Intervention de Nicolas Dupont-Aignan

Séance en hémicycle du jeudi 3 décembre 2020 à 15h00
Carte vitale biométrique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Dupont-Aignan :

Si cette proposition, adoptée au Sénat, est la bienvenue, elle paraît encore bien timorée. Je regrette d'ailleurs que la carte Vitale biométrique n'ait pas été instaurée au temps où Les Républicains étaient au pouvoir car, pour notre part, nous soutenons cette idée depuis des années.

Cette proposition a au moins le mérite de prévoir une expérimentation qui prouverait très vite l'ampleur de la fraude sociale. En effet, le plus surprenant au sujet de la fraude à la carte Vitale, c'est sans doute ce déni de réalité de l'appareil d'État, qui a toujours cherché à minimiser les choses et continue à le faire. M. Brindeau et M. Hetzel ont très bien expliqué la situation et il suffit de lire les nombreux rapports déjà rédigés à ce sujet pour prendre conscience de l'ampleur de ce phénomène, largement sous-estimé même par la Caisse nationale d'assurance maladie, qui fait l'autruche pour ne pas avoir à admettre l'ampleur du désastre économique et financier.

En citant le chiffre de 1,8 million de cartes Vitale en surnombre, M. Brindeau reste très prudent, car le chiffre correspondant à la réalité est beaucoup plus élevé. Dans son livre Cartel des fraudes, que je recommande, le magistrat Charles Prats indique qu'il y aurait 3,4 millions de fantômes pris en charge par l'assurance maladie si l'on se base sur les chiffres de la CNAM, et 3,6 millions si l'on part du répertoire national interrégimes des bénéficiaires de l'assurance maladie.

Les sommes en jeu sont considérables, mais on ne veut pas le voir. Se fondant sur les contrôles qu'elle réalise, la Caisse d'allocations familiales – CAF – , l'une des seules caisses à avoir pris à bras-le-corps la question de la fraude, estime que 4,2 % des prestations servies sont obtenues par la fraude, ce qui représente entre 3 et 4 milliards d'euros par an pour elle seule. Si on applique le même taux de fraude à l'assurance maladie, on aboutit à des chiffres extravagants, allant de 15 à 33 milliards d'euros.

Dans ces conditions, la seule solution efficace – toutes les autres ne sont que des faux-semblants destinés à masquer la réalité – est celle consistant à biométriser le numéro d'identification des assurés sociaux, c'est-à-dire le numéro de sécurité sociale. D'autres pays, tels que la Belgique, l'ont déjà fait : pourquoi ne serions-nous pas capables de le faire également ?

L'Algérie a mis en place une carte d'identité biométrique très moderne pour un coût réduit. Nous devrions en faire autant, car c'est la seule solution qui rende impossible la création de multiples identités, grâce au recours aux empreintes digitales ; c'est la seule solution pour empêcher l'utilisation de la même carte Vitale par plusieurs personnes – une pratique à laquelle sont confrontés tous les médecins de France, notamment dans les banlieues, où une même carte Vitale passe de main en main, ce dont profitent notamment des personnes en situation irrégulière ; c'est la seule façon de sécuriser les paiements avec obligation de valider l'acte ; c'est la seule solution pour prendre contact avec la totalité des assurés sociaux, afin de s'assurer de l'existence réelle de chacun d'eux.

Même si cela doit prendre plusieurs années, il faut que chaque Français, que chaque étranger en situation régulière, qui cotise en France, puisse disposer d'une carte Vitale biométrique. C'est uniquement à cette condition que nous serons en mesure de déjouer les fraudes, qui ont pris des proportions extravagantes.

Alors que nous avons quasiment le taux de prélèvements obligatoires et les dépenses sociales les plus élevés du monde, nous avons aussi les prestations les plus incomplètes. Le pays est à l'arrêt depuis des mois, ce qui va nous coûter 200 milliards d'euros, parce que nous n'avons pas été capables d'avoir des lits de réanimation en nombre suffisant – nous en avons trois fois moins qu'en Allemagne ou en Corée. Doubler le nombre de lits de réanimation ne coûterait que 2,5 milliards d'euros, ce qui est bien peu au regard des 5 à 15 milliards que nous gaspillons parce que la France est prise pour une vache à lait. En utilisant frauduleusement la carte Vitale, des étrangers en situation irrégulière pillent notre nation, voilà la réalité !

On dérembourse des médicaments, on augmente la CSG – contribution sociale généralisée – des retraités alors que certains ne touchent déjà qu'une retraite de misère, et au même moment on dit au monde entier : « Venez vous soigner chez nous, c'est open bar ! Vous pouvez frauder, c'est cadeau ! »

Je vous le dis, c'est une folie ! Nous devons redéployer les dépenses, c'est-à-dire faire des économies sur les gaspillages pour sauver l'hôpital public, investir dans la médecine et soigner nos concitoyens.

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