Intervention de Laurent Pietraszewski

Séance en hémicycle du lundi 15 février 2021 à 16h00
Santé au travail — Présentation

Laurent Pietraszewski, secrétaire d'état chargé des retraites et de la santé au travail :

Nous entamons aujourd'hui l'examen en séance publique de la proposition de loi pour renforcer la prévention en santé au travail. Après la conclusion de l'accord national interprofessionnel le 10 décembre dernier et les travaux de la commission des affaires sociales de la semaine dernière, nous franchissons désormais une nouvelle étape dans la réforme de la santé au travail.

Chacune de ces étapes est essentielle. Au début du mois de mars 2020, le Gouvernement a proposé aux partenaires sociaux de se saisir de cet objet, selon la méthode instaurée par la loi du 31 janvier 2007 de modernisation du dialogue social dite loi Larcher, qui prévoit d'inviter les partenaires sociaux à négocier avant de rédiger un texte de loi portant sur les relations individuelles et collectives du travail.

Les organisations syndicales et patronales ont répondu favorablement à cette invitation et ont ensuite entamé leurs travaux au moins de juin, à partir du document d'orientation transmis par le Gouvernement. Les six mois de négociation des partenaires sociaux auront permis d'aboutir à un accord solide et équilibré, quelques semaines seulement après la conclusion d'un autre accord relatif au télétravail.

La signature de cet accord national interprofessionnel par le MEDEF, la Confédération des PME, l'Union des entreprises de proximité, la CFDT, Force ouvrière, la CFE-CGC et la CFTC prouve la capacité des partenaires sociaux à écrire ensemble une nouvelle page de la santé au travail. Construire cette convergence de vue n'a pas été chose facile ; elle a nécessité un travail approfondi, de l'ouverture, des concessions réciproques. Je ne m'étendrai pas sur le contenu des négociations, nous aurons l'occasion d'y revenir durant nos débats.

Je voudrais simplement souligner la vitalité de notre dialogue social qui, en période de crise, prend tout son sens. Nos partenaires sociaux ont su dépasser leurs antagonismes pour être force de proposition et concrétiser l'ambition d'une santé au travail et résolument orientée vers la prévention.

Désormais, la démocratie parlementaire prend le relais de la démocratie sociale. Ces deux formes de légitimité, ni concurrentes ni redondantes, sont complémentaires pour ouvrir la voie à un accord le plus large possible. Le dépôt de cette proposition de loi, le 23 décembre dernier, est intervenu quelques jours seulement après la conclusion de l'ANI. L'initiative permet de donner corps à cette négociation fructueuse et de la transposer dans notre droit.

Je tiens, dès lors, à saluer l'engagement de la majorité présidentielle et en particulier le vôtre, mesdames les rapporteures, qui avez soutenu cette initiative avec les groupes LaREM, Dem et Agir ens. Vous savez combien je suis attaché à cette démarche collective de la majorité présidentielle.

Au-delà de son engagement, je sais pouvoir compter sur celui de tous les députés en faveur de la prévention et de la rénovation de notre système de santé au travail. Je suis convaincu que nous pouvons construire un consensus élargi au sein de votre assemblée, puis avec le Sénat.

Si le Gouvernement se félicite de cette méthode inédite de transposition, il devra veiller, jusqu'à l'issue de la navette parlementaire, au respect des équilibres – délicats et donc fragiles – atteints par les organisations patronales et syndicales.

La traduction de l'ANI adopté au mois de décembre ne se limitera pas à un ensemble de mesures législatives : un chantier réglementaire important nous attend, lequel devra s'accompagner d'une appropriation de ces dispositions par les acteurs de terrain. Du reste, j'ai eu l'occasion d'indiquer à la présidente de la commission des affaires sociales, Fadila Khattabi, que je me tenais à sa disposition sur ce sujet : j'aurais plaisir à venir devant la commission pour parler de cette déclinaison réglementaire, si vous le souhaitez.

S'agissant du contenu de la proposition de loi, il permet, à l'évidence, d'accélérer la modernisation de notre système de santé au travail. Le texte s'inscrit dans la continuité de la résolution appelant à faire de la France l'un des pays les plus performants en matière de santé au travail, adoptée par l'Assemblée nationale le 22 juin 2020 à la suite des nombreux travaux réalisés à l'initiative du Parlement ou du Gouvernement et dont Mme la rapporteure Charlotte Parmentier-Lecocq a déjà fait mention. J'ai du reste bien en tête, madame la rapporteure, les travaux que vous avez vous-même produits en 2018 avec Bruno Dupuis et Henri Forest, ou ceux réalisés en 2019 avec Pascale Coton et Jean-François Verdier sur la santé au travail dans la fonction publique.

Dès lors, mesdames et messieurs les députés, c'est une course de fond ayant débuté il y a déjà plusieurs années qui trouve désormais sa traduction concrète dans la présente proposition de loi. Nos échanges cette semaine permettront d'approfondir certains de ses objets.

Dans l'immédiat, je souhaite souligner plusieurs avancées que je trouve particulièrement significatives : le renforcement de l'approche préventive de la santé au travail ; la traçabilité collective de l'exposition aux risques professionnels, notamment chimiques ; la définition d'une offre socle de services déployée auprès de l'ensemble des entreprises, y compris celles de petite taille ; la création d'une procédure de certification qui permettra de soutenir les efforts de qualité ; la lutte pour le maintien dans l'emploi, avec la création d'une visite de mi-carrière permettant de vérifier l'adéquation entre le poste de travail et l'état de santé.

D'une façon générale, j'ai pu mesurer, notamment lors de mes déplacements, la très forte attente des salariés et des entreprises envers les services de santé au travail. Je l'ai constaté à chaque fois et encore, ces dernières semaines, dans le cadre des visites des services de santé au travail de Soissons, de Saint-Omer ou encore de Dijon ou de Molsheim.

Dans la mesure où la proposition de loi vise à répondre à cette attente et à poursuivre l'ambition d'une médecine du travail adaptée aux entreprises et aux parcours professionnels du XXIe siècle, le Gouvernement la soutiendra résolument.

Je me dois toutefois de souligner les interrogations soulevées par certaines dispositions, parfois confirmées lors des débats en commission. Je pense notamment à la prise en compte des particularités des TPE-PME concernant le programme de prévention. L'enjeu pour celles-ci, c'est la réalisation et le suivi du document unique d'évaluation des risques professionnels, le DUERP, sans qu'il soit nécessaire d'ajouter de nouvelles contraintes.

Je pense également à l'accès des médecins et infirmiers en santé au travail au dossier médical partagé. Les débats parlementaires devront permettent de lever les dernières réserves soulevées lors de l'examen de la proposition de loi par le Conseil d'État.

Avant de m'en remettre à nos débats, je salue les 8 000 professionnels de la santé au travail, qui ont perçu la création d'un secrétariat d'État dédié comme un engagement fort du Gouvernement et du Président de la République sur la voie de la reconnaissance et de la modernisation de leur activité, si nécessaire aux entreprises comme aux travailleurs. Ils se sont mobilisés sans relâche depuis le déclenchement de l'épidémie dans chacun des territoires que vous représentez ici et attendent désormais les outils et les moyens de travailler plus efficacement au service de la santé de l'ensemble des travailleurs et des entreprises.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.