Intervention de Élodie Jacquier-Laforge

Séance en hémicycle du mercredi 2 décembre 2020 à 15h00
Réforme de l'adoption — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉlodie Jacquier-Laforge :

Les chiffres de l'adoption nous renvoient une image, certes insuffisamment précise, mais explicite de la situation. Ils nous révèlent que 12 000 enfants en moyenne sont adoptés chaque année en France. En 2018, les juges ont statué sur près de 10 000 requêtes. Et, alors que quelque 3 000 enfants bénéficient du statut de pupille de l'État, à peine 1 000 d'entre eux sont confiés à une famille en vue de leur adoption, les 2 000 autres vivant dans des familles d'accueil pour les trois quarts d'entre eux, ou dans des établissements. Quant aux enfants qui ne sont pas confiés en vue de l'adoption, la majorité concerne des mineurs ayant des besoins spécifiques. Alors oui, monsieur le secrétaire d'État, nous n'en faisons pas assez.

La proposition que nous examinons aujourd'hui fait suite aux conclusions du rapport de 2019 de notre collègue et rapporteure Monique Limon et de la sénatrice Corinne Imbert intitulé « Vers une éthique de l'adoption : donner une famille à un enfant ». Je souhaite saluer leur travail. Les dispositions qui en découlent ambitionnent de placer l'intérêt de l'enfant au coeur du processus d'adoption, ainsi que de renforcer et de sécuriser le recours à l'adoption comme un outil de protection de l'enfance, lorsque celui-ci correspond à l'intérêt de l'enfant concerné et uniquement dans son intérêt.

Ce rapport met en lumière le fait que la loi du 14 mars 2016 connaît une application territoriale hétérogène et nécessite une harmonisation dans de nombreux domaines, tels que l'accompagnement des familles adoptantes, la formalisation du projet pour l'enfant, la mise en place des commissions des statuts ou encore la mise en oeuvre de la nouvelle procédure de délaissement. Il révèle également un déficit de formation des acteurs de l'adoption auquel d'ailleurs il faudra remédier.

Mes chers collègues, avant d'aborder le fond, je souhaite vous faire partager un regret du groupe démocrate : l'examen de cette proposition de loi en procédure accélérée. Nous devons laisser travailler le Parlement pour ne pas nuire à la qualité des dispositions que nous souhaitons adopter et inscrire le travail de Monique Limon dans une véritable réforme de l'adoption.

Sur le fond, le groupe Mouvement démocrate (MoDem) et démocrates apparentés s'oppose majoritairement à l'évolution apportée aux organismes autorisés pour l'adoption. À titre personnel, je souscris au recentrage de l'adoption des enfants français sur l'Aide sociale à l'enfance. Le Gouvernement, et vous aussi madame la rapporteure, avez déposé des amendements de compromis sur le sujet ; je souhaite qu'ils permettent de faire toute la lumière sur le futur rôle des OAA dans l'intérêt des enfants. J'espère qu'ils seront de nature à rassurer mes collègues.

Bien évidemment, la question des moyens financiers et humains alloués à l'Aide sociale à l'enfance se posera au regard de la mission exclusive que vous souhaitez lui confier à l'égard de l'adoption des enfants français. Comme lors de l'examen en commission, nous avons déposé des amendements en séance, dont plusieurs sont rédactionnels afin de prendre en compte l'ensemble des couples qui peuvent avoir accès à l'adoption et utiliser les mots justes pour que le droit soit clair et lisible. D'autres amendements visent à abaisser l'âge du consentement des mineurs à 12 ans, afin de renforcer le droit de l'enfant et, comme le propose notre collègue Erwan Balanant, d'ouvrir l'adoption à partir de l'âge de 25 ans.

Par ailleurs, vous savez combien notre groupe est attaché au respect des libertés individuelles. Ainsi, nous avons déposé un amendement qui tend à prévoir qu'un décret en Conseil d'État précisera les données qui pourront être enregistrées dans la base nationale recensant les demandes d'agrément en vue d'adoption et les agréments délivrés.

Mes chers collègues, je ne doute pas que le débat en séance apporte les améliorations encore nécessaires qui permettront, ce que je souhaite, au groupe des députés démocrates de voter ce texte.

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