Intervention de François de Rugy

Séance en hémicycle du mercredi 10 février 2021 à 21h00
Respect des principes de la république — Article 19 bis

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois de Rugy, président de la commission spéciale :

Je voudrais simplement rappeler que l'article 19 bis a été ajouté au cours de nos débats en commission spéciale. Je souhaite vraiment qu'il soit maintenu car je considère qu'il constitue un apport essentiel au texte. Il se nourrit des échanges approfondis qui ont été menés avec le Gouvernement, et ce depuis fort longtemps car, comme l'a rappelé la rapporteure Laetitia Avia, nous ne l'avons pas sorti brusquement de notre chapeau : il est issu d'un travail de longue haleine sur la régulation d'internet, sujet dont il est question depuis plusieurs années.

Une tentative lancée ici, à l'Assemblée nationale, avait d'ailleurs abouti à l'adoption d'une proposition de loi qui a été largement censurée par le Conseil constitutionnel. Nous en avons pris acte, mais nous avons été nombreux, sur différents bancs – peut-être pas tous – à dire que la lutte contre la haine sur internet – qui est aujourd'hui un des principaux vecteurs de haine – ne devait pas être abandonnée et que ce travail devait donc être poursuivi.

Je l'ai dit en commission spéciale et je tiens à le répéter : les dispositions que nous voulons introduire sont parfaitement cohérentes avec la conception que nous avons de la République. Certes, il existe des opérateurs privés qui établissent un certain nombre de règles, dont certaines peuvent même être l'objet d'un contrat passé avec les utilisateurs de leurs services, mais les lois de la République sont au-dessus des conditions générales d'utilisation. Celles-ci ne s'imposent pas à nos lois, c'est l'inverse, et nous avons là l'occasion de le dire.

Enfin, je le dis aux collègues qui – et ce n'est pas un reproche, bien entendu – n'ont pas pu participer aux travaux de la commission spéciale : tout au long des auditions que nous avons menées, des personnalités très variées nous ont dit qu'il serait souhaitable d'introduire dans le projet de loi des dispositions relatives à la haine en ligne.

Je le dis notamment à Patrick Hetzel et à Frédéric Reiss, qui ont déposé des amendements de suppression de l'article : les représentants des cultes ont été les premiers à formuler cette requête, et je me souviens leur avoir répondu, de concert avec la rapporteure Laetitia Avia, que nous comptions bien le faire. Nombre d'entre eux nous ont dit : « Faites-le ! », et l'un des représentants des cultes est même allé jusqu'à démonter l'argumentaire du Conseil constitutionnel qui avait conduit à censurer la loi visant à lutter contre les contenus haineux sur internet.

D'autres personnes auditionnées ont dit la même chose et il était d'ailleurs frappant d'observer que l'ensemble des représentants des cultes approuvaient cette idée. En effet, qu'ils soient imams, rabbins, prêtres ou pasteurs, ils sont tous susceptibles d'être livrés à la vindicte, à des cabales et à des campagnes de haine sur internet, qui peuvent être aussi bien antisémites qu'islamophobes. Les obédiences maçonniques nous ont également dit, spontanément, qu'elles étaient victimes de la haine sur internet, tout comme l'Association des maires de France et les associations d'élus, et nous pourrions ainsi multiplier indéfiniment les exemples.

C'est donc bien la combinaison des articles 18, 19 et 19 bis qui permet selon moi de créer un arsenal juridique pour lutter contre ces agissements : il est absolument nécessaire de repousser nettement et franchement les amendements de suppression et de voter l'article 19 bis.

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