Intervention de Roselyne Bachelot

Séance en hémicycle du lundi 7 décembre 2020 à 16h00
Restitution de biens culturels à la république du bénin et à la république du sénégal — Présentation

Roselyne Bachelot, ministre de la culture :

Permettez-moi, avant d'entrer dans le détail du texte, de remercier votre rapporteur, dont le travail minutieux et très éclairant, sur une question aussi complexe que celle des restitutions, mérite véritablement d'être salué.

La commission mixte paritaire réunie le 19 novembre dernier n'ayant pas trouvé d'accord, vous êtes appelés à examiner en nouvelle lecture ce texte important, qui constitue l'aboutissement d'un long travail dont l'impulsion a été donnée par le Président de la République lors de son discours à Ouagadougou en novembre 2017. Il y avait exprimé sa volonté de réunir les conditions nécessaires à des restitutions d'oeuvres relevant du patrimoine africain, dans le cadre du renouvellement et de l'approfondissement du partenariat entre la France et les pays du continent africain.

Ce projet de restitution de vingt-six oeuvres issues du trésor de Béhanzin à la République du Bénin et du sabre attribué à El Hadj Omar Tall et de son fourreau à la République du Sénégal s'inscrit dans le cadre d'une politique de coopération culturelle déjà bien engagée avec ces deux pays. Il prend place dans un contexte général de réflexion sur le rôle et les missions des musées en Europe et dans le monde. Il tient compte du caractère exceptionnel des oeuvres et des objets que nous souhaitons restituer aux deux pays qui en ont fait la demande. Je ne reviendrai pas dans le détail des objets concernés : vous connaissez tous, désormais, les caractéristiques de ces oeuvres, leur provenance et, bien entendu, leur caractère exceptionnel. Je veux en revanche insister sur le sens, la portée et les conséquences du texte qui vous est soumis.

Tout d'abord, il convient de rappeler que la restitution de biens culturels par un État à un autre n'a en soi rien d'inédit, y compris dans la période récente. Parmi les dernières restitutions effectuées, je mentionnerai celle d'une statue volée d'Amon-Min à l'Égypte en 1981, en application du jugement d'un tribunal français, ou celle de vingt et une têtes maories à la Nouvelle-Zélande par la loi votée le 18 mai 2010 à l'initiative de la sénatrice Catherine Morin-Desailly. Ces différents cas montrent bien que le droit français propose plusieurs voies pour effectuer des restitutions.

S'agissant des objets dont nous traitons aujourd'hui, le Gouvernement a décidé de procéder par voie législative. En effet, le Bénin et le Sénégal n'ont pas saisi de juridiction pour contester la propriété de la France sur ces objets. C'est donc bien une décision du législateur, et non du juge, qui doit apporter une réponse à leur demande. Aussi, cette loi, si vous l'adoptez, n'aura pas pour effet de créer une jurisprudence, comme le ferait la décision d'un juge. Ce projet de loi ne vaut que pour le cas spécifique des objets qu'il énumère expressément : il n'institue aucun droit général à la restitution en fonction de critères abstraits qui seraient définis a priori.

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