Intervention de Éric Woerth

Séance en hémicycle du jeudi 17 décembre 2020 à 9h00
Projet de loi de finances pour 2021 — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Woerth, président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire :

les Républicains, les socialistes, La France insoumise, les communistes et tous les autres groupes – et je me félicite que nous ayons eu un débat de qualité. L'ambiance a parfois été un peu chaude, mais c'est dans la logique des choses car l'examen d'un projet de loi de finances – qui est évidemment de la politique, et en rien de la comptabilité – est l'occasion de voir s'affronter les convictions des uns et des autres.

Il est d'autres chiffres qui donnent encore plus le tournis que les premiers que j'ai cités, à savoir ceux des prévisions de finances publiques pour 2021. Après avoir été estimé à 6,7 % du PIB, le déficit public est passé à 8,5 %, l'écart entre ces deux évaluations représentant à peu près le déficit prévu initialement, ce qui est considérable. Quant au solde général du budget de l'État, après avoir été fixé à 153 milliards d'euros, il est finalement passé à 173 milliards d'euros. Pour ce qui est des soldes budgétaires, le déficit public de 2020 a été réajusté à plusieurs reprises pour être fixé par le Gouvernement à 11,3 % du PIB. Nous verrons dans quelques mois ce qu'il en est réellement, mais cette estimation est d'ores et déjà considérable, puisqu'elle représente 223 milliards d'euros.

Si le projet de loi de finances pour 2021 répond à cette situation, ce n'est pas vraiment le cas pour certains des éléments qui le composent. La croissance des dépenses publiques à laquelle on assiste n'est pas seulement due aux dépenses d'urgence et de relance, mais également à la hausse de la dépense courante, de l'ordre de 2,9 % en volume – une précision toute relative en ces temps d'inflation quasiment nulle, où le volume et la valeur sont pratiquement équivalents. Ce chiffre traduit un effort insuffisant de maîtrise de la dépense publique, voire une incapacité à choisir entre les dépenses et à faire la différence entre les vraies et les fausses priorités.

Plus frappant encore, notre dette publique qui, lors du dépôt du projet de loi de finances, devait s'élever à environ 116 % du PIB pour 2021, ce qui est déjà considérable, va finalement dépasser la barre des 120 % : nous verrons bien ce qu'il en est vraiment puisqu'aucune prévision ne se réalise en ce moment, mais le Gouvernement retient une prévision de 122,4 %, ce qui nous éloigne un peu plus de la moyenne des dettes publiques des pays de la zone euro. Notre écart à la moyenne de l'endettement public de la zone euro, qui était de l'ordre de 15 points avant la crise, sera de l'ordre de 20 points en sortie de crise.

Il faut être courageux pour affronter une crise : un gouvernement doit l'être, les parlementaires doivent l'être, et les Français doivent l'être. Il faut être encore plus courageux pour mettre en oeuvre les réformes qui permettront à notre économie de rebondir après la crise – je parle d'un rebond durable, et pas d'un feu de paille. Avec mes collègues du groupe Les Républicains – je salue le travail de Véronique Louwagie sur ce point – , j'ai défendu l'idée qu'il fallait substituer au « quoi qu'il en coûte » le « quoi qu'il arrive ». Nous avons utilisé toutes les marges raisonnables et, si l'incertitude qui constitue un peu l'écosystème de l'examen de ce texte peut conduire à choisir la voie de l'audace, elle devrait aussi nous montrer la voie de la prudence, qui commande que toute nouvelle mesure de financement et de soutien à l'économie soit prise, quoi qu'il arrive, à endettement stabilisé.

La grandeur du politique, la grandeur de notre tâche nous impose une exigence, celle de choisir plutôt que d'empiler les dépenses, les politiques publiques et la dette qui va avec. Vous le dites souvent, mais aujourd'hui il est temps de le montrer, monsieur le ministre, en stabilisant l'ensemble des dépenses publiques, mais surtout de l'endettement public que la France aura à éponger.

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