Intervention de Olivier Véran

Séance en hémicycle du lundi 23 novembre 2020 à 16h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 — Présentation

Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé :

… la langue française étant riche d'expressions pour qualifier l'austérité. Ce choix de l'austérité, dont les conséquences auraient évidemment été dramatiques, nous ne l'avons pas fait. Protéger nos concitoyens face à un virus qui a déjà fait plus de 45 000 morts dans notre pays, soutenir l'hôpital et tous les soignants, faire avancer la société en consacrant des droits nouveaux, réarmer notre protection sociale, voilà le choix que nous avons fait.

Au moment où nous débutons cette nouvelle lecture, certaines mesures sont désormais stabilisées. L'objectif national des dépenses d'assurance maladie – ONDAM – pour 2020, qui avait déjà été majoré de 10,1 milliards d'euros dans le texte initial, a été augmenté de 3,2 milliards supplémentaires lors de la première lecture, de manière à tenir compte des surcoûts liés à la crise du covid-19 et à accélérer la revalorisation des salaires de nos soignants.

Un accord a d'ores et déjà été trouvé entre votre assemblée et le Sénat sur plusieurs articles, et non des moindres. Je suis notamment satisfait du vote conforme de l'article relatif aux revalorisations dans les EHPAD, qui s'établiront à 183 euros net par mois dans les EHPAD publics et privés à but non lucratif et à 160 euros net par mois dans les EHPAD privés à but lucratif. Nous sommes tous conscients de l'enjeu que représentent le grand âge et l'autonomie dans notre pays, et de l'engagement de ceux qui interviennent auprès de nos aînés ; il ne se trouvera personne sur vos bancs pour estimer que ces augmentations sont injustifiées. Nous pouvons également nous féliciter de l'adoption conforme de l'allongement du congé paternité ; le titre correspondant a été voté à la quasi-unanimité dans les deux chambres.

Un accord a également été trouvé pour vingt-sept autres articles. Je citerai notamment le financement de la prime covid pour les salariés des services d'aide et d'accompagnement à domicile, la création d'une mission d'intérêt général pour lutter contre les violences faites aux femmes – Élisabeth Moreno et moi nous sommes rendus tout à l'heure à l'hôpital Bichat, qui a ouvert une nouvelle maison pour accompagner les femmes victimes de violences – , ou encore la garantie du tiers payant et du secret pour les frais liés à une interruption volontaire de grossesse – IVG.

Le Gouvernement appellera à l'aménagement de quelques articles sur lesquels un accord avec le Sénat est tout proche. Je pense notamment à certaines dispositions relatives à la lutte contre la fraude.

En revanche, d'autres dispositions adoptées par le Sénat ne peuvent être soutenues. Le relèvement de l'âge de départ à la retraite, pour ne citer que celle-ci, ne me semble pas trouver sa juste place dans ce PLFSS.

De même, s'agissant du financement inédit de l'effort de revalorisation des métiers de l'aide à domicile, si vitaux pour l'accompagnement des personnes âgées, il nous paraît indispensable de revenir à un dispositif qui respecte la compétence des départements. Nous visons très clairement une hausse des salaires sur l'ensemble du territoire national, mais ce n'est pas en déresponsabilisant les premiers responsables que nous améliorerons la politique de l'autonomie. Sachant à quel point vous y êtes attachés, je tiens à réaffirmer que l'objet de cette aide est, sans ambiguïté, de financer l'augmentation des salaires. En agréant l'avenant no 44 à la convention collective de la branche de l'aide à domicile, nous venons d'apporter la preuve de notre ambition en la matière.

Nous devrons également nous interroger sur la création d'une branche autonomie spécifique à la filière agricole – je m'en suis entretenu avec M. Pascal Cormery, président de la caisse centrale de la MSA, la Mutualité sociale agricole. Conformément à sa vocation, la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, CNSA, continuera à agir en faveur de l'ensemble des personnes âgées et des personnes handicapées, quel que soit le régime de sécurité sociale auxquelles elles sont affiliées. Autrement dit, les salariés et non-salariés agricoles sont couverts, sans ambiguïté. Cela ne remet aucunement en cause le rôle fondamental de la MSA dans les territoires en matière de mise en oeuvre des politiques de santé et de soutien à l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées. Pour lever toute ambiguïté, je vous inviterai à réaffirmer avec force que la création de la branche autonomie ne dépossède en rien les caisses de la MSA de leurs missions et de leurs actions concourant à la prise en charge de la perte d'autonomie.

Enfin, comment ne pas regretter la suppression de la reprise de dette des hôpitaux, dont le but était de permettre aux établissements de retrouver de la visibilité et des marges de manoeuvre ? Par ce vote, sur lequel le Gouvernement vous appellera à revenir, le Sénat a fait disparaître de ce PLFSS 13 milliards d'euros destinés au soutien des hôpitaux !

Mesdames, messieurs les députés, nous avons du pain sur la planche. Ce PLFSS d'exception donne lieu à des débats parfois vifs, mais toujours passionnés. Je me réjouis de constater que l'hôpital, les soignants, la famille, le grand âge, l'autonomie mobilisent pleinement les représentants de la nation. Il n'en faudra pas moins pour permettre à notre système de santé et à notre protection sociale dans son ensemble de faire face aux chocs et pour construire des fondations solides pour les années à venir.

Les grandes politiques sociales de la France s'élaborent souvent dans l'adversité – la sécurité sociale n'a pas été créée dans une période de calme et d'opulence. Soyons à la hauteur d'un défi historique, soyons dignes de ceux qui nous ont précédés !

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