Intervention de Sylvie Tolmont

Séance en hémicycle du jeudi 4 mars 2021 à 15h00
Explosion de la pauvreté à la faveur de la pandémie de covid-19

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSylvie Tolmont :

Étudiants, jeunes, familles monoparentales, artisans, commerçants, extras, intérimaires, autoentrepreneurs, salariés fragilisés par le chômage partiel : voilà les nouveaux visages du million de précaires supplémentaires que compte notre pays. La crise sanitaire a été un fort révélateur des inégalités sociales : elles perdurent et s'accroissent. En 2020, le nombre de bénéficiaires du RSA a augmenté de 7,5 % selon les derniers chiffres de la DREES, autrement dit la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques. Dans mon département de la Sarthe, l'augmentation a été, cette même année, de 13,5 % : le nombre total de bénéficiaires atteint ainsi 24 000 personnes.

Votre stratégie pauvreté, lancée en 2018, qui tardait déjà à produire des effets avant la crise, s'est révélée totalement sous-dimensionnée et s'est finalement fracassée face à l'explosion de la pauvreté et à la détérioration de la situation économique. Le revenu universel d'activité qui devait en être le fleuron est désormais lettre morte.

Si nul ne pouvait anticiper l'ampleur de cette crise, il serait inconscient de ne pas la regarder en face. Il y a urgence à revaloriser les minima sociaux, en particulier le RSA. C'est d'ailleurs la première recommandation du CNLE – Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Selon la DREES, une personne sur deux vivant sous le seuil de pauvreté a un niveau de vie arbitrable inférieur à 340 euros pour manger, s'habiller, se déplacer, voire épargner. Pour une personne sur quatre, ce revenu est inférieur à 170 euros, et si l'on intègre la nourriture et les transports dans les dépenses contraintes, le revenu arbitrable tombe à 80 euros en moyenne pour les 10 % les plus pauvres.

On ne peut plus répondre à la massification de cette pauvreté à coups d'aides exceptionnelles, comme vous le faites depuis le début de la crise, sinon on court le risque de créer une fracture sociale dont notre pays pourrait ne pas se remettre. Nous avons besoin de décisions de rupture qui ne distinguent pas, d'un côté, les pauvres considérés comme méritants qui voient leur allocation augmenter et, de l'autre, les mauvais auxquels on offrirait comme seule réponse une incitation au retour à l'emploi alors même qu'il n'y a pas d'emplois disponibles – sans parler de votre réforme du chômage dont les effets promettent d'être délétères.

Monsieur le secrétaire d'État, je ne pose qu'une seule question : allez-vous enfin recalibrer votre stratégie pauvreté à l'aune de cette urgence et du risque que court notre santé démocratique ?

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