Intervention de Jean-Louis Bricout

Séance en hémicycle du jeudi 14 janvier 2021 à 15h00
Politique du logement

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Bricout :

Depuis 2017, le groupe Socialistes et apparentés vous alerte sur les conséquences néfastes de votre politique pour le secteur du logement en général et du logement social en particulier. Le compte du logement 2019 publié par votre ministère est édifiant à cet égard : si les dépenses liées au logement progressent en 2019, il ne faut pas nécessairement y voir un signe positif. En effet, les dépenses courantes que sont les loyers et les factures d'eau et d'électricité contribuent plus à la hausse des dépenses totales – 1,7 % – que les dépenses d'investissement.

Le logement continue à représenter plus de 26 % des dépenses des ménages ; c'est un vrai problème. Pour y faire face, les propriétaires emprunteurs ont pu, ces dernières années, bénéficier des taux parmi les plus favorables depuis les Trente Glorieuses. En même temps, la durée moyenne des emprunts a augmenté d'un an et demi pour passer à presque vingt et une années de remboursement. À l'autre bout du spectre, en revanche, le montant des aides au logement est à son niveau le plus bas depuis 2008 – 38,5 milliards d'euros – et il s'est encore dégradé de 10,4 % depuis 2016. Permettez-moi de m'interroger sur vos réformes que vous dites « de progrès » ! Vos choix sont d'autant plus néfastes que nous nous apprêtons à faire face à une dégradation de la situation économique et sociale des ménages due aux conséquences de l'épidémie de covid-19.

Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2021, je vous alertais sur l'insuffisante budgétisation des APL, en raison de cette situation, et sur le décrochage de la production des logements sociaux, bien en deçà des besoins de nos concitoyens. Là aussi, les chiffres de votre ministère parlent d'eux-mêmes : en 2017, 124 000 nouveaux logements sociaux ; en 2018, 113 000 ; en 2019, 109 000. Quant à 2020, vu le contexte, on peut craindre la poursuite de la dégradation.

En Île-de-France, alors que la demande ne fait que s'amplifier, seuls 72 000 des 720 000 demandeurs de logements sociaux, soit 10 %, ont pu entrer dans le parc social en 2019, ce qui représente un délai d'attente théorique de dix ans. Où est votre prétendu choc de l'offre ? Il en va de même pour le nombre de permis de construire délivrés au cours des douze derniers mois : 499 000 à l'entrée en fonction du Président de la République ; 429 000 à la veille du premier confinement ; 389 000 en fin d'année 2020. Même chose pour le soutien direct de l'État aux particuliers investisseurs : 13,6 % en 2017, 10,4 % en 2019. Il faut remonter à 2004 pour retrouver un niveau aussi bas.

Là encore, ce décrochage de la production de logements ne pourra avoir pour effets qu'un renchérissement du marché et des difficultés accrues pour nos concitoyens.

Il vous restait, pour compenser l'échec de vos autres choix en matière de logement, le domaine de la rénovation énergique. Nous saluons la création du dispositif MaPrimeRénov' et son succès, mais regrettons à nouveau qu'il ait fallu attendre deux ans avant que vous répondiez à notre demande en faveur d'un mécanisme d'aide ouvert à tous – occupants comme bailleurs, ménages modestes comme plus aisés – et à la charge administrative allégée. Nous déplorons en outre l'adoption d'une stratégie de rénovation à la découpe, alors que seule une approche de rénovation globale et performante des logements peut – à condition bien sûr d'y mettre les moyens – nous permettre d'atteindre la neutralité carbone en 2050, comme le prévoit la loi relative à l'énergie et au climat.

Madame la ministre déléguée, nous arrivons à un moment clef du quinquennat : notre économie a besoin d'un rebond exceptionnel, et le logement en constitue un des principaux moteurs. Je vous invite à vous inspirer de notre proposition de loi portant création d'une prime pour le climat et de lutte contre la précarité énergétique, qui prévoit des mesures de nature à lever tous les freins au déclenchement des travaux : accompagnement des familles, démarche de rénovation globale et performante du logement, simplicité par un système de subventions forfaitaires et reste à charge remboursé à la mutation du bien – vente ou succession.

Quelles mesures supplémentaires comptez-vous prendre pour stimuler la production de logements, notamment de logements sociaux et abordables – j'insiste sur ce dernier point, car le PLS répond rarement aux besoins des métropoles ? Quelles mesures comptez-vous prendre pour renforcer l'ambition du dispositif MaPrimeRénov' afin d'atteindre les objectifs définis par votre majorité dans la loi relative à l'énergie et au climat ?

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