Intervention de Agnès Firmin Le Bodo

Séance en hémicycle du lundi 23 novembre 2020 à 16h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAgnès Firmin Le Bodo :

Nous avons déjà eu l'occasion de signaler les progrès significatifs que permettra ce projet de budget. Nous avons aussi tenu un discours de vérité sur ses lacunes et sur les améliorations qu'il convient d'y apporter.

Parlons d'abord des avancées. Ce PLFSS tient les engagements forts pris lors du Ségur de la santé en faveur de l'hôpital et des EHPAD. C'est une avancée sans précédent et une mesure de justice pour les soignants.

La reprise de 13 milliards de dette hospitalière est une excellente décision, qui permettra de relancer l'investissement courant à l'hôpital et d'en assainir la situation financière. Je m'étonne donc de la volonté du Sénat de supprimer une disposition demandée de longue date par tous les acteurs.

De même, l'allongement du congé paternité représente un progrès pour notre société. C'est un nouveau pas vers une égalité réelle entre les hommes et les femmes, notamment face au travail. Il conviendra néanmoins d'être vigilant pour que cette mesure ne pénalise pas les toutes petites entreprises.

Quant au versement de la prime de naissance avant la naissance de l'enfant, il constitue un bon signal envers les familles, dont il faut simplifier la vie si nous voulons relancer la natalité dans notre pays.

Cela étant, il reste plusieurs points sur lesquels le débat doit se poursuivre.

En première lecture, notre assemblée avait adopté à l'unanimité un amendement du Gouvernement prévoyant la revalorisation salariale des métiers du domicile, qui jouent un rôle essentiel. C'était un premier pas, nécessaire, mais qu'il faudra rapidement prolonger dans la future loi grand âge. Les professionnels de l'aide à domicile ne sont pas concernés par les revalorisations décidées lors du Ségur, et ils vivent très mal ce manque de reconnaissance. Il est d'urgent de le dire et d'en tirer les leçons, car la situation est devenue quasi explosive.

Le Sénat a souhaité que les 200 millions d'euros que la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie doit distribuer aux départements à partir de 2022 soit une somme fixe et non un plafond. Si on peut discuter de la méthode choisie, le sujet mérite un vrai débat. En subordonnant le versement de l'aide par la CNSA à une contribution des départements, nous prenons le risque d'aggraver les inégalités entre ceux qui auront les moyens d'agir et les autres.

J'en profite pour vous alerter sur le malaise profond qui touche également la médecine de ville. Décaler à 2023 la signature d'une nouvelle convention médicale entre assurance maladie et médecins libéraux n'est pas de bonne politique. Il faudra impérativement répondre au sentiment d'abandon qu'ils expriment.

Nous avons été particulièrement interpellés, cette semaine, par les radiologues libéraux. Leur réaction, à chaud, à l'abrogation de l'article 99 de la LFSS pour 2017, traduit leur exaspération. Mme la ministre Agnès Buzyn s'était engagée à supprimer définitivement cette mesure, qui permet de passer outre les négociations conventionnelles avant le 1er janvier 2021 au plus tard. Or l'absence de disposition en ce sens dans le PLFSS a été interprétée comme un revirement du Gouvernement, malgré la parole donnée. Il faut y répondre. À titre personnel, et dans l'attente d'éléments complémentaires, je suis très réservée quant à la position de M. le rapporteur consistant à supprimer l'article 33 bis A, ajouté au Sénat.

Par ailleurs, je souhaite appeler à nouveau l'attention du Gouvernement sur la situation catastrophique des grossistes répartiteurs, dont certains pourraient mettre la clef sous la porte. Je vous y sais attentif. La compensation des pertes liées au covid-19 était nécessaire, mais elle ne répond pas à la question de l'équilibre structurel du secteur. Il est impératif de trouver une solution et de mener une réforme structurelle en concertation avec les acteurs concernés – ils y sont prêts. Après trois ans de concertation avec les administrations, vous devez assumer un vrai choix politique.

Enfin, je voudrais revenir sur l'importance des traitements dans la gestion de la crise. L'article 45 du PLFSS prévoit d'intégrer à l'ONDAM pour 2021 une provision de 4,3 milliards d'euros destinée à poursuivre la gestion de la crise ; elle recouvre des tests, des masques et des vaccins, mais ne semble pas tenir compte des traitements antiviraux, qui seront pourtant une brique complémentaire dans l'arsenal de gestion de crise. Des traitements de ce type sont en cours de développement, parallèlement au développement de vaccins, et certains pourraient entrer sur le marché avant ou en même temps que les vaccins. L'arrivée d'un ou de plusieurs vaccins ne permettra sans doute pas d'atteindre immédiatement l'immunité collective : un certain nombre de personnes continueront d'être infectées.

En attendant une couverture vaccinale suffisante pour enrayer l'épidémie, la mise à disposition de traitements antiviraux, dont l'objectif est de diminuer la charge virale des patients et l'impact clinique de la maladie, pourrait permettre d'éviter à la pathologie d'évoluer vers des formes sévères. Nous pourrions ainsi prévenir l'engorgement des hôpitaux, réduire le risque de contamination et limiter la durée d'isolement. Il semble important de prévoir une telle approche dans le plan de gestion de crise, et d'intégrer les traitements à la provision prévue par l'article 45.

Le PLFSS pour 2021 traduit un vrai progrès. Malgré les quelques divergences que je viens d'évoquer, le groupe Agir ensemble votera en sa faveur.

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