Intervention de Boris Vallaud

Séance en hémicycle du jeudi 23 novembre 2017 à 15h00
Renforcement du dialogue social — Article 6

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBoris Vallaud :

La saisine du juge prud'homal est par nature protéiforme. Si elle tend le plus souvent, pour le salarié, à voir condamner une rupture du contrat de travail à durée indéterminée, son objectif ne se limite pas à la seule réparation du licenciement dépourvu de motif. Sont ainsi en jeu, à titre accessoire, le versement de salaires impayés ou d'heures supplémentaires, le paiement d'indemnités légales ou conventionnelles de licenciement, les congés payés afférents, le préavis.

C'est donc l'ensemble des condamnations se rapportant à toutes ces demandes qui constituent le « coût juridictionnel de la rupture », notion parfois confondue avec l'indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse, stricto sensu.

L'avant-dernier alinéa de l'article L. 1235-3 propose de laisser la possibilité au juge de tenir compte des autres indemnités versées. En fait, madame la ministre, vous proposez d'ouvrir la possibilité d'établir un barème, non plus pour les seules indemnités liées au licenciement abusif, mais bien pour l'ensemble des indemnités, en permettant au juge d'élargir le périmètre d'appréciation de celles qui pourraient être versées dans le cadre des montants maximaux prévus par le barème obligatoire. Vous le reconnaissez vous-même, monsieur le rapporteur, car vous écrivez dans votre projet de rapport : « Toutefois, l'éventuel cumul des indemnités doit impérativement respecter le montant maximum prévu par le barème obligatoire. » Cette formule, évidemment, nous inquiète et nous fait réagir.

Un amendement a été adopté en commission pour préciser que le juge ne peut, en aucun cas, tenir compte de l'indemnité légale de licenciement pour fixer le montant de l'indemnité accordée en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse. Cela prouve bien que votre rédaction est, au mieux, bancale, au pire, source de diminution des droits pour les salariés.

Comme le montrent Florian Batard et Manuela Grévy dans un article récent de la Revue de droit du travail, vous ramenez la sanction civile à une simple taxation dont l'objet est de dissuader le salarié d'agir en justice. Vous êtes en train de consacrer une thèse doctrinale, celle de l'inexécution efficace, selon laquelle il peut être plus avantageux de payer des dommages et intérêts que de tenir son engagement.

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