une autre question : où est la limite de la liberté d'expression ? C'est un débat qu'entretiennent les parlementaires depuis la Révolution. La liberté d'expression est très importante, mais elle n'est pas sans limite.

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