Intervention de Karine Lebon

Séance en hémicycle du jeudi 10 décembre 2020 à 9h00
Justice pénale des mineurs — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaKarine Lebon :

En me plongeant dans l'annexe de l'ordonnance que l'on nous demande de ratifier et qui constitue le nouveau code de la justice pénale des mineurs, je dois avouer avoir éprouvé un certain malaise. L'article préliminaire de ce code résume à lui seul la cause de ce malaise : c'est un article qui proclame des principes juridiques, mais dans lequel on ne ressent pas la moindre once d'émotion, alors que ce code a vocation à traiter du sort d'enfants aux prises avec la justice, donc d'enfants en situation de danger.

Nous sommes si loin de l'émotion et de la fierté que peut procurer la lecture du préambule de l'ordonnance de 1945, un préambule qui rappelait combien les enfants de ce pays étaient précieux, quand bien même ils étaient coupables. Ce préambule énonçait fièrement, généreusement et même affectueusement : « Le projet d'ordonnance, ci-joint, atteste que le Gouvernement provisoire de la République française entend protéger efficacement les mineurs, et plus particulièrement les mineurs délinquants. »

L'empilement des articles qui suivent l'article préliminaire est à l'avenant. Elsa Faucillon vient de mettre en évidence certains points révélant que derrière le principe de la primauté de l'éducatif sur le répressif se cachent des exceptions, des niches qui font que des enfants échappent à tout ce qui fait la spécificité de la justice des mineurs, par une accélération à tous crins des procédures.

Conjugué à une criante absence de moyens dédiés à la justice des enfants, ce nouveau code ne sera pas en mesure de juger bien, donc d'être effectif et efficient sur le long terme. Juger vite, sans s'accorder le temps et les moyens de l'éducatif, c'est juger mal les enfants – nos marmailles, comme on dit chez moi à La Réunion – , c'est juger mal de futurs adultes.

Si notre assemblée n'a malheureusement pas le pouvoir d'influer sur les moyens accordés à la justice des mineurs et à ses précieux partenaires, elle a celui d'ajourner l'examen de ce texte pour que nous puissions corriger tout ce qui vient contrarier l'ambition affichée par le nouveau code. C'est pourquoi les députés du groupe GDR voteront cette motion de rejet préalable.

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