Intervention de Sabine Rubin

Séance en hémicycle du lundi 14 décembre 2020 à 16h00
Projet de loi de finances pour 2021 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSabine Rubin :

La crise que nous traversons est certes inédite, tant par son ampleur que dans sa durée. Les mesures de reconfinement partiel qui se multiplient, chez nous comme chez nos voisins européens, et la circulation encore active du virus, dépassant les prévisions les plus pessimistes, ne risquent pas d'éclaircir un tableau déjà pourtant bien sombre. Récession programmée, effondrement de l'activité et de l'investissement, contraction de la demande solvable, paupérisation et licenciements en pagaille : tout cela nécessite d'anticiper pour mieux accompagner nos concitoyens – salariés, indépendants, TPE-PME.

Des efforts ont été consentis pour répondre à l'urgence ; dont acte. Mais il faut aussi de sortir des sentiers battus et rebattus depuis trop longtemps : ce sont ceux d'une politique économique libérale qui offre des milliards aux entreprises, même à celles qui licencient, même à celles qui distribuent des dividendes. Ce sont les sentiers d'une politique de relance par une offre brouillonne et aveugle ; les sentiers qui fixent pour horizon des contraintes budgétaires d'un autre âge, à l'aune d'une reprise incertaine ; les sentiers qui agitent la dette, pourtant illusoire en raison des taux négatifs, pour justifier la réforme des retraites et autres futurs rabots.

J'en veux pour preuve les discussions au Sénat : malgré une majorité dont on ne peut pas dire qu'elle se compose de bolcheviques patentés, nos collègues sénateurs ont néanmoins su voter des mesures transpartisanes, frappées au coin du bon sens et pour plus de justice sociale et fiscale.

L'article 4 sexies, supprimé par la commission, introduisait enfin une véritable taxe sur les GAFA grâce à la notion d'établissement stable, à rebours de l'ersatz de taxe proposée par le Gouvernement qui ne prend en considération que le chiffre d'affaires issu de la fourniture de certains services. Tandis que l'évitement fiscal représente pour les GAFA une somme colossale de plusieurs milliards, votre taxe au rabais ne devrait pas rapporter plus de 400 millions d'euros. Si l'on veut éviter l'effritement des recettes, en plus de celui du consentement de tous à l'impôt, il faut, il aurait fallu, il faudra maintenir ce nouvel article introduit par le Sénat.

De même, une majorité de sénateurs se sont accordés pour voter deux taxes exceptionnelles frappant prioritairement les profiteurs de crise : le commerce en ligne et les assurances. Malheureusement, pour certaines entreprises ou secteurs d'activité, on ne fera guère mentir le dicton : eau trouble, bonne pêche. C'est le cas en particulier pour les entreprises du commerce en ligne, qui, avec le confinement, profitent éhontément d'une distorsion brutale de la pseudo-concurrence libre et non faussée, complètement inopérante en la période. L'instauration d'une taxe sur le chiffre d'affaires de ces entreprises, à hauteur de 2 %, constituerait un premier pas, certes insuffisant au regard des bénéfices supplémentaires réels, mais un premier pas tout de même, qui aurait le mérite de réunir une large approbation sur les divers bancs de cet hémicycle.

Autre motif d'inquiétude : les collectivités financièrement exsangues depuis des décennies et durement sollicitées durant cette crise du covid-19. Les départements ne pourront pas supporter la perte d'un milliard d'euros de recettes au titre de la compensation de la suppression de la taxe d'habitation, par un transfert de TVA.

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