Intervention de Elsa Faucillon

Séance en hémicycle du jeudi 18 février 2021 à 9h00
Aide individuelle à l'émancipation solidaire — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaElsa Faucillon :

Notre pays fait face à une crise sociale majeure. L'épidémie de covid-19 a passé notre société au révélateur, mettant à jour et amplifiant des vulnérabilités préexistantes. La pauvreté concerne désormais 10 millions de personnes ; la précarité alimentaire touche 5 millions de nos concitoyens ; les demandes de RSA auprès de mon département explosent ; le chômage des jeunes, surtout dans les quartiers populaires, est en passe d'atteindre des taux records.

Dans ce contexte, la jeunesse trinque particulièrement : étudiants qui ne trouvent plus de petits boulots ou de premier emploi, intérimaires brutalement remerciés, apprentis sans entreprise pour les accueillir.

« Mange bien à la cantine », « n'oublie pas ton goûter », « prends des fruits au dessert », sont des phrases que nous avons entendues durant des années avant de les répéter à nos propres enfants : comment pouvons-nous donc supporter de voir ces mêmes enfants, nos jeunes, grossir les files d'attente devant les banques alimentaires ? Nous devrions sentir qu'il y va de notre devoir d'agir. Aujourd'hui, nous vous demandons de passer aux actes, de ne pas fermer les yeux.

La crise pèse deux fois plus sur les revenus des Français de 20 à 25 ans que sur ceux du reste de la population de notre pays : c'est ce qui ressort d'une étude publiée en janvier par le CAE, le Conseil d'analyse économique. À ces difficultés matérielles s'ajoute une profonde détresse psychologique, conséquence de la limitation des interactions sociales, de la fermeture des universités, de l'arrêt des activités socio-culturelles, mais aussi de l'absence de perspectives d'avenir. Tous ces constats ont notamment été formulés en décembre 2020, dans le rapport de Marie-George Buffet au nom de la commission d'enquête pour mesurer et prévenir les effets de la crise du covid-19 sur les enfants et la jeunesse.

Dans ce cadre, soixante-cinq propositions ont été adoptées à l'unanimité afin de remédier aux difficultés éducatives, psychologiques, financières, sociales, que rencontrent les enfants et les jeunes du fait de la crise. Depuis un an, force est de constater que ni le Gouvernement, ni sa majorité n'ont pris la mesure de ce choc économique et social, se contentant de distribuer des aides ponctuelles – 150 euros ici ou là – et de présenter un plan largement insuffisant, qui laisse sur le bord de la route des pans entiers de notre jeunesse. On peut se montrer sceptiques face au recyclage de solutions utilisées depuis vingt ans : contrats aidés, service civique, autant de voies d'insertion parallèles qui ne mettent pas fin au chômage massif des jeunes.

Refusons de faire de la génération covid une génération sacrifiée ! Nous ne pouvons plus nous contenter de saupoudrages ou de demi-mesures. C'est pourquoi nous abordons avec intérêt l'examen de la proposition de loi de nos collègues socialistes visant à instaurer un revenu de base et une dotation universelle dès 18 ans. Il nous faut désormais inventer des dispositifs pérennes afin d'assurer un revenu et de garantir la continuité de leurs droits sociaux à ces jeunes exclus du RSA en raison de leur âge, bénéficiant rarement de l'assurance chômage faute d'avoir suffisamment travaillé, confrontés à une crise économique majeure qui leur ferme les portes du marché du travail et plonge notre pays dans l'indignité. Oui, il faut passer aux actes !

Pour notre part, nous prônons depuis de nombreuses années l'instauration d'un revenu étudiant, qui permettrait aux jeunes d'être financièrement autonomes durant leur formation. Il serait également nécessaire de travailler à élargir l'assurance chômage, tout en renforçant les moyens des structures d'accompagnement dédiées à la jeunesse. En revanche, nous nous opposons depuis longtemps à tout projet de fusion des prestations sociales, comme à l'idée d'un revenu universel ; mais nous prenons acte des avancées que propose ce texte, la principale étant la création d'un revenu de base dès 18 ans. Les associations de jeunesse le réclament toutes, la situation sociale l'impose ; pourtant, le Gouvernement et la majorité continuent de botter en touche, renvoyant à la garantie jeunes, qui ne compte que 100 000 bénéficiaires. De même, nous sommes favorables à ce que l'attribution des prestations sociales prenne un caractère plus automatique : aujourd'hui, un tiers des personnes éligibles au RSA ne font pas valoir leurs droits.

L'urgence sociale, l'avenir, nous oblige : encore une fois, nous vous demandons simplement de passer aux actes.

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