Intervention de Clémentine Autain

Séance en hémicycle du mercredi 17 février 2021 à 21h15
Lutte contre les inégalités mondiales — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaClémentine Autain :

Ce projet de loi consacré à l'aide publique au développement revient au fond à sortir un parapluie dans la tornade. Tout d'abord, il arrive bien tard : comme vous le savez, il aurait dû être examiné en 2019 – nous sommes en 2021. L'examen détaillé du texte révèle d'ailleurs que les termes utilisés sont hors-sol car ils datent d'avant la crise du covid-19. Or nous connaissons une situation nouvelle où 115 millions de personnes risquent de basculer dans la pauvreté, c'est-à-dire un revenu de moins de 2 dollars par jour. Pendant ce temps, la richesse des vingt-cinq personnes les plus riches du monde a augmenté de 25 milliards de dollars en deux mois. Nous sommes donc face à l'explosion des inégalités : il aurait fallu intégrer davantage cette situation dans le projet de loi qui nous est proposé.

D'autre part, l'ambition de ce texte est insuffisante puisqu'il confirme un nouveau refus de respecter l'engagement pris le 24 octobre 1970 de consacrer à l'aide publique au développement 0,7 % du revenu national brut. Certes, l'engagement du Président de la République d'atteindre 0,55 % est tenu, mais celui de la France d'atteindre 0,7 % ne l'est pas, et il me semble que nous ratons du même coup la marche du progrès et de la solidarité qu'une grande nation, une puissance économique aussi riche que la France aurait pu et dû franchir.

Le projet de loi maintient l'aide publique au développement dans ses contradictions, au lieu de clarifier son orientation et son objet. Nous l'avons dit en commission et je le répète, même si vous avez tenté de rectifier le tir par un amendement depuis : l'absence de valeurs normatives dans ce texte est, à mon sens, totalement révélatrice des ambiguïtés de la mission relative à l'aide publique au développement. Encore une fois, nous attendions de ce texte qu'il clarifie les choses et qu'il mette fin au manque de transparence notoire qui caractérise l'AFD et sa fameuse filiale Proparco – Société de promotion et de participation pour la coopération économique – : or le débat parlementaire n'a apporté aucun éclaircissement en la matière.

Ainsi ce texte, qui un véritable gruyère, ne fait en même temps aucune place à la transparence ; d'où, ce soir, un étrange et immense sentiment de décalage entre, d'une part, les belles paroles aussi bien prononcées par M. le ministre Le Drian que par les parlementaires de La République en marche, venus nous expliquer des dispositions merveilleuses et, d'autre part, ce texte qui ne les prévoit pas.

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