Intervention de Adrien Quatennens

Séance en hémicycle du mardi 21 novembre 2017 à 15h00
Renforcement du dialogue social — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAdrien Quatennens :

Ils ont compris qu'elles constituent un recul sans précédent et, en définitive, une liquidation du code du travail. En dépit de la méthode employée – celle des ordonnances, mille fois décriée, qui vous permet de limiter considérablement les pouvoirs d'un Parlement que vous vous plaisez bien souvent à réduire à l'état de chambre d'enregistrement des desiderata de M. Macron – , nos débats auront permis d'éclairer les enjeux dont procèdent ces ordonnances.

Oui, madame la ministre, il convient de s'attaquer frontalement au chômage de masse qui mine notre pays : c'est là notre unique point d'accord ! Alors même qu'une stricte minorité d'employeurs – 11 % selon l'INSEE – cite le contenu du droit du travail comme un frein à l'embauche, vous vous entêtez dans cette idée absurde selon laquelle vous réduirez le chômage en réduisant les droits des salariés pour améliorer la compétitivité. Vous prenez le problème du chômage par le mauvais bout, comme avant vous MM. Sarkozy et Hollande qui vous ont ouvert la voie.

Notre diagnostic diffère en tous points du vôtre. La situation de l'emploi dans notre pays est une situation de pénurie. Tout d'abord, comme vous le savez, la notion de chômage volontaire est un leurre qui ne résiste pas à l'analyse des faits : 98 % des offres de Pôle Emploi trouvent preneur et neuf chômeurs sur dix sont en recherche active d'emploi. Par ailleurs, vous n'êtes pas sans savoir que 86 % des embauches ont lieu aujourd'hui en contrat précaire. Il n'existe aucune corrélation – il faudra sans cesse vous le répéter – entre les dispositions du droit du travail et le niveau du chômage, comme cela a été démontré à de nombreuses reprises.

La préoccupation principale des employeurs, dont vous ne vous souciez guère, est le niveau de remplissage de leurs carnets de commandes. Pour y répondre, il est urgent de relancer l'activité dans ce pays, mais pas n'importe laquelle : une activité socialement utile et écologiquement soutenable, à laquelle les membres du groupe La France insoumise proposent de parvenir grâce à la planification écologique.

Peut-être cette majorité est-elle tout simplement trop fainéante pour penser autrement que sous les auspices de la trajectoire mortifère consistant à introduire toujours plus de flexibilité en échange de statistiques du chômage améliorées, qui peinent à traduire la réalité sociale de notre pays, caractérisée par toujours plus de souffrance, notamment au travail, et pour rien ?

Votre réponse au chômage de masse, madame la ministre, c'est l'emploi précaire ! Je vous vois déjà expliquer dans quelques mois que le taux de chômage diminue grâce à vos ordonnances, sans jamais admettre que vos statistiques masquent d'abord et avant tout un développement sans précédent de la précarité de l'emploi promettant à chacun une vie pourrie, à l'image du monde du travail que vous préparez.

En attendant, votre discours de promotion des ordonnances relatives au droit du travail semble avoir échoué à berner les Français. Ils doutent – comme on les comprend ! – du bien-fondé de cette prescription amoindrissant le droit du travail au profit, selon vous, d'une liberté accrue, et ils ont raison ! Le Gouvernement continue de se targuer d'une description bien trop flatteuse des dispositions du projet de loi. Il nous incombe donc de rétablir quelques vérités sur le texte que vous nous demandez de ratifier.

Premièrement, vos ordonnances ne sont ni modernes ni adaptées à notre époque, comme vous l'affirmez. Lorsque Yvon Gattaz a obtenu, il y a à peine plus de trente ans, la fin de l'autorisation administrative de licenciement, laquelle conférait à l'inspection du travail le droit de contrôler les motifs d'un licenciement économique, le ministre qui était à votre place tenait un discours exactement identique au vôtre. Il disait : « En facilitant les licenciements, nous favoriserons les embauches car nous réduirons la peur de licencier ».

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