Intervention de Marietta Karamanli

Séance en hémicycle du mardi 9 février 2021 à 15h00
Report du renouvellement des assemblées territoriales — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarietta Karamanli :

Le texte dont nous discutons est celui adopté par nos collègues du Sénat, lesquels, contre l'avis du Gouvernement, avaient prévu par amendement que le second tour aurait lieu au plus tard le 20 juin. Pris par surprise il y a un an par la pandémie, nous sommes aujourd'hui en mesure de prendre des dispositions sanitaires pour que ces scrutins aient bien lieu au plus tard le 20 juin. Car nous ne pouvons pas laisser la pandémie décider pour les Françaises et les Français, nous ne pouvons pas laisser la démocratie dépendre des aléas d'une crise avec laquelle nous allons peut-être devoir vivre longtemps.

Dans notre pays, la source du pouvoir est le suffrage universel, ce qui rend nécessaire que celui-ci s'exerce de façon régulière. Notre position consiste à tenir bon sur le mois de juin, ce qui suppose des précautions sanitaires très strictes. Le report doit être mis à profit pour organiser une campagne officielle radiotélévisée pour les élections départementales et régionales, faciliter les procurations des personnes malades ou vulnérables, et convaincre nos concitoyens de l'importance de ce scrutin dans leur vie de tous les jours – je rappelle que les départements sont compétents en matière d'action sociale et de gestion des collèges, tandis que les régions le sont en matière de transports, d'économie et de gestion des lycées. C'est l'occasion de rappeler que, dans le cadre de la démocratie de proximité, les élus départementaux et régionaux exercent une mission déterminante pour toutes et tous.

À l'initiative de notre collègue sénateur Jean-Pierre Sueur, un amendement visant à ce que les sondages d'opinion des prochaines élections régionales et départementales soient plus encadrés a été adopté : il est proposé que, dans un souci de transparence, les instituts de sondage et les médias précisent la marge d'erreur pour chaque sondage publié. Il importe de redire que les électrices et les électeurs ont l'issue des élections entre leurs mains, et que celle-ci n'est en rien déterminée par les estimations, qui ne constituent qu'une photographie des opinions et des préférences à un moment donné.

Le report des élections n'est qu'une solution de court terme, qui ne peut pas être indéfiniment reproduite : la démocratie ne peut être mise entre parenthèses. Le groupe Socialistes et apparentés proposera plusieurs amendements visant à donner plus de visibilité aux candidats, à encadrer les délais de convocation des élections, à anticiper les effets d'une prolongation du mandat à horizon de six ans et à réduire le délai de validation des comptes de campagne en l'absence de contentieux.

Les amendements proposés visent ainsi à prévenir les difficultés car, si celles-ci ont un caractère technique, ce projet a, lui, une dimension politique. Nous souhaitons éviter que, comme lors des élections municipales de 2020, une interruption de trois mois entre les deux tours aggrave l'abstention et pose la question du déséquilibre entre les sortants et leurs concurrents, la crise sanitaire ne permettant pas une campagne normale et sereine.

Si le texte revu par le Sénat prévoit, en son article 2, que les conditions de sécurité sanitaire feront l'objet d'un rapport public, rien n'indique que l'appréciation des risques par la population sera la même. Si le texte prévoit bien des dispositions de nature à faciliter le vote par procuration et le déroulement des opérations, un jour ou l'autre se posera la question du développement de la participation des citoyens aux élections selon d'autres modalités. Ni le vote par correspondance, qui a déjà été mis en oeuvre, ni le vote à distance, qui suppose des conditions de sécurité nouvelles, ne sont pour l'heure évoqués, ce que nous regrettons.

Pour ce qui est du vote à distance et du vote par internet, nous devons faire bouger les choses. À l'issue des travaux de la mission sur l'identité numérique que j'ai eu l'honneur de présider, notre assemblée a adopté des recommandations visant à développer l'identité numérique. Elle a demandé à l'État de fixer un objectif ambitieux de déploiement de la carte d'identité numérique à échéance de moins de cinq ans, afin de combler le retard français en la matière. Une cinquantaine de recommandations ont été adoptées, il convient désormais de leur donner corps et de faire évoluer nos élections.

La France peut devenir un modèle de participation électorale électronique dans de bonnes conditions de sécurité. Les contraintes résultant de la pandémie doivent nous conduire à accélérer le déploiement de l'identité numérique de manière à anticiper les risques de nouvelles pandémies ou d'autres événements. À défaut, il est à craindre que l'on constate demain un effritement, voire un effondrement de la participation de nos concitoyens aux élections. Notre groupe votera donc ce texte, tout en appelant l'attention de notre assemblée sur les besoins d'évolution et d'amélioration du mode de scrutin.

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