Intervention de Gérard Cherpion

Séance en hémicycle du mardi 21 novembre 2017 à 15h00
Renforcement du dialogue social — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérard Cherpion :

Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, après la loi d'habilitation à prendre des ordonnances pour réformer le code du travail, lesquelles ont été publiées en septembre, vous nous demandez aujourd'hui, madame la ministre, de les ratifier.

Ces cinq ordonnances modifient grandement la législation du travail. Alors que notre pays est touché par un chômage de masse, avec toujours plus de six millions de demandeurs d'emploi inscrits à Pôle emploi – dont un million supplémentaire entre 2012 et 2017 – , et alors que le chômage progresse encore aujourd'hui, il était urgent de mener cette réforme. Les Républicains sont bien conscients de cette urgence. Nous avons appelé durant les cinq dernières années le Gouvernement à agir, afin de réformer notre code du travail, qui faisait plus le bonheur des avocats spécialisés que celui des salariés et des chefs d'entreprise. Sa complexité et sa lourdeur sont des freins au développement de l'emploi. Les Républicains ont ainsi fait de nombreuses propositions pour y parvenir, préparant ainsi le terrain à des ordonnances. Notre groupe a voté pour l'habilitation à prendre ces ordonnances. Comment pouvait-il en être autrement ? Pendant la dernière législature nous avions préconisé ce que vous proposez.

Vos efforts ne doivent toutefois pas s'arrêter là. Nos entreprises n'ont pas seulement besoin de plus de liberté et de plus de sécurité, mais aussi d'un environnement propice à leur développement et à leur compétitivité, à travers la réglementation et la fiscalité. Nous serons attentifs à toujours défendre leur développement car ce sont elles qui créent l'emploi et la richesse de la France.

Je suis satisfait, madame la ministre, que la commission ait adopté un amendement de notre groupe, visant à préciser qu'en cas de fraude, le périmètre d'appréciation des difficultés économiques de la filiale française d'une multinationale doit être porté hors des frontières nationales. Certains considèrent cela comme de la loi bavarde, mais au vu de l'importance du sujet, la précision me paraît importante.

Un amendement du rapporteur a encadré l'ensemble du dispositif de l'accord de rupture conventionnelle collective. Comme le dispositif de rupture conventionnelle individuelle, il devrait répondre favorablement à certaines situations. Nous devons toutefois être vigilants afin que cet accord ne soit pas détourné en un moyen de se séparer de certains salariés plus facilement, notamment les plus fragiles. Je ne doute pas que les préfets et les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi – DIRECCTE – s'assureront de la validité de l'accord, en procédant à un examen approfondi et attentif. Le groupe Les Républicains a déposé un amendement en ce sens, sans ajouter de complexité au dispositif.

Par ces ordonnances, vous harmonisez les accords de compétitivité. Étant un défenseur de ces accords, et m'étant investi depuis plusieurs années pour la conclusion d'accords offensifs, je ne peux que saluer cette disposition. Toutefois, ces accords sont extrêmement flexibles sans pour autant sécuriser le salarié, allant jusqu'à la possibilité de baisser les salaires. Notre groupe proposera ainsi des amendements pour pallier ce manque de sécurisation. Il ne faut en effet jamais oublier que la force de l'entreprise réside, comme vous l'avez rappelé madame la ministre, dans les hommes et les femmes qui la composent, chef d'entreprise et salariés.

En ce qui concerne le compte de prévention de la pénibilité, il ne comporte plus que six facteurs, et nous saluons cette simplification. Toutefois, nous n'approuvons pas le transfert du financement du compte vers la branche Accidents du travail et maladies professionnelles, AT-MP, de la Sécurité sociale. Les cotisations AT-MP vont augmenter en raison des quatre nouveaux risques qui sortent de ce compte et qui entrent dans le mécanisme d'incapacité. Cette dépense supplémentaire pourrait, à terme, déséquilibrer les comptes de la Sécurité sociale, même si la branche AT-MP est actuellement excédentaire. Si prévention et réparation sont liées, il ne nous paraît pas justifié d'imputer le coût du compte de prévention à la Sécurité sociale. Nous avons ainsi déposé un amendement visant à rétablir le fonds de financement spécial du compte.

Enfin, alors que le Président de la République a déclaré l'égalité entre les femmes et les hommes comme grande cause nationale, le Gouvernement est revenu sur un certain nombre d'acquis, comme la suppression des fondamentaux de l'égalité professionnelle, à savoir les indicateurs de l'ancien rapport de situation comparée, qui figuraient dans la nouvelle base de données économiques et sociales. L'égalité entre les femmes et les hommes est un combat qu'il convient de continuer. Notre groupe a proposé deux amendements en ce sens.

Sur les autres sujets, le groupe Les Républicains est plutôt satisfait. Je ne citerai que le plafonnement des indemnités prud'homales, la fusion des instances représentatives du personnel, l'articulation des niveaux de négociation en confirmant le rôle de la branche tout en libérant les entreprises, ou encore la facilitation de la négociation dans les entreprises dépourvues de délégué syndical.

Toutefois, le sujet des seuils sociaux est le grand absent de cette réforme. Ceux-ci n'ont absolument pas été abordés et resteront donc un frein au développement des entreprises, même si leur effet a été lissé en matière de négociation.

Permettez-moi, en dernier lieu, madame la ministre, de vous féliciter de la concertation avec les partenaires sociaux, mais de regretter le manque de concertation avec les parlementaires. Au lieu de proposer d'apporter les modifications nécessaires aux ordonnances dans ce texte de ratification, vous allez publier une sixième ordonnance « balai » pour corriger les coquilles des cinq autres ordonnances et, certes aussi, les mettre en cohérence. À croire que vous souhaitez éviter le Parlement ! Je préfère mettre cela sur le compte de la précipitation et de l'action, mais j'espère vraiment que ces erreurs ne se reproduiront pas dans les futures réformes sociales.

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