Intervention de Dimitri Houbron

Séance en hémicycle du jeudi 14 janvier 2021 à 9h00
Conclusions du rapport de la commission d'enquête sur les obstacles à l'indépendance du pouvoir judiciaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDimitri Houbron :

Tout d'abord, je tiens à saluer le travail accompli par le président de la commission d'enquête, M. Ugo Bernalicis, qui a piloté une large batterie d'auditions, afin de mettre à notre disposition un contenu riche et varié, faisant état des obstacles à l'indépendance du pouvoir judiciaire. Même si nous avons des désaccords, parfois profonds, sur les moyens et les outils à déployer en la matière, le groupe Agir ensemble tient à souligner que la commission d'enquête a permis de conforter des positions que nous avons en commun.

Je ne vais pas revenir sur les différents éléments de contextualisation et sur les motivations qui ont légitimé une enquête sur les éléments obstruant l'indépendance du pouvoir judiciaire : l'essentiel a été rappelé par les précédents orateurs. Je tiens à consacrer ce temps de parole à éplucher quelques propositions du rapporteur Didier Paris, dont je salue aussi le travail qui mérite à mon sens d'être analysé par le ministère, voire consacré dans le marbre législatif.

Nous ne pouvons que souscrire à la proposition d'obliger les magistrats judiciaires à déclarer leurs fonctions bénévoles susceptibles de faire naître un conflit d'intérêts, ainsi que les fonctions et mandats électifs exercés par leur conjoint. Cette obligation ne souffrirait d'aucun obstacle, dans la mesure où elle s'impose aux magistrats administratifs. Bien que la déclaration d'intérêts constitue une garantie de transparence, un manquement de rubrique altère sa légitimité. Il serait donc bienvenu que ce déséquilibre entre les deux branches de la magistrature soit corrigé.

Nous souscrivons aussi à la proposition de créer une mission consacrée uniquement à la justice judiciaire dans la maquette budgétaire. C'est une demande formulée par plusieurs acteurs, notamment, sur mon territoire, par le barreau de Douai que je tiens à saluer. Cette modification de la maquette permettrait à ces professionnels d'avoir une meilleure visibilité des fonds alloués aux différents programmes découlant de la justice judiciaire.

Le groupe Agir ensemble souscrit à la proposition visant à soumettre pour avis l'avant-projet de budget de la justice au Conseil supérieur de la magistrature. Bien que chaque rapporteur pour avis d'une mission de ce budget ait pour habitude d'auditionner cette instance, cette piste mérite d'être concrétisée, afin de mettre fin à une segmentation des analyses. Les parlementaires ont besoin – je dirais même, sont demandeurs – d'un avis transversal et détaillé du Conseil supérieur de la magistrature. Cette expertise globale nous permettrait d'affiner nos approches d'un document très technique qui a des incidences quotidiennes sur le réseau juridique et judiciaire de notre pays.

Je tiens enfin à m'attarder sur une proposition du président de la commission d'enquête : la tenue d'un débat annuel sur la jurisprudence dans les commissions permanentes des chambres parlementaires, sur la base des rapports d'activité de la Cour de cassation et du Conseil d'État. Ce débat permettrait au législateur d'apprécier les évolutions jurisprudentielles devant être précisées ou non dans la loi. À titre d'illustration, certains articles du code pénal relatifs à la répression des violences commises sur les animaux manquent de précision. Régulièrement la jurisprudence apporte des précisions qui peuvent aggraver ou assouplir les prismes juridiques. Je retiens aussi l'exemple des litiges en matière de recours aux généalogistes lors des recherches de successeurs : ayant travaillé sur le sujet, l'analyse de la jurisprudence se révèle tortueuse et touffue, parce que ponctuée de revirements qui perturbent tout un pan de la profession, notamment les notaires. Cette proposition mérite clairement d'être étudiée, car elle contribue concrètement à apporter de la visibilité aux justiciables et au monde de la justice.

En conclusion, je réitère la satisfaction du groupe Agir ensemble : le travail de cette commission d'enquête a pu enrichir et consolider des positions partagées par des parlementaires issus des différents groupes.

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