Intervention de Martine Wonner

Séance en hémicycle du lundi 23 novembre 2020 à 16h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMartine Wonner :

Le premier puis le deuxième confinement, ainsi que les mesures de couvre-feu, ont eu des conséquences désastreuses pour notre économie et nos comptes sociaux – sans compter, naturellement, les conséquences en matière de santé publique. Dans un tel contexte, l'examen du PLFSS est complexe, mais ses enjeux sont vitaux – d'autant plus que la crise sanitaire a révélé combien les attentes étaient fortes quant à la vertu d'amortisseur social et économique de la sécurité sociale.

Plus que jamais, nous avons besoin d'un système de santé solidaire et bien organisé. Or la crise sanitaire a été le catalyseur d'une situation fragilisée depuis trop longtemps. Notre système de santé – plus particulièrement le service public hospitalier – est à bout de souffle : les services sont saturés et sur-sollicités ; les soignants, trop peu nombreux, ne comptent pas leurs heures et sont épuisés physiquement et moralement. Dans ces conditions délétères, on peut aisément comprendre pourquoi ils choisissent de quitter l'hôpital.

Certaines décisions ont été difficiles à admettre. À titre d'exemple, les médecins de ville et l'ensemble du système de santé libérale ont été tenus à l'écart, ce qui a accentué la pression sur l'hôpital public. Rappelons également le manque initial de moyens et de matériel, et l'absence de mesures immédiates pour renforcer les équipes de soins, alors qu'un plan de formation, ou encore des protocoles de prévention adaptés dans les territoires, s'imposaient lors du confinement.

Lors du déconfinement, le Gouvernement a indiqué qu'il se tenait prêt. Pourtant, les semaines qui ont suivi ont donné l'impression d'un manque d'anticipation et de préparation. Non seulement le Ségur de la santé – au sujet duquel le Gouvernement et la majorité se distribuent des satisfecit – n'est qu'un rattrapage, mais encore il s'avère insuffisant face aux besoins présents et futurs. Un Ségur II se fait attendre, donnant une visibilité pluriannuelle, et répondant aux attentes et à l'engagement de tous les soignants.

Le système de santé demeure cloisonné, et la gouvernance territoriale étouffe sous le poids d'une administration pléthorique et inadaptée. Nous devons revoir totalement la gouvernance du système de santé, et questionner la pertinence des agences régionales de santé – ARS. Le plan ma santé 2022, destiné à améliorer la coopération entre l'hôpital et la médecine de ville, a certes été amorcé, mais il a été mis à mal dès l'apparition du premier patient covid. Ce rendez-vous entre une véritable territorialisation de la santé et un refinancement de l'hôpital public est définitivement manqué.

En octobre déjà, j'évoquais devant vous le champ de la psychiatrie. Là encore, l'occasion d'insuffler une nouvelle dynamique et de traiter les difficultés vous échappe. Il est de plus en plus urgent de prendre ce sujet à bras-le-corps, tant la politique menée depuis mars nous fait craindre pour la santé mentale et psychique de nos concitoyens – nous vous en avons alertés à plusieurs reprises. Une étude récente de l'IFOP montre ainsi que 33 % de nos jeunes ont pensé sérieusement au suicide en 2020 – je dis bien 33 %, mes chers collègues ! Les chiffres sont similaires, ou très proches, pour les artisans, les chefs d'entreprises, les entrepreneurs et les personnes âgées isolées.

Le Gouvernement a évoqué ces alertes dans ses dernières déclarations ; malheureusement, le PLFSS n'y répond pas. Il prévoit notamment de reporter la réforme du financement, et de bloquer la réorganisation. Vous ne pouvez vous contenter d'affirmer que vous avez pris conscience du mal-être des Français : il faut passer aux actes. Ce serait tenir un double discours, que de constater l'explosion des difficultés psychiques de nos concitoyens sans y consacrer tous les moyens nécessaires. Quant à la remise en cause des décisions gouvernementales, je précise qu'elle n'appartient pas à des scientifiques dont la santé mentale serait fragilisée…

Nous proposerons à nouveau plusieurs amendements visant à revenir sur certaines dispositions de l'article 42. J'espère que, cette fois, nous aurons un véritable débat avec vous, monsieur le ministre, après une première lecture caractérisée par la brièveté, voire l'absence, de vos réponses.

Le groupe Libertés et territoires continue de regretter que de nouveaux financements ne soient pas consacrés à l'autonomie des personnes âgées et en situation de handicap, alors qu'une des mesures phares du projet de loi entérine la création d'une nouvelle branche dédiée à l'autonomie. Dans la lignée de son vote en première lecture, et si l'économie générale du texte n'est pas modifiée, notre groupe votera quasi unanimement contre le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale.

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