Intervention de Danièle Obono

Séance en hémicycle du lundi 15 février 2021 à 16h00
Justice pénale des mineurs — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanièle Obono :

Un simulacre de débat tout court, tant est patente l'absence de réelle concertation avec les acteurs et les actrices de terrain. Ce sont leurs mots que vous refusez d'entendre, monsieur le ministre. Mais ne vous en déplaise, ils marquent bien à quel point le Gouvernement et la majorité se moquent du débat démocratique, comme cela a été le cas pour toutes les réformes réactionnaires engagées depuis le début du quinquennat malgré les prétendues consultations organisées pour les faire approuver. Le choix de la voie des ordonnances, associée à une procédure accélérée qui réduit le Parlement au rang de chambre d'enregistrement, suivant les desiderata de Jupiter, va d'ailleurs dans le même sens.

Sur le fond, contrairement aux propos du ministre de l'intérieur, qui parle à longueur d'antenne d'ensauvagement, la délinquance des mineurs ne cesse de baisser depuis les années 2000. Le taux d'enfermement est pourtant très élevé, démontrant la sévérité de la justice pénale des mineurs, alors que la répression devrait être l'exception. La France est déjà le pays le plus répressif d'Europe en la matière ; ce texte l'engage encore plus dans cette voie.

Comme l'a rappelé notre collègue Bernalicis, cette réforme n'est en vérité motivée que par des objectifs comptables, auxquels s'ajoutent quelques éléments d'électoralisme ainsi que l'adhésion idéologique désormais avérée de la Macronie aux idées de la droite extrême et de l'extrême droite.

Aller plus vite avec des effectifs réduits, telle est l'antienne appliquée depuis trois ans à tous les secteurs à peu près. Or le seul moyen d'accélérer les délais de jugement sans augmenter les effectifs est finalement de réduire les droits fondamentaux des personnes poursuivies – des enfants, en l'occurrence. C'est le choix qu'a fait le Gouvernement en reléguant au rang de simple exception le principe cardinal de la justice des mineurs que constitue l'excuse de minorité.

C'est de magistrates et de magistrats, de greffiers et de greffières, de travailleuses et de travailleurs sociaux dont manque la justice des mineurs. La protection des mineurs manque tout autant de moyens humains et financiers, qui permettraient de prévenir les passages à l'acte délinquants, puisque 85 % des enfants pris en charge par un ou une juge et par la protection judiciaire de la jeunesse ne récidivent pas à la majorité.

L'accélération de la réponse pénale, présentée comme un progrès, se fait en réalité au détriment du temps éducatif. Cette réforme conforte l'abandon progressif de la spécificité de la justice des mineurs, avec un alignement sur la justice des majeurs. « La France n'est pas assez riche d'enfants pour qu'elle ait le droit de négliger tout ce qui peut en faire des êtres sains. » proclame le préambule de l'ordonnance de 1945. Votre texte, monsieur le ministre, poursuit l'abandon de cette maxime. Une fois au pouvoir,

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