Intervention de Annie Chapelier

Séance en hémicycle du lundi 30 novembre 2020 à 21h00
Amélioration du système de santé par la confiance et la simplification — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAnnie Chapelier :

Primum non nocere, autrement dit : avant tout, il importe de ne pas nuire. Ce principe de prudence, que les médecins apprennent dès leurs premières années, doit être le nôtre ce soir. Les réformes que nous proposons au monde de la santé, donc à la France tout entière, doivent être tangibles, apporter une réelle amélioration et répondre aux besoins de simplification réclamés de toutes parts.

Le chantier est donc gigantesque, et la proposition de loi n'a pas vocation à remédier à toutes les difficultés, mais, face à un texte annoncé comme la traduction de la concertation du Ségur, les attentes ne pouvaient être qu'énormes. Les soignants ont observé le milieu de la santé avec une attention et un réalisme dont ils n'ont pas à rougir : aujourd'hui, les compétences, la technicité et le rôle sociétal des professions de santé ne peuvent plus être ignorés.

Nous devons nous fonder sur la réalité du terrain, en partant de celles et ceux sans lesquels le système de santé n'existerait tout simplement pas. Si à quelque chose, malheur est bon, la crise sanitaire aura permis qu'un nouveau regard soit porté sur la santé : ne manquons pas cette opportunité. Le chemin est encore long, et tous les secteurs – économique, social et environnemental – appellent notre diligence, mais nous ne pouvons nier qu'aujourd'hui, celui de la santé conditionne tous les autres. Ce sera toujours le cas demain et, même si les chiffres de l'épidémie s'améliorent, nous ne devons oublier ni notre responsabilité à apporter une véritable réponse, ni notre devoir de rompre avec les décisions qui n'ont fait qu'affaiblir, année après année, notre système de santé.

La proposition de loi comporte des avancées que je tiens à saluer, comme le renforcement de l'encadrement de l'intérim médical et l'élargissement des actes pouvant être effectués par les sages-femmes et les masseurs-kinésithérapeutes, même si je regrette que cet élargissement n'ait pu être ouvert à d'autres professions, les amendements y tendant ayant été jugés irrecevables. Je voudrais également saluer notre collègue Stéphanie Rist pour son écoute permanente, et la remercier d'avoir fait évoluer le texte, à la suite des auditions, lors des débats en commission.

Cependant, le groupe Agir ensemble souhaite revenir plus particulièrement sur trois articles ayant orienté les débats lors de l'examen en commission.

Tout d'abord, l'article 1er, qui tendait à créer une profession médicale intermédiaire, a provoqué une levée de boucliers qui ne pouvait être ignorée. Notre groupe espère donc que la réécriture de cet article marquera un nouvel élan pour le développement des pratiques avancées, qui, parce qu'elles offrent perspectives d'évolution et transversalité, sont attendues des professionnels de santé. Ces pratiques constituent l'échelon intermédiaire sur lequel notre système de santé peut, et doit, renaître, mais elles ne peuvent se développer sans qu'on avance sur la réingénierie et l'universitarisation des formations, qui conditionnent totalement toutes les perspectives d'évolution des professions de santé et n'ont donc que trop tardé. Elles ne peuvent souffrir un énième report.

Par ailleurs, l'article 7, dont on a beaucoup parlé et sur lequel notre groupe a déjà fait part de ses réserves, tend vers davantage d'intégration entre les établissements hospitaliers, afin de permettre une meilleure prise en charge des patients dans les territoires et d'assurer une égalité d'accès aux soins. Si nous partageons évidemment cet objectif, nous considérons cependant que l'instauration d'une direction commune doit constituer l'aboutissement d'une démarche de coopération, en concertation étroite avec des acteurs locaux : l'imposer unilatéralement, comme le prévoit cet article, n'est pas une bonne méthode. Davantage d'intégration constitue parfois un progrès pour les équipes soignantes et pour les patients, mais ce n'est pas le cas partout. Parfois, cela ne marche pas : il faut aussi entendre ces réalités et les craintes exprimées par les centres hospitaliers locaux et les hôpitaux de proximité.

À l'initiative de la rapporteure, nos travaux en commission ont permis d'introduire des garde-fous s'agissant de l'intérim médical. Sa durée ne peut désormais excéder un an, et la décision de confier la direction de l'établissement concerné revient à l'ARS après avis de l'ensemble des parties prenantes préalablement à la fusion. Cependant, nous regrettons que la commission n'ait pas jugé bon de subordonner la fusion des établissements à un avis conforme des instances : nous y reviendrons lors de l'examen des amendements. La mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale – MECSS – entamant en janvier un cycle d'évaluation des GHT, quatre ans après leur création, peut-être serait-il pertinent d'attendre les conclusions de ses travaux avant d'aller plus loin dans l'approfondissement des GHT.

Enfin, s'agissant de l'article 14, qui prévoit la création d'une plateforme nationale à destination des personnes en situation de handicap, nous nous interrogeons fortement sur l'association des départements et l'utilité de créer une couche supplémentaire qui pourrait s'avérer redondante avec les actions départementales. Nous attendons donc du Gouvernement qu'il apporte des clarifications sur ce sujet.

Comme vous le voyez, notre groupe aborde donc l'examen de la proposition de loi dans un esprit constructif et ouvert au débat. Nous sommes convaincus de la possibilité de parvenir à une rédaction qui conviendra à tous, en particulier concernant l'article 7.

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