Intervention de Christophe Jerretie

Séance en hémicycle du mercredi 3 mars 2021 à 15h00
Débat consacré à l'europe

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Jerretie :

C'est un drôle de débat que nous avons ici sur l'Europe. Certains diront qu'il est trop large, d'autres qu'il est trop restreint, mais il est l'occasion de dire qu'il est incontestable que l'Europe a existé dans cette crise sur au moins deux sujets : l'Europe de la santé et l'Europe économique.

Commençons par l'Europe de la santé. Nous sommes tous d'accord pour dire que l'Union n'a pas brillé par sa présence au début de la crise. Mais à sa décharge, remettons en perspective cette critique en soulignant deux éléments. Tout d'abord, n'oublions pas que début 2020 la santé n'était pas une compétence communautaire. Ensuite, il y a un an, qui pouvait prédire avec quelle étonnante rapidité les laboratoires pharmaceutiques trouveraient un vaccin pour une maladie de ce type ? L'Europe de la santé se construit. Nous avons lancé une campagne de vaccination massive à l'échelle du continent, en imposant aux laboratoires une négociation sur le prix mais aussi sur l'accès aux données personnelles. Nous avons sûrement, monsieur le ministre, été trop timides et trop prudents au début.

En revanche, s'agissant du volet économique de la crise, la réponse européenne est plus éclatante, avec des instruments uniques de financement à destination de tous les États membres de l'Union européenne avec plus de 1 800 milliards d'euros mobilisés. Nous pouvons bien sûr regretter quelques éléments : les rabais qui ont été accordés à certains États, peut-être un manque d'ambition sur les ressources propres, c'est un fait. Mais l'Europe se construit au travers de négociations et nous ne pouvons pas toujours avoir gain de cause.

Toutefois, mesurons ce que j'appelle la « réaction-action » que représentent les décisions des derniers mois au sein de l'Union européenne. En effet, à ce stade, revenons un peu en arrière et imaginons ce que nous aurions dit il y a pile un an : une coordination des plans de relance ? Improbable ! Un mécanisme européen de prise en charge du chômage partiel ? Inconcevable ! Une faculté d'endettement de 750 milliards d'euros ? Impossible ! Nous avons appris de nos erreurs et de notre individualisme national. Contrairement à 2019, les Européens ont décidé de répondre ensemble. En un mot, tout n'est pas parfait mais que d'avancées !

Maintenant, monsieur le ministre, projetons-nous sur l'avenir à court, moyen et long terme. À court terme, la priorité est clairement de répondre à la crise sanitaire et à ses conséquences économiques pour la population en menant bien la coordination et la mise en place des plans de relance nationaux dans les plus brefs délais. Cet enjeu sera au coeur des discussions de l'Union européenne et des gouvernements nationaux pour l'année 2021. Aux paroles, monsieur le ministre, doivent succéder les actes et surtout la cohérence politique pour l'ensemble de notre continent.

À moyen terme, nous devons continuer à nous attaquer aux grands enjeux qui attendent notre continent, notamment celui de la croissance soutenable, socialement et environnementalement. Nous devons faire avancer le développement intrinsèque et durable du continent dans les prochaines années et la présidence française du premier semestre 2022 doit être le moment déterminant sur ces grandes politiques publiques.

Enfin, à plus long terme, comme le souligne souvent avec brio le président Bourlanges, nous devons continuer à nous interroger sur le modèle institutionnel européen. Le premier chantier reste le contrôle des politiques européennes par les parlements nationaux, cher à la présidente Thillaye. En France, nous gagnerons à avoir un débat avant chaque conseil européen pour parler de la position française. Le second chantier est celui, cher à Jean-Louis Bourlanges, de l'unanimité. Les débats sur les futures ressources propres l'illustreront vraiment. Nous ne pouvons nous satisfaire d'une augmentation de la participation des États : il faut aller plus loin et nous en avons déjà débattu.

Mais, monsieur le ministre, il sera nécessaire, avant d'aborder la question des ressources propres, d'organiser des synergies entre budgets nationaux et budgets européens, essentielles au bon fonctionnement de l'Union. La réforme institutionnelle est un enjeu organisationnel et surtout un impératif démocratique. On est loin du combat historique entre ceux qui sont pour et ceux qui sont contre l'Union européenne. Nous sommes désormais dans la phase de sa consolidation et l'objectif final doit être l'acceptabilité et la visibilité de l'Union Européenne auprès de sa population. Monsieur le ministre, nous devons oeuvrer à un nouveau slogan : le « c'est grâce à l'Europe » !

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